ÉNERGIE
Mieux comprendre l’agrivoltaïsme avec l’Ademe

L’agrivoltaïsme est un levier clé du mix électrique à horizon 2030, à condition de s’engager sur des projets vertueux, c’est-à-dire qui n’entrent pas en concurrence avec l’activité agricole. L’Ademe a récemment publié les résultats d’une étude à ce sujet. 

Mieux comprendre l’agrivoltaïsme avec l’Ademe
Photo/Réussir

Déjà dynamique sur les toitures des bâtiments agricoles et sur les surfaces dégradées ou artificialisées, le déploiement d’installations photovoltaïques sur terrain agricole pourrait contribuer à l’atteinte des objectifs fixés dans la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Pour autant, un développement sur les sols agricoles pose un double enjeu de recherche d’espace et de préservation des terres agricoles. Il est ainsi important de veiller à la préservation de la qualité des sols et de prendre en compte les impacts sur les activités agricoles, qu’il s’agisse des interactions directes entre ces deux productions (alimentaires et énergétiques) mais également des conséquences potentielles économiques, sociales, territoriales et environnementales d’une telle association. Plusieurs types de projets peuvent respecter ces différents critères, et leur déploiement pourrait contribuer à rattraper le retard de la France dans ses objectifs de développement des énergies renouvelables. Parmi ceux-ci, l’agrivoltaïsme se distingue par le(s) service(s) apporté(s) en réponse à une problématique agricole et par la synergie qu’il présente entre production agricole principale et production photovoltaïque secondaire. Toutefois, d’autres projets, dits « de couplage d’intérêt potentiel pour l’agriculture », ont été identifiés et démontrent un équilibre entre les deux activités, en permettant notamment l’accès à du matériel technique pour l’exploitation.
Vingt-trois systèmes photovoltaïques identifiés en agriculture 
Après deux années de travail, on observe que les résultats obtenus sur les rendements agricoles en sous-face des structures photovoltaïques dépendent des conditions climatiques des projets, des espèces et des variétés cultivées (dont les besoins en ensoleillement et en eau sont variables) et qu’il existe également un très grand nombre de structures différentes (centrales au sol, ombrières dynamiques, fixes, serres, trackers, etc.). Au total, 23 systèmes ont été identifiés, dont quatre sont liés à des centrales au sol, onze à des combrières fixes ou mobiles, trois à des serres, trois à des toitures, un à des modules verticaux et un à des modules sur matériel agricole. Même si la technologie de production d’énergie est aboutie pour certain, ce n’est pas pour autant qu’ils doivent être développés en zone agricole, selon l’Ademe. Aujourd’hui 15 systèmes sont opérationnels, cinq en expérimentation et trois en projet. 

En complétant ces données d’une enquête auprès d’exploitants agricoles disposant de ce type de structures photovoltaïques, des fiches techniques récapitulatives inédites pour une dizaine de systèmes ont été constituées : elles permettent de présenter aux parties prenantes les principaux impacts observés sur l’agriculture, les incidences sur les résultats économiques des exploitations, un bilan des forces et faiblesses et les pratiques jugées d’intérêt ou à limiter, pour chaque système étudié.

Une méthode simple pour les qualifier

« Une classification simple des projets par type de système photovoltaïque et/ou par culture n’est pas envisageable en l’état actuel des connaissances », précise l’étude. Celle-ci émet la proposition d’un travail de qualification des projets et d’un arbre décisionnel (dénommé « gradient de classification »), constituant un outil d’analyse et d’identification des projets les plus vertueux. Trois critères de qualification ont été identifiés et étudiés, dans l’ordre d’importance suivant :
1.     Les services apportés à la production agricole ;
2.     L’incidence sur la production agricole ;
3.     L’incidence sur les revenus de l’exploitation agricole.
En résumé sur quinze cas, seulement trois pourraient en fait être qualifiés d’agrivoltaïsme. Ils devraient en premier lieu améliorer soit le bien-être et l’alimentation animale ou pour les végétaux leur croissance. Si le critère un est satisfait, il faudra démontrer que la production est maintenue voire améliorée. Si les deux critères précédents sont satisfaits, il est attendu que les revenus agricoles (production agricole) soient maintenus et que le revenu global de l’exploitant soit amélioré. Comme pour tout projet photovoltaïque au sol, il faudra s’interroger aussi sur la solidité ou les points de fragilité de ce dernier et s’il impacte l’activité agricole locale et/ou des filières. En d’autres termes, il conviendra d’être attentif à la vocation et à la pérennité agricole du projet, à la réversibilité et au démantèlement du système, à l’adéquation territoriale, aux impacts environnementaux et paysagers, à l’adaptabilité du système et à sa flexibilité technique.


Compte tenu du nombre de paramètres à prendre en compte et de la diversité des contextes pédoclimatiques [ensemble des conditions climatiques auquel sont soumis un sol et la culture], une analyse au cas par cas des projets se révèle indispensable pour pouvoir les évaluer et les positionner dans le gradient de classification proposé.


Jean-Daniel Ferrier, chargé de mission photovoltaïque à la Chambre d’agriculture de l’Ain, avec étude de l’Ademe, avril 2022

Glossaire

Sur la base des travaux de l’Ademe, il a ainsi été possible d’identifier les couplages les plus vertueux pour l’agriculture :
Les projets agrivoltaïques : une définition plus précise de l’agrivoltaïsme a ainsi été proposée : elle repose sur la notion de « synergie entre production agricole et production photovoltaïque sur un même espace d’une parcelle. L’installation photovoltaïque doit ainsi apporter un service en réponse à une problématique agricole ». À titre d’exemple, un système agrivoltaïque peut consister à installer des modules photovoltaïques (mobiles ou pas) au-dessus d’une production végétale pour la protéger d’un ensoleillement excessif, pour limiter les stress hydriques par un effet d’ombrage ou pour réduire les risques liés aux conditions climatiques (grêle, gel…). Ainsi, tout en produisant de l’énergie, ce type de dispositif peut, dans certaines configurations, apporter un service bénéfique à la production agricole en place.  
Les couplages d’intérêt potentiel pour l’agriculture : ces projets se traduisent notamment par un accès à du matériel technique nécessaire à l’exploitation (serre, grange, etc.), sans dégrader les revenus de l’exploitation. Sans être synergiques au même titre que les projets agrivoltaïques, ces projets permettent néanmoins un équilibre appréciable entre production énergétique et production agricole et offrent ainsi de nouvelles opportunités pour les exploitations agricoles.