SYNDICALISME
Entre actions « coup de poing » et travail de terrain

Lors du dernier CA de la FDSEA, le président Adrien Bourlez s’est dit satisfait de la mobilisation des agriculteurs de l’Ain pour les actions du 10 au 13 juin. Les rencontres avec les parlementaires en mai et juin ont également été positives.
Entre actions « coup de poing » et travail de terrain

Trop, c'était trop ! A l'appel de la FNSEA et des Jeunes agriculteurs, les agriculteurs se sont largement mobilisés du 10 au 13 juin, en bloquant, durant trois jours partout en France, des raffineries et des dépôts de carburant. Une action à forte résonnance, pour montrer que s'il fallait le faire, la première force syndicale agricole pouvait paralyser le pays. En Auvergne-Rhône-Alpes, cinq sites avaient été ciblés. Adrien Bourlez a salué, vendredi, la forte mobilisation des exploitants de l'Ain, qui étaient présents devant les portes de la raffinerie de Feyzin, aux côtés de leurs collègues de la Loire, de la Haute-Loire, des deux Savoie et du Jura. « C'est une action qui aurait pu durer et qui a obligé le gouvernement à revenir à la table des discussions », a expliqué le président de la FDSEA de l'Ain aux membres de son conseil d'administration, réunis à Bourg-en-Bresse.
Reçus à deux reprises pendant la mobilisation, les syndicats ont obtenu du ministre de l'Agriculture plusieurs engagements. D'abord sur l'interdiction de toutes importations distorsives : celui-ci a rappelé « les lignes rouges de la France dans les accords internationaux », comme le Mercosur, il s'est aussi engagé à œuvrer « pour plus d'homogénéité des règles européennes » et à se battre pour « pérenniser l'expérimentation sur l'étiquetage de l'origine des produits ». Le 29 juin, lors de l'examen en séance publique du projet de loi issu des États généraux de l'Alimentation (Egalim), le Sénat a enfoncé le clou en adoptant, à une écrasante majorité, l'amendement de la commission des affaires économiques, proposant l'interdiction en France d'importer des produits « ayant fait l'objet d'un traitement ou issus d'un mode de production non autorisés par les règlementations européenne et nationale ou ne respectant pas les exigences d'identification et de traçabilité imposées par lesdites règlementations ».
Concernant l'encadrement des importations d'huile de palme et le soutien aux filières françaises, les positions des syndicats semblent avoir été entendues. Une lettre de mission a été signée pour relancer le Corena (Comité de rénovation des normes en agriculture), impliquant les ministères de l'Agriculture, de l'Écologie, de la Santé et du Travail. FNSEA et JA ont aussi alerté sur les méfaits du dumping social et demandé une compensation pour la suppression du CICE pour les employeurs de main-d'œuvre saisonnière. Quant au grand plan d'investissement, Stéphane Travert a déclaré qu'il servirait « à accompagner les investissements des plans de filières ».

Bataille de l'opinion

Mais là où la mobilisation du 10 juin a le plus payé, c'est sur le terrain de l'opinion publique. Si les médias ont largement focalisé sur les importations d'huile de palme, ce thème a permis aux agriculteurs de faire passer le message d'une agriculture française exigeante, soucieuse de la qualité de ses productions et de son impact environnemental. Et d'emporter ainsi l'adhésion des citoyens français. « C'est la première fois que des mouvements environnementalistes ont soutenu les positions de la FNSEA et des JA », s'est réjoui Adrien Bourlez. Cette action n'était pourtant qu'un coup de semonce, a averti Michel Joux, vice-président de la FDSEA 01 et président de la FRSEA Aura. « Nous restons mobilisés durant tout l'été, notamment auprès de nos députés. Nous n'excluons pas une nouvelle action à la rentrée. »
Pendant ce temps-là, les débats se poursuivaient au Parlement autour de la Loi Egalim. Autre sujet structurant pour l'agriculture française, autre forme de mobilisation syndicale : durant plusieurs semaines, les responsables de la FDSEA ont rencontré, tour à tour, députés puis sénateurs de l'Ain, pour expliquer et défendre les amendements de la FNSEA. « Cette forme d'action est positive quand on prend le temps d'expliquer », a défendu le président Bourlez. Sur le titre 1 du projet de loi, les indicateurs de coût de production ont été retenus dans le calcul des prix, ces indicateurs seront diffusés par les interprofessions ou, à défaut, par l'observatoire des prix et des marges ou FranceAgriMer. Sur le titre II, des avancées ont été obtenues sur les importations distorsives (lire plus haut), la restauration collective et le bien-être animal. Preuve que le travail de terrain paie aussi.

Sébastien Duperay