72e CONGRES FNSEA
Stéphane Travert manque d'arguments faute de budget

Le 72e congrès de la FNSEA s'est achevé sur les discours de Stéphane Travert, ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, et de Christiane Lambert, présidente de la fédération, qui a bousculé le protocole. Les sujets de discorde n'ont pas manqué.
Stéphane Travert manque d'arguments faute de budget

À Tours, le ministre de l'Agriculture Stéphane Travert semblait une nouvelle fois mis, par son gouvernement, dans l'incapacité de répondre budgétairement aux attentes de la FNSEA, qui demande, sous divers moyens, que l'on redonne des latitudes financières aux exploitations françaises, pour être plus compétitives et investir. Sur l'assurance récolte, la présidente de la FNSEA demandait que la France utilise la possibilité donnée par le règlement européen Omnibus d'abaisser le seuil de déclenchement subventionnable à 20 % et d'augmenter le taux d'aide jusqu'à 70 %.

S. Travert : « Toutes ces demandes ont un coût »

Le ministre de l'Agriculture a expliqué qu'il entendait bien mais ne donnerait pas suite aux demandes récurrentes sur l'abaissement des seuils de déclenchement de l'assurance récolte ou le rehaussement des taux de subvention. « Toutes ces demandes ont un coût, a-t-il expliqué. Je ne donnerai pas suite aux demandes formulées dans le cadre de cette période de programmation ». Déception de la FNSEA : « Cela n'a pas un coût exorbitant, il faut le mettre en œuvre pour la prochaine campagne », insiste Christiane Lambert. Sur le plan d'investissement de 5 milliards d'euros, le ministre de l'Agriculture s'est évertué à convaincre les congressistes qu'il était consistant, qu'il comprenait « des financements importants [...] maintenus sous la forme de subventions ». En vain. « C'est flou, s'exaspère Christiane Lambert, en conférence de presse. Il répète et répète à l'envi « 5 milliards, 5 milliards », mais il n'y a aucun argent frais, c'est recyclé. Ce sont des dispositifs de garantie, mais ce n'est pas de l'argent frais. Cela risque de faire pschittt !

Fiscalité : qu'elle serve « la relance de la compétitivité »

Même lorsque l'État crée un dispositif en faveur des agriculteurs, comme c'est le cas pour l'assurance chômage étendue dans le secteur agricole, la FNSEA reste dubitative. « Il va créer une assurance chômage qui va créer 4 points de cotisations sociales alors qu'il a déjà retiré 7 % de compétitivité puisqu'il a déjà supprimé les 7 points qu'avait donnés Manuel Valls », estime la présidente de la FNSEA. Le gouvernement dément et assure qu'à court terme, la création de cette assurance est financée uniquement par la hausse de la CSG, assise sur l'ensemble des revenus des Français. La FNSEA précise que sa crainte réside dans le déficit de la caisse d'assurance chômage. Elle redoute que les agriculteurs ne doivent à terme la combler. La FNSEA a donc affiché des demandes fortes pour le prochain projet de loi de finances, notamment après que le ministre de l'Économie a pris l'initiative de lancer un chantier spécifique sur la fiscalité agricole. « L'objectif de cette réforme devra être la relance de la compétitivité », lance Christiane Lambert, avant de s'inquiéter de rumeurs concernant les exonérations de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) ou des plus-values.

Zones défavorisées : pas de « compensation à l'euro près »

Hasard ou non, le ministre de l'Agriculture a fait deux annonces allant dans le sens de la FNSEA, durant ce congrès, qui ont le point commun de n'engager aucune dépense supplémentaire : la création d'une mission du CGAAER sur l'avenir des zones intermédiaires et le statu quo sur le paiement redistributif. Il a par ailleurs rappelé que des compensations seraient prévues pour les régions sortant des zones défavorisées simples (ZDS), dont les agriculteurs se sont fortement fait entendre, notamment ceux des Deux-Sèvres. Il a aussi annoncé « un travail de fourmi » dans les mois à venir, pour y « accompagner » des projets. « Ce ne sera pas une compensation à l'euro près », a-t-il ensuite précisé en conférence de presse. En résumé, la FNSEA est « très déçue de la non-écoute sur des sujets capitaux pour la compétitivité de l'agriculture », a résumé la présidente de la FNSEA, Christiane Lambert. « Sur les États généraux de l'alimentation, c'est positif, mais quand on voit comment les autres pays foncent avec leur agriculture, nous, on continue à avoir des boulets aux pieds. Pire même, le ministre crée de nouveaux boulets !»

Satisfecit de la FNSEA sur les EGA, espoir sur les phytos

Fait rare, la présidente de la FNSEA a repris la parole après le discours de Stéphane Travert, rompant avec le protocole qui laisse traditionnellement au ministre de l'Agriculture le dernier mot. Elle a ainsi pu exprimer ses déceptions et ses satisfactions. Au rang des satisfactions, le projet de loi issu des États généraux de l'alimentation, qui, dans sa partie sur les relations commerciales, reprend une partie des mesures attendues par le syndicat majoritaire. Mais aussi l'inflexion ressentie par la FNSEA sur le sujet des pesticides et du glyphosate en particulier, dont Christiane Lambert a de nouveau demandé le report de son interdiction.
La veille, l'élu en charge du dossier phytos à la FNSEA, Éric Thirouin, se félicitait de l'adhésion des pouvoirs publics au Contrat de solutions.