BILAN
Des moissons perturbées par la pluie dans toute la région

Si les véritables résultats des moissons ne seront connus que dans les prochaines semaines, les premières tendances se dégagent. Avec une constante : la pluviométrie exceptionnelle du mois de juillet a largement perturbé cette campagne 2021.

Des moissons perturbées par la pluie dans toute la région
La pluie est venue perturber les récoltes de céréales et gâcher une campagne qui s'annonçait prometteuse. ©Pixabay

Pour Thibaut Ray d’Arvalis-Institut du végétal, il restait encore au début du mois d’août environ 15 % de surfaces agricoles non moissonnées dans notre région. « L’arrivée de l’eau s’est révélée très pénalisante et a engendré en moyenne trois semaines de retard. Si les rendements sont généralement assez bons, la pluie a eu une influence importante sur la qualité du grain », explique-t-il. Dans notre région, la Loire fait partie des départements les plus impactés par la pluie. D’après Adrien Saint-Ellier, responsable d’activité au sein du groupe coopératif Eurea, « 60 % des travaux n’avaient pas encore pu être effectués au 1er août ». Et de poursuivre : « Les rendements sont là mais la qualité sera cette année moindre que les précédentes, excepté pour l’orge. Pour le blé tendre, on constate des poids spécifiques assez faibles, en dessous des 76 kg/hl qui est la norme pour commercialiser le blé comme du blé meunier », tient-il à faire remarquer.

Jusqu’à 100 % de blés déclassés en Savoie

Quelques kilomètres à l’Est, dans le Rhône, Gilbert Bouricand, céréalier à Quincieux et responsable de la section grandes cultures de la FDSEA, indique que sur son secteur, les agriculteurs ont dû attendre le 10 juillet pour démarrer les récoltes. « Il a parfois fallu patienter un peu plus car les grains étaient trop humides et d’importantes précipitations sont tombées les jours qui ont suivi », raconte-t-il. Le rendement est correct sur le secteur avec 50 à 100 q/ha pour le blé ou encore 50 à 80 q/ha pour l’orge. Mais l’hétérogénéité se révèle importante entre les parcelles et beaucoup d’entre elles sont touchées par une germination des grains sur les plantes qui est causée par le fort niveau de pluviométrie des dernières semaines. Dans l’Ain, Jérôme Martin de la FDSEA estime que grâce à une moisson qui a pu être effectuée avant les fortes pluies « l’orge est la seule culture qui s’en est sortie ». Pour les autres céréales, le niveau de qualité espéré s’est vite dégradé aux alentours de la mi-juillet. « Nous attendons encore les résultats définitifs mais pour le blé et le colza, c’est une année moyenne voire médiocre avec de nombreux déclassements liés à des germinations. Les variations de températures ont également favorisé l’apparition de champignons », détaille-t-il. Du côté des deux Savoie, Jérôme Donzel de la FDSEA estime que les rendements du blé tourneront autour des 50 à 80 q/ha ce qui se révèle plutôt satisfaisant. Mais comme ailleurs, la pluie est venue largement perturber le travail des producteurs. « Les premiers n’ont pu battre qu’à partir du 20 juillet. À titre personnel, j’ai dû attendre le 25 juillet et pour la première fois depuis 2014, l’ensemble de mes blés ont été déclassés en blé de nutrition animale », raconte-t-il.

Une qualité très moyenne dans le Sud de la région

En Isère, les premiers retours de terrain qui parviennent à la chambre d’agriculture se révèlent satisfaisants concernant les rendements : de 60 à 75 q/ha pour l’orge et de 40 à plus de 90 q/ha pour le blé par exemple. « Le problème, c’est que pour l’orge, le poids spécifique tourne autour de 61 à 62 kg/hl alors que la norme est de 64 et pour le blé, on est en moyenne à 74 kg/hl soit deux points en dessous de la norme », explique Yann Janin. Avec une même explication : la pluie. « On estime que 20 mm de pluie font baisser le poids spécifique de 1 point avec pour conséquence directe de réduire le potentiel de panification des blés qui sont déclassés ». Dans la Drôme, le constat est sensiblement le même du côté de l’entreprise Valence Céréales : « beaucoup de pluie, des rendements satisfaisants en blé, orge et colza mais une qualité qui a globalement été altérée ». Chez les voisins ardéchois, « la pluie en continu a obligé les travaux à se poursuivre jusqu’à fin juillet pour les blés et les orges et un peu plus encore pour les colzas », témoigne Jérôme Sarrazin, responsable grandes cultures à la FDSEA. Et de détailler les premiers bilans : « Au niveau des orges, c’est plutôt bon, autour des 50 q/ha. Mais pour le blé, le bilan n’est clairement pas terrible avec environ 40 q ha en blé dur et 45 q/ha en blé tendre. Et on tourne autour des 30 q/ha pour les colzas ». Côté auvergnat, le travail se poursuit encore en raison de pluies persistantes. « Nous espérons qu’il va faire beau pour que nous puissions enchaîner plusieurs jours de travail et terminer. Dans l’Allier par exemple, il reste encore 30 % de surfaces à récolter, pour le Puy-de-Dôme c’est un peu moins, environ 15 % », estime Nicolas Perret, président de la section grandes cultures à la FRSEA Auvergne-Rhône-Alpes basé dans l’Allier. « Les rendements devraient être corrects mais on sait que la qualité sera plutôt moyenne à cause de la pluie », regrette-t-il.

Les régions voisines également impactées par la pluie

Loin d’être la seule région à être touchée par une pluviométrie excessive, la situation en Bourgogne-Franche-Comté est similaire. En Saône-et-Loire par exemple, si les données ne sont que partielles, la fin du mois de juin et surtout le mois de juillet sont venus doucher les espoirs de nombreux producteurs. « La fenêtre de tir a été très limitée cette année, normalement il faut dix à quinze jours pour tout moissonner. Cette année, nous n’avons eu que quatre à cinq jours pour tout réaliser et ensuite nous avons eu du mal à avoir deux jours consécutifs de beau temps », explique-t-on à la minoterie Gay. En Bourgogne du Sud, le rendement se révèle satisfaisant pour l’orge d’hiver, entre 75 à 80 q/ha en moyenne, soit en légère hausse par rapport à 2020 quand le colza se tient à 35 q/ha de moyenne. Le blé a lui énormément souffert et à la baisse de qualité s’ajoutent des pertes estimées à 10 q/ha. Active dans les départements du Jura, de la Haute-Saône et du Territoire de Belfort, la coopérative Interval juge quant à elle cette campagne 2021 comme « une vraie déception ». Annoncée prometteuse il y a tout juste un mois, elle se conclut par des rendements moyens quelque peu décevants autour de 60 q/ha pour l’orge, 28 q/ha pour le colza et de 65 q/ha pour le blé auxquels se conjugue une perte de qualité causée par la pluie.

Pierre Garcia