LA CÔTIERE
Une tornade et de la grêle ravagent des cultures maraîchères

Margaux Legras-Maillet
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Vendredi 2 septembre, une tornade, suivie d’un orage de grêle, cause d’importants dégâts sur les communes de La Boisse et de Thil. Yannick Raphanel, Dominique Balouzet, les deux plus gros producteurs de légumes du secteur, essuient de lourdes pertes.  

Une tornade et de la grêle ravagent des cultures maraîchères
L’orage de grêle et la tornade ont fait de gros dégâts chez Yannick Raphanel, déchirant les plastiques des tunnels. Photo /YR

« C’est un film d’horreur, on n’a jamais vu ça, 100 % de la surface en légumes est touchée », détaille Yannick Raphanel, maraîcher sur la commune de la Boisse, en EARL avec son père, Gérard Raphanel, céréalier. Des dégâts causés, vendredi 2 septembre, aux alentours de 19 h 15, par une tornade. « Elle a tout balayé », déplore Gérard Raphanel. En plein sur son passage, leur exploitation est l’une des plus touchées de la zone. « On avait commencé les brocolis cette semaine. C’est mon produit phare, c’est ce qui me différencie des autres, on est que deux dans le département à en faire et ça se vendait bien. Les courgettes et les tomates, c’était la folie, on en ramassait tant qu’on voulait », se désole son fils.

L’orage de grêle et la tornade ont fait de gros dégâts chez Yannick Raphanel, déchirant les plastiques des tunnels. Photo /YR

Exceptées pour les patates, situées sur le plateau de Montluel, aucune parcelle encore plantée n’a été épargnée. Soit 12 ha de choux, brocolis, salades, courgettes, poivrons, fenouilles, carottes, panais, melons, pastèques, céleris raves, choux de Bruxelles, hachés menus. Le matériel et les grandes cultures ont aussi été endommagés. « Les maïs, dans la plaine, étaient magnifiques, c’est tout par terre, les têtes sont broyées. Derrière on a eu 20 cm de grêle, l’orage a duré une demie heure. Même notre hangar a pris, et sur mes trois tunnels de 800 m2, j’en ai un complètement fichu. J’ai une chapelle, d’à peine un an, toute vrillée, et comme je ne pouvais plus la fermée, les petits plants qui étaient dessous ont grillé », ajoute le maraîcher. 

Chez Yannick Raphanel après l'orage de grêle. Photo/YR
Le lendemain, un orage de pluie inonde l'exploitation et détrempe les sols. Photo/YR

D’autres exploitations touchées 
 
À trois kilomètres à vol d’oiseau, de l’autre côté de l’autoroute, les cultures légumières de Fraisochamp ont aussi été décimées. « On a de très gros dégâts, c’était l’apocalypse, déplore Dominique Balouzet. On a environ 500 m2 du toit de notre hangar qui s’est envolé, il a atterri sur les serres. De la grêle est tombée par-dessus et a perforé les plastiques. Au niveau des cultures, tout est haché, les choux, les courgettes, les légumes feuilles, il n’y a plus rien. Les tomates, il y a des gros trous dedans... Les carottes, on voit bien les rangs, c’est sûr. On avait beaucoup d’amarantes, il ne reste plus que des tiges ». Seuls quelques haricots verts ont échappé au massacre. « C’est une tornade, c’est très clair. J’ai deux vergers, l’un est atteint à 100 %, l’autre à 50 % donc on aura un peu de pommes, mais elles seront abîmées, poursuit Dominique Balouzet. On a eu de la chance qu’il n’y ait eu personne sur place à ce moment-là ». Une demi-heure plus tôt, plusieurs clients étaient en effet en train de cueillir sous les serres. 

Chez Dominique Balouzet de Fraisochamp, le pire a été évité et personne n’a été blessé. Mais le toit du hangar qui s’est envolé a détruit une partie des serres et des cultures. Photo/Fraisochamp

Située contre le hangar de Dominique Balouzet, une parcelle de soja appartenant à Nicolas Zimerli a aussi fait les frais de la tempête. Heureusement en bio, la pousse plus tardive a permis de limiter la casse, les gousses n’étant pas encore arrivés à maturité. Plusieurs autres exploitants sont touchés, à l’instar des Fleurs de Thil, horticulteur. 

Le toit du hangar s'est envolé sur les serres et causé d'importants dégâts chez Fraisochamp. Photo/D.Balouzet

Une tempête au pire moment
 
Le lendemain rebelote. À 16 heures, un orage de pluie déverse d’importantes quantités d’eau en quelques minutes, jusqu’à 150 mm à certains endroits. Les dégâts sont considérables, et comme beaucoup de maraîchers, Yannick Raphanel et Dominique Balouzet ne sont pas assurés. En cause, des frais d’assurance trop élevés. Et cette catastrophe survient au pire moment. Les deux exploitants n’auront pas le temps de replanter avant la fin de la saison, certains légumes comme les choux et brocolis, mettant plusieurs mois pour être près à la cueillette. « Dans quatre semaines je replante des salades, ce n’est pas un drame, mais pour tout ce qui est choux, c’est impossible, il faut trois mois minimum, et on ne vit pas avec des salades, explique Yannick Raphanel, j’avais 100 000 € de légumes dehors… » Même constat chez son voisin. « Les conséquences sont énormes, c’est au moins 150 000 € de chiffre d’affaires en moins. 32 ha ont pris. J’ai vécu la tempête de 1999 dans le Nord de la France où ça avait soufflé à 185 km/h pendant deux heures. Là c’est encore plus grave, parce qu’en 1999 c’était au mois de décembre, c’était surtout du matériel de touché », se souvient Dominique Balouzet. 

Photo/Fraisochamp

Bien qu’assuré « tempête », Nicolas Zimerli devra lui aussi accusé une baisse de rentrée d’argent, même s’il s’en sort mieux que ses confrères. « En soja, j’avais assuré 35 qtx à 750 €/t, mais c’est une année à soja et j’aurais sûrement fait les 40 qtx que je vendais à 1 000 €/t chez Bernard, en alimentation humaine. En maïs, c’était pas vilain. J’allais sûrement faire 110-115 qtx, mais j’avais assuré 90 qtx à 250 €/t et le cours est à 350 €/t maintenant ». Assuré sur la partie grande culture, Gérard Raphanel a assuré au prix fort au moment de signé le contrat d’assurance, mais celui-ci n’atteint pas non plus le prix des cours des céréales, élevé cette année. « Je m’étais assuré le maximum du prix assurable cette année, 180 €/t en maïs notamment. J’en ai déjà vendu beaucoup, mais pour le reste, même avec l’assurance, il va y avoir un gros manque à gagner », explique-t-il. Ce chiffre d’affaires aurait pourtant été bien utile aux exploitants dont la facture d’eau a considérablement augmenté cette année, près de 25 000 € en plus chez Gérard Raphanel. En fin de saison, les charges, plus importantes, vont être difficiles à compenser. Et l’exploitant de conclure : « On s’attendait à une année exceptionnelle, dans le bon sens du terme, et on va faire une année exceptionnelle, dans le mauvaise sens du terme. »