CHASSE
L’élevage de gibier, il a ça dans le sang

A Marsonnas, Didier Curt élève perdrix, faisans et canards Colvert livrés à quelque 80 sociétés de chasse du département. A une semaine du coup d’envoi de l’ouverture, rencontre avec un passionné, éleveur et chasseur dans l’âme.
L’élevage de gibier, il a ça dans le sang

Didier Curt, de Marsonnas, est un chasseur passionné, mais aussi éleveur de gibier, un métier qui l'occupe à plein temps. Mais pourquoi l'élevage ? « Mon père allait déjà à la chasse et j'adorais ça. Et puis j'ai fait des études pour être garde chasse mais le problème, c'est que lorsque je suis sorti de l'école il n'y a pas eu de recrutement pendant cinq ans, donc je me suis lancé dans l'élevage et je ne regrette pas ». Installé en 1995 au hameau de Chazelles à Marsonnas, il élève perdrix, faisans et canards Colvert. Cette année il a arrêté la production de lapins (jusqu'à 160 mères), « car les résultats n'étaient pas satisfaisants une fois lâchés dans la nature », avoue-t-il. En cause, le changement du biotope : « Les parcelles agricoles se sont agrandies, il n'y a plus assez de buissons pour abriter les lapins qui sont à la merci des prédateurs ».

Des conditions optimales d'élevage

Qu'importe, ce passionné se concentre aujourd'hui sur l'élevage de gibier à plumes qui s'épanouit dans le maïs, dans 3,5 ha de volières. Les poussins arrivent chez lui à un jour. Pour les faisans et perdrix, il se fournit chez un éleveur accouveur de Vendée dont les œufs sont incubés sur un site à Malafretaz, ainsi qu'un autre accouveur basé dans la Nièvre. Les canetons viennent quant à eux de Sologne. Les jeunes commencent leur vie dans cinq poussinières, 300 m² pour les perdrix, 1 000 m² pour les canards (sur un deuxième site à Saint-Didier-d'Aussiat) et 400 m² pour les canetons. Arrivée début mai, la perdrix passe entre six à huit semaines en bâtiments. Un période qui nécessite une surveillance de tous les instants.
« La première semaine est la plus délicate. Je vais les voir toutes les deux heures la nuit. C'est un oiseau hypersensible », dit-il. Les deux semaines suivantes, c'est la semi-liberté sous un avant-toit, avant de rejoindre une pré-volière pendant environ une semaine, puis la grande volière jusqu'à l'âge adulte à dix-sept semaines. Des animaux nourris à l'aliment complet à base de céréales jusqu'à douze semaines, puis avec du blé pour 50 % de la ration et un peu de maïs vert cultivé par l'éleveur. Le canard est vendu quant à lui entre six et huit semaines pour être lâché sur les étangs début juillet. Ils ont droit à la même nourriture que la perdrix, excepté le maïs, et sont vaccinés contre le botulisme. Le faisan, équipé de faux-becs pour éviter le piquage, est vendu à 22 semaines.

 

Le faisan, équipé de faux-becs pendant sa croissance, est vendu à 22 semaines Des oiseaux qui s’épanouissent en volière dans le maïs.

Des espèces adaptées à la demande

Didier Curt travaille aujourd'hui avec quelque 80 sociétés de chasse, auxquelles il livre de cinq à 600 oiseaux par an. Interrogé sur l'évolution de la demande, il explique : « Il y a une quinzaine d'années, le gibier était lâché entre 20 et 30 % après les moissons. Sur les faisans il y avait 50 % de perte à cause des prédateurs (renards, fouines, rapaces...), donc des pertes financières importantes. Aujourd'hui, ils sont lâchés deux jours avant l'ouverture de la chasse, et le canard début juillet. La demande des sociétés est proportionnelle au nombre de chasseurs, en général une pièce de gibier par chasseur et par dimanche. Mais il y a de moins en moins de chasseurs, du fait que les jeunes ont tellement de possibilités de loisirs..., que les nouveaux habitants dans les villages se plaignent plus qu'avant de la chasse et surtout à cause de la raréfaction du gibier ». Quant aux aptitudes de chaque espèce, Didier est incollable :
« La perdrix rouge est plus adaptée à la petite montagne et les zones de plaine où l'on trouve de grandes parcelles de maïs. La grise est adaptée à la zone de plaine, son habitat naturel, et à la petite chasse en superficie. La rouge est beaucoup plus sauvage. Pour le canard, on a plusieurs souches : du « commun », du « croisé US » et de « l'obscur » (noir). En général, je vends une souche par société. Les communales prennent
95 % de « commun » et les sociétés privées
80 % d'US pour le sport, car il est plus petit, vole plus vite et plus loin. La demande en perdrix représente 50 % de celle en faisans ». Et de conclure : « le taux de récupération à la chasse est de 50 à 60 % pour le faisan et entre 20 et 30 % pour la perdrix car elle est plus petite, plus difficile à tirer et plus sauvage ».

Patricia Flochon