TRANSITION
Biocarburants : L’agriculture au secours de la décarbonation

La Collective du bioéthanol a présenté son nouveau carburant 100 % renouvelable, issu de produits agricoles. Il pourrait bientôt faire son apparition à la pompe et trouver quelques applications dans les machines agricoles.

Biocarburants : L’agriculture au secours de la décarbonation
L'E85 est actuellement le carburant le moins cher (90 centimes le litre en moyenne). ©Actuagri_CS

L’Union européenne a décidé en octobre 2022 de réduire à zéro les émissions de CO2 des voitures neuves en Europe à partir de 2035. Autrement dit, les constructeurs automobiles ne pourront plus, à partir de cette date vendre de véhicules légers (et utilitaires) neufs à essence et diesel ainsi que des véhicules hybrides. Ils devront se convertir au tout électrique. Cependant, Bioéthanol France estime que cette transition ne s’effectuera pas complètement. Tout d’abord parce que les véhicules thermiques produits avant 2035 pourront encore rouler et ensuite parce que « nous estimons que le 100 % électrique n’est pas optimum et que le parc électrique ne couvrira que 80 % des nouveaux besoins », a indiqué Sylvain Demoures, secrétaire général de Collective du bioéthanol. Ce dernier compte sur un assouplissement de la réglementation qui permette d’utiliser de l’éthanol et les carburants de synthèse au titre de carburants neutres en carbone. Elle propose donc un carburant E85 issu à 100 % d’énergies renouvelables. L'E85 est actuellement le carburant le moins cher (90 centimes le litre en moyenne). Il est composé de biomasses en grande majorité, les 15 % actuellement issu d’énergie fossile sont remplacés par autant de carburant renouvelable issu de biomasse : huiles de cuisson, drèches agricoles (pulpes de betteraves, de tournesol, etc.), dérivés d’éthanol… Pas moins de 700 000 tonnes de drèches ont été produites en France en 2023, selon Bioéthanol France.

Réduction des émissions de CO2

Des études menées par l’Institut français du pétrole et des énergies nouvelles (IFPEN), s’appuyant sur la méthode de l’analyse du cycle de vie (ACV) rapportent que les véhicules hydrides de moyenne gamme utilisant du E85 ne rejetaient, en 2022, que 13 tonnes CO2eq pour un parcours annuel de 150 000 km contre 16,6 t CO2eq pour le tout électrique. A l’horizon 2040, ces émissions provenant des mêmes véhicules hybrides roulant au E85-100%, tomberaient à seulement 7 t CO2eq contre 10 t CO2eq pour le tout électrique.  L’avantage de ce nouveau carburant est « de réduire de 70 % les émissions de CO2 par rapport à l'essence, et de 90 % à 98 %, les émissions d'oxyde d'azote et de particules en empreinte globale, c'est-à-dire, y compris la production du carburant et sa consommation », a précisé Nicolas Kurtsoglou, chef de projet à Bioéthanol France. Déjà en service aux États-Unis, notamment en Californie où il représente un tiers de volumes d’E85 vendus, ce carburant pourrait avoir des applications agricoles, « notamment sur des enjambeurs de vignes et d’autres petits matériels », a-t-il indiqué. Des essais sont en cours chez quelques constructeurs qui fournissent aussi d’autres secteurs d’activité comme le BTP. Le E85 100 % renouvelable pourrait être déployé en France avant 2035. La production estimée est de 18 millions d'hectolitres, soit « 1 % de la surface agricole utile nette des coproduits », a conclu Sylvain Demoures.

 

Christophe Soulard