CONTRACTUALISATION
Des négociations commerciales 2022 au goût d'inachevé

La date du 1er mars a sonné la fin des négociations commerciales sur les tarifs 2022 entre les industriels et les distributeurs. Seuls 80 % des contrats négociés entre les grands industriels et la distribution ont été signés.

Des négociations commerciales 2022 au goût d'inachevé
A la fin des négociations commerciales, le 1er mars, seuls 80 % des contrats entre les grands industriels et la distribution ont été signés. ©Pixabay

Clap de fin pour les négociations commerciales. Le 1er mars marquait la date butoir pour signer les contrats qui lieront les industriels et les distributeurs en 2022. Pour la première fois depuis huit ans, elles se « finissent en inflation », souligne le ministère de l’Agriculture, sans pouvoir donner une moyenne chiffrée des hausses consenties par la distribution. « Le coût de la matière première agricole a été préservé, voire au-delà », indique-t-il. La Fédération du commerce et de la distribution (FCD) estime auprès de l’AFP que les négociations ont abouti à une « hausse significative des prix, autour de 3 % ». Pas de quoi satisfaire les industriels qui évaluaient les hausses nécessaires pour couvrir l’inflation entre 6 et 7 %. « Il y a un écart de deux ou trois points » entre les hausses demandées et celles acceptées, a affirmé Jean-Philippe André, le président de l’Ania (industries alimentaires), à l’occasion d’une table ronde sur Egalim 2 organisée le jour de la clôture des négociations.

Pas de tolérance pour les retardataires

Ces négociations annuelles ont été marquées par de fortes tensions entre les parties prenantes en raison de l’inflation et du nouveau cadre législatif instauré par Egalim 2. Résultat : de nombreux contrats ont été signés à la dernière minute et le taux de signature reste particulièrement bas. Seuls 80 % des contrats entre les grands industriels et la distribution ont été signés. Le nombre de signatures est encore plus bas avec « une ou deux enseignes », précise le ministère, sans les nommer. Les PME ont, quant à elle, « pratiquement tout signé ». « Il n’y aura pas d’ultime négociation de complaisance pour les retardataires qui n’ont pas négocié de bonne foi en amont », a prévenu le médiateur des relations commerciales agricoles, Thierry Dahan, à l’occasion de la table ronde du 1er mars. « Nous terminerons les médiations en cours dans les dossiers très avancés et où il y a encore un point de blocage, sur la clause de révision automatique par exemple », insiste-t-il. Le médiateur a été saisi sur une soixantaine de dossiers conflictuels dont une vingtaine sont déjà clos. Pour les couples industriel-distributeur qui ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur un tarif, « on entre dans une zone de flou juridique, car il n’y a pratiquement pas de précédents. Dans certains cas, s’il n’y a pas d’accord, il y aura tout simplement une rupture de la relation commerciale », analyse le directeur général de l’Ilec (institut de liaison des entreprises de consommation), Richard Panquiault. Dans « 15 à 20 % des cas », ce sont les négociations autour de la clause de révision automatique des prix qui bloqueraient encore les signatures, estime-t-il. « Il y a déjà des ruptures », a indiqué le médiateur Thierry Dahan le 1er mars. « Les prix qui seront utilisés pendant la période de préavis de rupture de contrat ne seront pas les prix antérieurs, affirme-t-il. Il faut se mettre en conformité avec la loi, c’est-à-dire au minimum faire passer les hausses de matières premières agricoles, voire passer plus, pour équilibrer le contrat. »

Vers plus de transparence

Pour que les négociations soient plus fluides l’année prochaine, le médiateur émet la suggestion « de certifier les coûts de la matière première agricole avant d’arriver à la table des négociations de manière que les choses soient plus transparentes », sans pour autant modifier la loi. Cette année, les industriels ont en grande majorité fait le choix de recourir à un tiers de confiance qui est chargé de certifier, « au terme de la négociation », la part de la matière première agricole dans le tarif fournisseur. Or, le choix de cette troisième option de transparence a parfois freiné les négociations. Les entreprises ont pu être hésitantes à dévoiler la part de chacun de leurs coûts en vue des négociations sur les produits de marques distributeurs (MDD), qu’ils fournissent à ces mêmes enseignes, a analysé la présidente de la FNSEA Christiane Lambert, également invitée à la table ronde. « Les distributeurs sont arrivés dans les négociations avec la même intention : baisser, baisser, baisser », a-t-elle déclaré, exprimant la déception de l’amont agricole. « Il y a des comportements qui n’ont pas changé… »

J.G.