TRANSPORTS
Le fluvial, un atout fort pour Terre d’Alliances

Plus fiable que le train, plus économique que le transport par camions, écologique, rapide et efficace, le transport fluvial est l’une des cartes maîtresses de la coopérative Terre d’Alliances pour ses céréales et importations d’engrais. Décryptage.
Le fluvial, un atout fort pour Terre d’Alliances

Chez Terre d'Alliances, l'utilisation du trafic fluvial se fait à deux niveaux : pour les achats d'engrais importés depuis l'Europe de l'Est et l'Egypte principalement, ainsi que les expéditions de céréales. Concernant ces dernières le groupe livre les Moulins Soufflet à Le Tor dans le Vaucluse et l'amidonnier Cargill en Espagne. Le silo portuaire de Fos-sur-Mer, propriété depuis dix ans de l'union de commercialisation Cérévia, totalise une capacité de stockage de 60 000 t (engrais et céréales). « L'avantage du fluvial est de pouvoir charger de gros bateaux, jusqu'à 30 000 t. C'est la rapidité aussi : 1 000 t chargées par heure. Le trafic fluvial est très dépendant de notre compétitivité sur le marché mondial. Avec une concurrence de plus en plus forte de la Russie, l'Ukraine, la Roumanie... où les systèmes sont beaucoup plus extensifs et avec des niveaux différents de rémunération », explique Jérôme Laborde, directeur du pôle végétal de la coopérative Terre d'Alliances.
Quant aux volumes acheminés, il précise : « Une année normale, on peut espérer faire partir un tiers des blés par bateaux ; uniquement les blés meuniers. Le reste sera transporté en train ou par camions. En maïs, depuis deux ans, ce sont moins de 5 % qui partent sur la méditerranée, en général en Italie du Sud et en Sardaigne. Il faut ajouter à cela environ 5 % envoyés sur le Nord de l'Europe ». Les céréales sont transportées en camions jusqu'au silo portuaire sur le Rhin à Ottmarsheim, ou encore à quelques kilomètres de là, à Huningue.

Plus de la moitié des engrais transportés par bateau

Pour ce qui est des engrais, près de 25 000 t transitent par bateau par an (sur un total de 40 000 t achetées par Terre d'Alliances) ; dont 15 000 t en provenance d'Afrique du Nord (urées, phosphates, phosphore). Dix mille tonnes arrivent par le Rhin, des pays de l'Est, Allemagne... : des produits « plus techniques », comme des engrais complets, oligo-éléments, etc. « Ces derniers sont transportés sur des bateaux plus petits, de 230 t, appelés Freycinets. L'intérêt du fluvial est d'avoir un coût moindre ; si l'on n'a pas de rupture de charge, on gagne de 6 à 8 € la tonne », ajoute Jérôme Laborde. Ces 25 000 t d'engrais sont déchargées à Villefranche-sur-Saône sur le site de l'entreprise Rhône-Saône Engrais, usine de stockage et de conditionnement dont Terre d'Alliances est le principal actionnaire. Le reste du volume des engrais, également conditionné à Villefranche arrive en train ou en camion.

 

Le site de Mâcon.

Atouts, inconvénients et enjeux du fluvial

Interrogé sur les avantages pour la coopérative à utiliser le transport fluvial, Jérôme Laborde résume : « C'est un mode de transport écologique, de gros volumes peuvent être chargés rapidement et avec efficacité car il faut seulement deux personnes pour charger un bateau. Sur le plan économique, le fret est 30 % moins cher que le transport en camion. Plus la distance est grande et plus c'est rentable. Charger de Mâcon à Fos-sur-Mer coûte environ 8 € la tonne et traverser l'Atlantique ne coûte pas beaucoup plus cher... ». Les inconvénients ? : « On reste très dépendant du marché et des disponibilités des bateaux. Autre problème, il y a de moins en moins de mariniers sur le Rhône et la Saône, car c'est plus rentable pour eux de remonter la Seine. Nous sommes également dépendants de la météo lorsqu'il y a des crues, mais aussi en cas de basses eaux. Par exemple, l'été dernier, c'était très compliqué sur le marché du Rhin, avec une période où les bateaux chargeaient à la moitié de leur capacité et là, ça n'est plus rentable ». Interrogé sur la question, Christophe Lafaye de la société ACN, spécialiste du transport fluvial et de la logistique sur le bassin Rhône-Saône, témoigne : « Cela devient de plus en plus compliqué car il y a de moins en moins de bateaux sur le bassin. Les frets n'ont pas évolué depuis 25 ans et les bateaux ne peuvent pas grossir car sinon on ne peut plus passer les écluses. Nous avons évacué 50 % de la flotte sur le Rhin et la Mozelle en un an et demi, soit pratiquement 13 000 t de notre capacité ».
Mais globalement, le trafic fluvial est indéniablement plus fiable que le ferroviaire. Quant aux enjeux pour l'avenir, Jérôme Laborde explique : « Le colza est de plus en plus envoyé par transport fluvial, vendu quasiment exclusivement par ce biais, sauf les volumes triturés en interne dans notre usine. Notre premier client est basé à Sète. Pour le blé, les clients sur le marché mondial sont de plus en plus exigeants sur la qualité, avec pratiquement les mêmes exigences aujourd'hui que la meunerie française. Le volume global de céréales du groupe transporté par bateau atteint en moyenne 50 000 t durant une année basse et peut aller jusqu'à 160 000 t en année haute ».

Patricia Flochon

La ligne ferroviaire de Peyrieu au point mort !

Aucun espoir pour l’heure de voir remis en service le segment Peyrieu – Virieu situé sur la ligne Pressins/Virieu, utilisé jusqu’alors par la coopérative Terre d’Alliances. Pour rappel, cette ligne, d’une longueur de 22 km avait été fermée pendant quatre ans. En 2013, des travaux ont dû être effectués, nécessitant un investissement de
6,5 M€ dont 1,5 M€ injectés par Terre d’Alliances elle-même. Un investissement à la hauteur du taux de mécontentement qui touche la coopérative aujourd’hui. Son président, Thierry Josserand revient sur ce dossier en détails : « En janvier 2014, SNCF Réseau nous annonçait que 100 000 t de céréales pouvaient emprunter la ligne par an pendant quinze ans sans autres frais que les frais de maintenance, soit environ 300 000 € par an. Fin novembre 2017, on nous informe que suite à des incidents techniques sur la ligne, celle-ci est désormais considérée comme dangereuse. Les trains de dégagement de céréales se prévoient quasiment un an à l’avance. Trente-huit trains, entre décembre et juin, n’ont pas pu être acheminés. Ça nous coûte une fortune ! Un investissement immédiat de 600 000 € et de plus de 6 M€ à plus long terme était demandé. Nous avons refusé. Les collectivités, conseil régional et départemental, ont répondu la même chose ». Un projet de carrière à proximité de la ligne de Peyrieu rebat les cartes, mais avec de bien piètres espoirs pour trouver des financements supplémentaires, d’autant plus que la confiance a été fortement mise à mal.