BILAN
Le tour des vignobles

A quelques semaines des vendanges, nous vous proposons un tour des vignobles de la région pour estimer la qualité et la quantité de ce millésime 2023. 

Le tour des vignobles

Vins de Savoie 

Le coup est dur à encaisser : l’Ain, l’Isère, la Savoie et la Haute-Savoie ont fortement été impactés par les épisodes de grêle survenus la semaine du 24 juillet. « C’est arrivé d’un coup : pas de vent, pas de pluie, seulement des grêlons de la taille d’une balle de golf ». Pour Gaëlle Dufour, technicienne viticole du syndicat des vins de Savoie, c’est un lourd impact qui vient mettre en jeu la pérennité de certaines entreprises. Certains vignerons ont vu la quasi-totalité de leur production réduite à néant. « Sans cela, l’année était plutôt bonne, en qualité et en qualité. Il y a eu un peu d’oïdium mais rien d’anormal, les maladies ont été endiguées grâce au soleil, au vent, et à la baisse de la pluviométrie sur le secteur. Mais la grêle a été dévastatrice », explique-t-elle. Gaëlle Dufour n’ose pas s’avancer sur la date des vendanges : « ça va être très compliqué ! La vigne a pris beaucoup de retard, la véraison a du mal à s’enclencher sur les cépages précoces. » La vendange des pinots, chardonnays et gamays est estimée fin août. Pour le gros du vignoble, il faudra attendre jusqu’à mi-septembre.

Jura 

Cette année, dans le Jura, « la récolte s’annonce plutôt bonne ». Rachel Outhier, technicienne viticole à la société de viticulture du Jura, est positive : « nous avons une bonne charge sur pied, ce qui explique également le ralentissement de la véraison. Mais si l’on va jusqu’au bout, on aura un beau résultat, à la fois sur la qualité et la quantité », affirme-t-elle. Malgré une véraison tardive en raison de la baisse des températures, et la présence d’oïdium sur feuilles, les vignerons ont bien tenu le rythme. « Ça a été une année fatigante pour eux, la cadence a été compliquée à cause des orages. Mais ils ont bien tenu, le vignoble est assez sain dans l’ensemble », assure-t-elle. Les premiers coups de sécateur devraient avoir lieu la dernière semaine d’août pour les crémants.

Beaujolais et Mâconnais 

« Cette année a été un vrai combat d’un point de vue sanitaire pour les vignerons ». Benjamin Alban, directeur du vinipôle Sud Bourgogne et chef du service vigne et vin à la chambre d’agriculture de Saône-et-Loire, résume cette campagne comme une année difficile, riche en aléas climatiques. D’après son expérience, cela faisait longtemps que le vignoble n’avait pas connu une pression en maladies aussi importante. Même si le chardonnay est habitué à l’oïdium, la pression en mildiou a été agressive dans le sud, en mâconnais. Malgré tout, c’est un beau millésime qui s’annonce. « Il n’y a pas une énorme charge sur pied, le potentiel qualitatif et quantitatif est très prometteur. Le mois d’août sera déterminant », affirme-t-il. Les vignerons espèrent donc un mois ensoleillé, avant de vendanger dès la première semaine de septembre 2023. Daniel Bulliat, président de l'Inter Beaujolais, espère que cette année sera meilleure que les précédentes : « en 2021, nous avons eu une faible récolte à cause du gel, et en 2022 à cause de la sécheresse ». Cette année s’annonce meilleure. Malgré les orages, l’ensemble du vignoble a bien tenu et les raisins ont gonflé de manière satisfaisante. « S’il pouvait encore pleuvoir entre 30 et 50 mm, ce serait parfait ». Car au-delà, c’est la qualité du millésime qui serait impactée : le mois d’août sera donc décisif, avant de démarrer les vendanges entre le 1er et le 5 septembre, 10 jours plus tard que l’année dernière.

Forez et Roannais 

« Nous avons une très belle sortie de raisin, une alternance entre pluie et soleil qui a bien fait pousser la vigne. Pour l’instant, c’est très joli », selon Stéphane Sérol, président des vignobles du Roannais. Même si les pluies ont accentué la pression en maladies, les vignerons ont été très présents et très vigilants. L’espoir se tourne vers le mois et demi restant, avant des vendanges fixées au 15 septembre. Mais pour le Forez, la campagne a été moins clémente. « Les épisodes de grêle, notamment dans le secteur de Boën-sur-Lignon, ont causé de 30 à 40 % de dégâts sur certaines parcelles », d’après Loïc Chaize, président de la cave coopérative des côtes du Forez. Par ailleurs, les maladies n’ont pas été virulentes cette année, une bonne qualité est à prévoir. Le vignoble se situant en altitude, la véraison commence tardivement, mais les vignerons s’attendent globalement à une bonne année, et commenceront à vendanger mi-septembre.

Drôme et Ardèche 

Pour Joël Durand, président de l’appellation saint-joseph, le nord de l’Ardèche a subi une année climatique difficile : « l’hiver a été sec, nous avons eu de grosses inquiétudes sur le manque d’eau jusqu’au mois de mai. Puis il y a eu des orages, de la grêle sur certains secteurs, donc il a été compliqué de s’adapter », explique-t-il. La situation est particulièrement compliquée pour les vignerons qui ont subi la grêle. En termes de précocité, les vendanges s’effectueront lors de la première semaine de septembre. Les maladies ont peu touché le vignoble cette année. Pour Joël Durand, « l’année est en demi-teinte ». Le président de la fédération des vignerons indépendants d’Ardèche et du comité des vins d’Auvergne-Rhône-Alpes, Ludovic Walbaum, tient un discours similaire : « nos vignobles sont étendus, nous avons une importante diversité de cépages et, de ce fait, l’hétérogénéité du vignoble est importante. Cette année, la pression sanitaire a été plus importante qu’habituellement, en raison du climat chaud et humide ». Les cépages plus sensibles, comme les grenaches ou encore les chardonnays, ont été davantage impactés par les maladies, notamment l’oïdium. Les vignerons espèrent donc un mois d’août sec et du mistral avant les vendanges, qui auront lieu entre le 10 et le 15 septembre. Pour Matthieu Rozel, président de l’appellation Grignan-les-Adhémar, « le mildiou a été important cette année, mais on s’en sort plutôt bien ». Cette année, les pertes s’élèvent entre 5 et 15 % sur l’ensemble de l’appellation, avant la véraison qui débute. Idem du côté de Nyons. Pierre Michel More, président du syndicat des vignerons du Nyonsais, estime que la récolte sera moyenne cette année : « le mildiou a été très virulent, les exploitations qui traitent peu ont été bien impactées ». Le début des vendanges aura lieu autour du 10 septembre.

Coteaux du Lyonnais 

Yann Fangeat, co-président de l’ODG fédération des vins des Côteaux du Lyonnais, est plutôt optimiste pour cette année. « On a une belle sortie de grappe, joli potentiel de départ, malgré la pression des maladies à cause des pluies qui ont causé des pertes jusqu’à 30 %, et ont touché les cépages différemment, mais surtout les chardonnays et gamays. Malgré cela, les sols ont été bien nourris. » Dans le nord de l’appellation, les parasites ont été moins présents en raison de moindres pluies. En revanche, la grêle du lundi 24 juillet a été destructrice pour plusieurs exploitations. Certaines ont été impactées jusqu’à 70 % dans leur rendement. Malgré ces aléas, l’ensemble du vignoble est plutôt sain, le soleil promet une jolie qualité de grain. Les vendanges sont prévues la première semaine de septembre pour les blancs, et une dizaine de jours plus tard les rouges.

Vins du Bugey 

D’après Jean-Luc Guillon, président des vins du Bugey, le mildiou reste le fait marquant de 2023. Mais la véraison commence, alors le mildiou s’éloigne de plus en plus. Le chardonnay, cépage plus sensible, a été victime de l’oïdium. Dans l’ensemble, d’après lui, « l’année est plutôt moyenne, en termes de quantité et de qualité, même s’il est encore un peu tôt pour le savoir ». Pour le mois d’août, les conditions optimales se résumeraient à quelques pluies, et bien sûr, pas de grêle. Cette dernière a notamment impacté l’appellation cerdon il y a quelques semaines. Les vendanges débuteront en septembre, dans la première quinzaine du mois.

Côtes du Rhône

Après un hiver historiquement sec, le printemps a été assez pluvieux. Il y a eu des épisodes de pluies intenses en mai, de la grêle, des températures en baisse : « une pluviométrie qui a nourri la vigne, mais a également contribué à la pression élevée en maladies. La véraison a bien démarré sur la plupart des parcelles, mais les pluies ont engendré l’apparition de mildiou et de black-rot », affirme Marjorie Preux, responsable du pôle presse à Inter Rhône. Malgré cette pression, les vignerons ont su faire le nécessaire dans l’ensemble, et restent vigilants.

Vins du Diois 

« L’année a été plutôt complexe, notamment en raison de la pression cryptogamique très importante. » D’après Nicolas Fermond, conseiller viticole à la cave de Die-Jaillance, l’année ne sera pas pléthorique mais les viticulteurs ont bien travaillé, la récolte sera satisfaisante. Cette année, les conditions météorologiques ont été complexes. Le mildiou s’est donc développé en quantité depuis mi-mai : certaines exploitations ont vu leur protection échouer malgré leurs efforts. La grêle a également touché une partie du vignoble, un fort impact pour certains viticulteurs qui ont perdu jusqu’à 50 % de leur rendement. Mais les cas restent minoritaires dans l’ensemble de l’appellation. « On espère que le mois d’août sera clément, avec du beau et du sec ». Sur le plan hydrique, les pluies survenues depuis mai ont suffi pour la saison. En conclusion, malgré la pression sanitaire et les pertes dues à l’épisode de grêle mi-juillet, l’état des lieux reste plutôt satisfaisant : l’expert viticole estime que les vendanges auront lieu fin août, un retard de deux semaines par rapport à l’année dernière.

Charlotte Bayon