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Nicolas saute du mouton au bovin

Nicolas Girard, technicien ovin de la Coopérative des Bergers Réunis de l’Ain part s’installer en agriculture. Il fait le bilan de ses six années passées au sein de la Cobra.
Nicolas saute du mouton au bovin

« J'étais content de me lever le matin malgré des horaires parfois contraignants et la charge de travail qui m'attendait. 4h du matin à l'abattoir pour trier les agneaux ça pique ! Mais le travail était motivant. J'ai bénéficié d'une totale autonomie dans mon organisation. La coopérative je l'ai gérée comme si c'était mon entreprise ».
Arrivé en septembre 2014, il s'agissait de son premier emploi après son cursus d'ingénieur agronome. « J'avais postulé car les missions étaient diversifiées. Un travail au service des éleveurs cela me motivait. Pourtant je ne connaissais pas plus que ça les agneaux ».

La tendance inversée

La filière était sur le déclin à l'arrivée de Nicolas. Il l'a redynamisée. « Le précédent technicien, Guillaume avait posé les bases du commerce, j'ai repris le flambeau et développé la commercialisation avec notamment la vente directe aux bouchers. Une quinzaine d'entre eux sont de fidèles clients. Les détaillants qui vendent sur les marchés et passaient par un grossiste traitent avec nous maintenant ». Le chiffre d'affaire de 360 000 euros il y a 6 ans est passé à 517 000 soit 40% d'augmentation. « Les 10 dernières années, le nombre total d'agneaux vendus diminuait, il est maintenant en hausse. En 2020 il avoisinera les 4000 bêtes soit 26% de hausse. La coopérative est à présent dynamique et croissante. On a inversé la tendance ».

10 nouveaux adhérents

Le nombre d'adhérents est resté constant en 6 ans, 30. « Nous n'en avons pas perdu malgré les départs à la retraite. Au contraire nous avons réussi à les renouveler avec 10 nouveaux adhérents qui font des agneaux de qualité » explique Nicolas. « Pour les agneaux vendus sous la marque Gigotin, la commercialisation a été revue. De 1000 bêtes nous sommes passés à 2000. Les ventes ont doublé en local. On valorise bien les agneaux, les éleveurs sont mieux rémunérés. En développant le local on est capable de plus de souplesse. Nous avons réalisé un véritable travail de cheville qui a porté ses fruits, de 5 clients à livrer en Gigotin nous sommes passés à 15 » savoure le technicien.
« En plus les éleveurs sont contents que la moitié de leurs bêtes soient abattues à Bourg-en-Bresse. L'autre moitié se fait sur Lyon ».
Alors qu'il assurait sa dernière assemblée générale avec à ses côtés Alexandra Lièvre qui lui succède, Nicolas en remerciant les éleveurs et les partenaires de la confiance qu'ils lui ont accordée a exprimé un regret... celui de n'avoir pas réussi à fixer les prix au delà du marché afin de rémunérer encore mieux les éleveurs. « Je pense que le prix par carcasse devrait être supérieur ».

La filière ovine...
Le département possède un emploi dédié aux agneaux. Pour Nicolas c’est une chance. « 15 à 20 000 brebis sur le département c’est une force qu’il faut préserver ».
Yolande Carron

Six années pour le pire et le meilleur

Un premier job même s’il n’a duré que 6 ans compte toujours son lot de déboires et son lot de bons souvenirs. Voici quelques anecdotes.

• Du côté déboires, ça a commencé fort pour Nicolas avec le vol du camion bétaillère 4 mois après son arrivée. Il sera retrouvé incendié. « Cela nous a permis d’investir dans un nouveau camion » sourit celui qui riait jaune à l’époque des faits.

• L’épisode de la laine l’aura marqué aussi. Avec cette ardoise de 15 000 euros laissée par l’acheteur. Le syndicat ovin après une bataille judiciaire de 3 ans a récupéré la somme.
• La prédation du lynx en 2014-15 et ses 160 brebis tuées, soit 1% du cheptel. « C’est énorme pour le département ». S’en est suivi le retour du loup en 2019 et une 50ène de bêtes tuées.

Du côté bons souvenirs. Nicolas gardera en mémoire ces années de partage avec les éleveurs : « nous avions des liens privilégiés, c’était convivial. Les coups de Blanc chez les bouchers le matin je m’en souviendrai longtemps. Tout comme l’accueil du chien, le border collie sur les exploitations qui arrive au galop. Il lui revient aussi l’histoire de Jean-Paul le chauffeur qui a été flashé à130 km dans l’ouest de la France un samedi. C’était un détournement de plaques.
Ses week-end à cuisiner de l’agneau sur grand écran au salon de la gastronomie. Les manifestations contre le loup avec les brebis sous la Tour Effel mais aussi dans les rues de Lyon...

Son projet

Ses parents approchent de la retraite. Son projet d’installation a muri. « J’ai grandi au milieu des vaches, d’ailleurs les bovins m’étaient plus familiers que les agneaux ». Confie celui qui nous appelions familièrement « Moutonnier » et que toutes les dames de l’étage s’accordaient pour le trouver doux comme un agneau ! A Saint-Vite dans le Doubs à 15 km de Besançon il transformera l’atelier vaches laitières de Dédé son père en vaches allaitantes race Aubrac. Nicolas et sa compagne Camille qui ne sera pas salariée de l’exploitation se donnent une année de transition. L’installation est prévue début 2012 mais il envisage déjà un troupeau de moutons sur ses parcelles, histoire de lui rappeler son premier job. Bonne continuation Nicolas et bienvenue à Alexandra.