LA PRÉFÈTE SUR LE TERRAIN
Dans la Plaine de l’Ain il y a eu des vagues

Un petit comité d’accueil composé d’agriculteurs irrigants attendaient Cécile Bigot-Dekeyzer sur l’exploitation de Jérôme Martin. Ils ont exprimé leur incompréhension et leur colère face à l’arrêté interdisant l’irrigation de 9 h à 21 h qui touche pour la première fois le secteur du Val de Saône. 

Dans la Plaine de l’Ain il y a eu des vagues
L'arrêté interdisant le prélèvement d'eau dans les eaux souterraines de 9 h à 21 h a fait débat. Photo/Yolande Carron

Même si les sujets débattus ce jour-là sont régulièrement abordés entre les responsables professionnels et les représentants départementaux de l’État, il était important que la Préfète entende directement les revendications du terrain et qu’elle puisse leur apporter de vive voix des explications sur certains points. Ce fût le cas pour les agriculteurs de la Plaine de l’Ain, pénalisés comme un bon nombre sur le Sud du département, par un arrêté leur interdisant tous prélèvements dans les eaux souterraines de 9 h à 21 h. Il s’agit principalement des eaux souterraines qui constituent les nappes de la Plaine de l’Ain, de Dombes-Certines-Nord, de Dombes-Sud et du Pays de Gex, aussi durant la journée ils n’ont pas le droit d’irriguer. Un arrêté qui concerne pour la première fois des maraîchers du secteur du Val de Saône, en mal de compréhension face à des restrictions qui s’appliquent à eux mais pas aux horticulteurs. Geoffroy Cormorèche, agriculteur à Miribel, bien connu pour sa culture de betteraves rouges s’est exprimé le premier : « nous sommes contents que vous fassiez le déplacement car nous sommes très inquiets sur l’irrigation dans le secteur Sud-Dombes. Cet arrêté, en vigueur depuis début avril nous interdit d’irriguer de 9 h du matin à 21 h le soir alors que nous avons toujours fait des efforts sur les qualités d’irrigation et les heures, nous ne comprenons pas, nous avons peur pour la suite. Pour nous céréaliers, qui dit pas d’irrigation dit pas de cultures. Pour l’instant nous bénéficions d’une pluviométrie qui permet d’irriguer mais qui d’ici quelques mois ce ne sera plus le cas. Pourriez-vous nous dire quelle part représente l’agriculture dans le pompage ? » Un constat appuyé par Pierre Olivier Varay, maraîcher aussi à Miribel, pour lequel l’irrigation de ses salades dès leur repiquage ne peut attendre la nuit sous peine de les voir faner  : « j’ai réalisé cinq forages, j’ai les relevés, cela fait cinq ans que rien n’a bougé, je fournis toute la ville de Lyon en bio et du local, mes salades si elles sont fanées au moment de la livraison, personne n’en veut. » Grogne d’un agriculteur qui a fait observer que la limitation horaire ne s’appliquait pas aux horticulteurs, « mais nous lorsqu’on plante une salade faut pouvoir arroser direct. Si nous devons nous lever la nuit pour arroser ce n’est pas possible. » L’arrêté menace toute une filière composée de grosses structures avec du personnel jusqu'à 200 salariés sur 600 ha de surface.
 
Revoir les horaires
 
Très calmement la Préfète a apporté des précisions : « Si l’État décide de telles mesures, ce n’est pas pour embêter le monde, c’est justifié par la situation, il fait beau toujours beau, les niveaux d’eau traduisent des situations de crise. Les décisions sont prises en concertation, jamais en catimini, on ne vous interdit pas d’arroser mais on limite, vous devrez le faire uniquement la nuit. » Elle a aussi précisé que des études étaient engagées par les Communautés de communes et le Département pour déterminer les usages de l’eau et pour mieux connaître la nappe phréatique des Cailloutis. Guillaume Furry, directeur de la DDT, pour sa part, avait détaillé : « le département a été décrété en alerte renforcée donc on réduit de moitié. » Henri Cormorèche, maire de Mionnay, aurait aimé qu’on lui explique, « pourquoi Mionnay ne peut pas arroser la journée alors qu’à Cailloux-sur-Fontaines on peut ? » La question n’a pas eu de réponse. Madame la Préfète a mis un terme à la discussion avec un petit recadrage et en n’excluant pas de revoir la copie : « il y a eu des discussions avec un comité départemental de l’eau regroupant plusieurs organisations et aucune préférence des services de l’État n’a été émise pour privilégier certaines professions notre priorité c’est la réserve en eau. Évidemment que vous avez des contrats à honorer, mais le sujet c’est de partager entre les usagers on va regarder ce qui est possible de faire avec les services de la DDT. » 
 
Yolande Carron