ÉNERGIE
La hausse du prix de l’électricité fragilise les exploitations irrigant

Ludivine Degenève
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La FDSEA 01 et l’Asia (Association syndicale d’irrigation de l’Ain) étaient réunies jeudi 20 octobre à La Boisse pour établir un bilan énergétique, notamment pour les exploitants irrigants de l’Ain. Au programme : discussions autour de l’achat de l’électricité, explications des hausses des prix, et pistes pour aider les irrigants. 

La hausse du prix de l’électricité fragilise les exploitations irrigant
Une cinquantaine d'irrigants étaient présents à La Boisse jeudi 20 octobre, en mal de solutions fasse à la hausse du prix de l'électricité. PHOTO/ LD

Le prix de l’électricité est au cœur des discussions, surtout depuis sa hausse, il y a maintenant quelques mois. Cette flambée des prix inquiète les particuliers comme les entreprises, mais les irrigants aussi se posent des questions quant à l’avenir de leurs exploitations. C’est pourquoi, depuis plusieurs années déjà, la section des irrigants de la FDSEA de l’Ain et de l’Isère ont pris l’habitude de proposer des commandes groupées d’électricité à leurs adhérents. Pour ce faire, les deux syndicats départementaux ont fait appel à la société Only NRJ, courtier en énergie.
Tom Fragny, chargé d’affaires à Only NRJ, est le premier à s’être exprimé sur le sujet. « Aujourd’hui, on est loin de pouvoir produire autant que ce que nous consommons. Il va falloir trouver des solutions pour produire plus. » Et l’arrêt de certains réacteurs nucléaires n’a pas arrangé les choses. En effet, 50 % d’entre eux (soit 26 sur 56) ont été mis à l’arrêt. « Toutes nos centrales nucléaires en France sont vieillissantes, avec moins de rendement, poursuit-il. On en a pas mal qui sont à l’arrêt pour maintenance et celles qui sont en route sont trop vieilles, ce qui fait qu’on a beaucoup moins de production d’électricité en France. » Un projet de centrale nucléaire peut prendre environ dix ans, répondre à toute la demande peut prendre du temps. Certains professionnels cherchent aujourd’hui des alternatives pour consommer moins d’électricité. L’autonomie des tracteurs, ou encore l’idée du photovoltaïque (notamment dans la Plaine de l’Ain, au vu de la taille des bâtiments d’élevage) sont des propositions de plus en plus mises en avant. Mais Jérôme Martin, président de la section des irrigants de la FDSEA tempère le discours, devenu houleux : « Il faut que ce soient des choses viables et réalisables ! » Cependant, il rassure en ajoutant : « Mais ce sont des pistes de réflexion. »
 
Le maître-mot : anticiper
 
Tom Fragny évoque également les causes de la flambée des prix ainsi que les conséquences pour les irrigants. « En milieu d’année 2021, on a acheté plusieurs années d’électricité », débute-t-il. À savoir que le groupe a préféré acheter l’électricité en gros, de manière à fixer les prix sur plusieurs années, plutôt qu’au prix de l’Arenh, sachant que cette année, ce dernier s’élève à 46,50 € le MWh.
Avec la possibilité de faire des contrats de 48 mois, maximum, le chargé d’affaires a ainsi pu acheter les années d’électricité pour l’année 2022, 2023, et 2024 en avance, et donc bloquer les prix en fonction du cours du marché de l’époque. « Notre stratégie a toujours été d’anticiper », précise Tom Fragny, qui explique que les années seront toujours moins chères si elles sont achetées le plus tôt possible. Ainsi, ils ont pu se fournir en électricité quand les marchés étaient autour de 57 € le MWh pour 2022, 54 € le MWh pour 2023, et 52 € le MWh pour 2024*. Le chargé d’affaires précise que ce sont les prix du marché brut, fixés par le fournisseur. L’électricité pour l’année 2025 a également été achetée, mais les cours ont déjà commencé à augmenter puisqu’il le MWh est passé à 110 €.
 
Une hausse qui s’explique 
 
Les premières hausses du prix de l’électricité ont pu être observées dès 2021, avec la reprise des activités post-Covid. « Toutes les entreprises se sont remises à tourner en même temps. À ce moment-là, il y a eu une forte demande d’électricité. On ne pouvait pas répondre à toute la demande », explique Tom Fragny. Et l’arrêt de certains réacteurs nucléaires n’a pas arrangé les choses. En effet, 50 % d’entre eux (soit 26 sur 56) ont été mis à l’arrêt. « Toutes nos centrales nucléaires en France sont vieillissantes, avec moins de rendement, constate le chargé d’affaires. On en a pas mal qui sont à l’arrêt pour maintenance et celles qui sont en route sont trop vieilles, ce qui fait qu’on a beaucoup moins de production d’électricité en France. »
D’autres causes ont pu être observées, comme le conflit géopolitique entre l’Ukraine et la Russie, ou encore le fait que les marchés du gaz et de l’électricité soient liés. Et Tom Fragny de rassurer : « On va essayer de séparer les deux marchés, de les restructurer et de les plafonner (afin d’éviter que l’un augmente en fonction de l’autre, NDLR). » Ce sujet est d’ailleurs actuellement au cœur des discussions à Bruxelles.
 
L’année 2023 s’annonce difficile
 
Le chargé d’affaires préfère rassurer quant à la livraison de l’électricité : « Je ne pense pas que ce sera compliqué au niveau de la fourniture. On a de quoi fournir les Français. » Il est cependant moins optimiste face à l’avenir. « Ce qui va être compliqué, c’est qu’on va avoir une forte hausse des marchés en fin d’année, ça c’est certain. Aujourd’hui, ce qu’on attend, c’est de remettre les centrales en France en route pour produire, parce qu’aujourd’hui on produit trop peu. On va avoir une fin d’année qui être compliquée sur le prix de l’électricité et sur les marchés. » Et l’année 2023 s’annonce elle aussi compliquée au vu de l’évolution sur le marché.
Concernant l’achat de l’électricité pour 2026, Only NRJ préfère attendre 2025, le prix étant actuellement trop élevé : près de 200 € le MWh.