CLIMAT
La filière viticole propose une stratégie d’innovation

La filière viticole a présenté le 26 août au ministre de l’Agriculture sa stratégie d’adaptation face au changement climatique. Elle affirme un modèle français qui mise beaucoup sur l’innovation pour se développer dans les années à venir.

La filière viticole propose une stratégie d’innovation
Sept domaines d'action prioritaires ont été retenus par la filière viticole. ©Pixabay

La stratégie d’adaptation de la filière viticole au changement climatique, fruit de quatre années de consultations auprès de six cents personnes, a été présentée à Julien Denormandie, le 26 août. Elle a été remise en mains propres par Marie Guittard, Christian Paly et Éric Paul de l’Inao, Jérôme Despey et Christine Avelin de FranceAgriMer, Philippe Mauguin de l’Inrae et Bernard Angelras de l’IFV. Selon ce dernier, la filière a fait le choix d’un scénario basé sur l’innovation : « Nous ne voulons pas que, sous le nom de vin, on fasse n’importe quoi. Schématiquement, il n’est pas question de couper du vin avec de l’eau sous prétexte que les vins deviennent plus chargés en alcool. Nous allons défendre, et au besoin préciser quelles sont les spécifications analytiques et organoleptiques du vin à l’OIV ».

« Ni fuite, ni industrialisation »

« Le vin français a comme originalité d’être encadré par des caractéristiques précises et des délimitations de territoires. Nous croyons en l’innovation pour nous adapter, là où sont les vignes, et non pas à une fuite du vignoble vers d’autres territoires ou vers un modèle de standardisation industrielle », poursuit Bernard Angelras, Ce travail sera aussi présenté à l’OIV, l’Organisation internationale de la vigne et du vin et aux professionnels italiens et espagnols. Sept domaines d’action prioritaires ont été retenus : « amélioration de la connaissance des zones viticoles », « agir sur les conditions de production », « favoriser un matériel végétal adapté », « agir sur les pratiques œnologiques », « garantir la production », « recherche, développement, transfert, formation » et « contribuer à l’atténuation du changement climatique ». « La gestion des sols et l’innovation variétale constituent les principaux leviers de cette adaptation au changement climatique », indique Bernard Angelras.

Constituer des réserves foncières

Dans le domaine « amélioration de la connaissance des zones viticoles », le document appelle à « l’étude des évolutions foncières et l’aménagement de l’espace et la délimitation » des zones viticoles. Le texte poursuit : « L’accès au foncier doit être favorisé, avec le but de constituer des réserves foncières et de rendre opposables des cartographies pédoclimatiques établies dans les documents d’urbanisme ». Dans le domaine « favoriser un matériel végétal adapté », les signataires du document estiment que le choix du matériel végétal « est sans aucun doute le levier le plus puissant » pour adapter la vigne à une augmentation des températures et au stress hydrique, ainsi qu’à la production de raisins trop riches en sucre dus aux effets négatifs du changement climatique. Ils préconisent la mise en place de dispositifs d’aides afin d’accompagner financièrement la restructuration du vignoble. Bernard Angelras estime que la nouvelle orientation du Plan national d’aides (PNA) viticoles en 2023 peut être l’occasion de cibler des financements sur l’adaptation des cépages. Le PNA est l’enveloppe financée par l’UE (269 M€ par an pour la France), dont l’un des volets est la restructuration du vignoble.

La stratégie viticole et ses suites

La stratégie viticole d’adaptation au changement climatique est conçue pour être appliquée concrètement par les professionnels. Et cela de façon adaptée, localement, « car le dérèglement climatique n’est pas le même à Bordeaux qu’en Alsace ». « Le ministre de l’Agriculture souhaite que d’autres filières de l’agriculture s’inspirent de nos travaux », se félicite Bernard Angelras. Au-delà du caractère exemplaire de ces derniers, on peut déjà deviner des mesures que la filière entend préconiser. « Nous sommes en train d’écrire un référentiel bas carbone avec le ministère de la Transition écologique et solidaire », s’appuyant sur la séquestration du carbone dans les sols, notamment via l’enherbement et « la plantation massive de haies », illustre Bernard Angelras. « Nous avons également ouvert à l’Inao la possibilité de revoir dans le code rural l’interdiction d’irriguer certains cépages pour éviter qu’ils donnent des vins trop concentrés. Notre travail va aussi être pris en compte par le Varenne de l’eau sur différents sujets, comme l’assurance et la protection du foncier viticole ».

MN