CONGRES DE LA FNSEA
Prix, résilience, les territoires... des priorités rappelées au ministre

Lors du congrès de la FNSEA qui s'est tenu à Nancy du 26 au 28 mars, Christiane Lambert n'a pas manqué de rappeler au ministre de l'Agriculture les sujets de fond sur lesquels il reste très attendu : suite des EGA, accompagnement de la transition, irrigation, loup, etc.
 Prix, résilience, les territoires... des priorités rappelées au ministre

Le 73e congrès de la FNSEA a traité de deux thèmes d'actualité majeurs, le rôle des corps intermédiaires, que le gouvernement en place a tenté de minimiser depuis le début de la mandature, avant d'être confronté à la problématique des Gilets jaunes, et l'Europe, dans un contexte de Brexit, avec la négociation de la Pac post-2020 en ligne de mire. Néanmoins, d'autres sujets presque aussi conjoncturels inquiètent tout autant la profession agricole, ce que Christiane Lambert n'a pas manqué de rappeler au ministre de l'Agriculture venu conclure le congrès. La présidente de la FNSEA a tout d'abord évoqué le chantier des prix, alors que les premières négociations commerciales après les États généraux de l'alimentation se sont avérées décevantes. « Nos trésoreries ont besoin de concret maintenant », insiste Christiane Lambert, incitant Didier Guillaume à mettre en œuvre les sanctions, pratiquer le « name and shame », voire mettre « des caméras dans les boxes de négociation ». Pour le ministre, les EGA sont, quoi qu'il en soit, une réussite, puisque « le modèle de négociation a bougé ». Une mission parlementaire de contrôle de la loi a cependant été mise en place le 14 février. Christiane Lambert, comme Didier Guillaume, se sont par ailleurs farouchement opposés à l'idée d'une TVA à 0 % sur les produits bio, comme proposé par Michel-Édouard Leclerc, une disposition qui, pour le ministre, « ne ferait qu'enrichir le distributeur ».

Irrigation, PPA, prédateurs

Toujours côté économique, Christiane Lambert a salué la mise en place de l'épargne de précaution et le maintien du TO-DE « qui durera plus longtemps que deux ans », estime le ministre. Parmi les autres points positifs, les éleveurs peuvent se réjouir de l'annonce, par le président chinois Xi Jinping en visite à Paris la semaine dernière, que son pays était prêt à « régionaliser » ses importations de porc français, dans le cas où un foyer de peste porcine africaine (PPA) viendrait à se déclarer dans l'hexagone. Un soulagement alors que la peste porcine africaine reste proche des frontières françaises. En revanche, si Didier Guillaume a rappelé avoir rouvert le chantier de l'irrigation, la profession agricole en attend davantage : « il y a toujours un blocage sur le financement par les agences des volumes au-delà de la substitution, ce qui était notre demande », précise Christiane Lambert. « On a besoin de l'irrigation, dans un contexte de changement climatique, mais aussi pour la montée en gamme », insiste-t-elle, citant les besoins en maraîchage et pour les semences. Déception également sur le sujet des retraites agricoles, qui n'a pas vu d'avancées concrètes, ainsi que sur le loup, même si le préfet coordonnateur devrait prochainement annoncer officiellement que le seuil des 500 loups a été dépassé, « ce qui nous ouvre des objectifs », a précisé Didier Guillaume.

Stigmatisation de l'agriculture

Thème cher à Didier Guillaume, la réconciliation entre agriculteurs et citoyens mais aussi, plus largement, entre ruraux et urbains, doit être accélérée, a rappelé Christiane Lambert, quand les territoires ruraux se sentent « abandonnés par l'État » en matière de services publics notamment. Face aux attaques dont ont été victimes des agriculteurs, des abattoirs, des boucheries, dont le travail a été régulièrement pointé du doigt dans les médias ces derniers temps, le ministre a indiqué que « Nicole Belloubet (ndlr : ministre de la Justice) a fait passer une circulaire aux procureurs rappelant qu'il ne fallait rien laisser passer, les paysans, les abattoirs, font partie de notre vie économique et doivent être protégés ». Si cet état d'esprit est positif, il est contrebalancé par le projet de rendre publiques les quantités de glyphosate utilisées par code postal, a de son côté rappelé la présidente de la FNSEA. Le ministre, qui a plusieurs fois rappelé l'importance et la nécessité de la « co-construction », est donc désormais attendu dans les actes.

Delphine Jeanne
 
FRSEA AURA / Au nom de la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes, son président, Michel Joux, a évoqué trois sujets majeurs lors du congrès de la FNSEA : la mise en œuvre de la loi alimentation, l’avenir de la Pac, et les relations entre agriculteurs et société.  

Michel Joux : “ Nous devons aller encore plus loin ”

 

Michel Joux

Le congrès de la FNSEA est l’occasion pour les représentants de chaque région de mettre en avant certains sujets. Côté Auvergne-Rhône-Alpes, la FRSEA par la voix de son président Michel Joux a évoqué la mise en œuvre des États généraux de l’alimentation, l’avenir de la Pac, et les relations entre agriculteurs et société. Reconnaissant que grâce au travail acharné du réseau FNSEA et JA, les choses avançaient plutôt dans le bon sens sur plusieurs dossiers, force est de constater qu’il fallait persévérer : « Nous devons aller encore plus loin pour que les décideurs politiques ne cèdent plus à des lobbyistes minoritaires ». Sur la question centrale du revenu des agriculteurs, « que de travail fourni depuis deux ans ! Notre combat porte ses fruits mais ces fruits ne sont pas encore tout à fait mûrs ». Autrement dit, désormais comme la loi alimentation le permet, c’est aux organisations de producteurs de prendre toute leur place, de jouer tout leur rôle pour que chaque maillon de la filière soit rémunéré à sa juste valeur. « Nos organisations de producteurs, nos coopératives doivent s’armer de courage. En Auvergne-Rhône-Alpes, nous comptons bien les faire avancer ».
Pac : pas question de régionaliser le second pilier
Sur la Pac, pour la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes, « la France aurait tout à perdre avec une Pac au rabais ». Le premier combat à mener est donc celui en faveur d’un budget à la hauteur des enjeux. « Notre société considère, à tort, la Pac comme une manne financière pour les agriculteurs, alors qu’elle constitue avant tout une politique alimentaire qui assure la stabilité de l’Europe ». D’où l’intérêt de se mobiliser massivement en mai prochain lors du scrutin pour les élections européennes, pour élire « des femmes et des hommes courageux, capables de défendre un projet ambitieux pour l’agriculture européenne ». Enfin, à l’instar de la FNSEA, la FRSEA est fermement opposée à toutes velléités de régionalisation du second pilier de la Pac : « avoir une politique européenne qui s’applique de manière variable au bon vouloir des exécutifs régionaux serait un non-sens. Sachons donc construire ensemble, sur les ICHN, sur la gestion des risques et sur l’ensemble du second pilier, un cadre national ferme et précis qui répondent aux attentes des agriculteurs ».

S.Chatenet