PROJET COLLECTIF
Une fruitière à comté en Valromey en 2020

Le syndicat des éleveurs laitiers du Valromey organisait le 11 mai une conférence de presse à Champagne-en-Valromey, pour lancer la création de sa fruitière à comté. Celle-ci devrait voir le jour en 2020.
Une fruitière à comté en Valromey en 2020

« Le Valromey est un territoire à comté. C'était une erreur d'avoir fait disparaitre les fruitières à comté dans cette vallée. Aujourd'hui, nous réparons cette erreur. » Le message de Jérôme Berthier est clair ; il lançait, le 11 mai dernier, le « top départ » du projet de création en Valromey une coopérative pour fabriquer du comté à horizon 2020. Il y a un an, le président du syndicat des éleveurs laitiers du Valromey adressait une lettre au comité interprofessionnel de gestion du comté (CIGC), pour demander à être accueilli au sein de la filière. Fin juillet 2017, une rencontre à Poligny (Jura), siège du CIGC, faisait naître le projet. Aujourd'hui, quatorze exploitations et 28 agriculteurs s'apprêtent, d'ici la fin de l'année, à créer une nouvelle coopérative à comté et à acheter le terrain sur lequel sera implanté d'ici 2 ans leur nouvel atelier de fabrication. Cinq sites sont actuellement à l'étude.

La première ambition des éleveurs réunis autour de Jérôme Berthier, Jérémie Bolon, le trésorier du syndicat et Victoire Vuaillat, sa secrétaire, est de reprendre en main la transformation de leur lait afin d'en conserver la valeur ajoutée. « La genèse du projet remonte en fait à 2016, lorsque la coopérative Agrial a racheté la Fromagerie Guilloteau, imposant aux éleveurs un seul prix du lait, aligné sur les élevages de l'Ouest, et qui ne tenait pas compte d'un coût de production plus élevé pour notre région de montagne », explique Jérôme Berthier. La démarche a aussi pour but de répondre à un nouvel enjeu de société, porté par les valeurs du comté : un fromage au cahier des charges exigeant, une filière qualitative et durable. Enfin, (re)créer une fruitière à comté est aussi « un projet local, de territoire », qui associe « les habitants du Valromey, ses acteurs économiques et touristiques », défend le trio.

Jérémie Bolon, Jérôme Berthier et Victoire Vuaillat sont les chevilles ouvrières du projet.

300 tonnes de comté

Les quatorze producteurs, prêts à intégrer la filière, produisent aujourd'hui 5,6 Ml de lait, dont 800 000 l de lait bio. L'évolution des règles de régulation de l'offre (RRO) du cahier des charges comté, votées lors de l'assemblée générale du CIGC en décembre 2017, a permis de fixer pour une période de trois ans, une augmentation des droits à produire de 1320 t de comté / an, dont 100 t pour un nouvel atelier. La nouvelle fruitière du Valromey devrait donc pouvoir produire dans trois ans 300 t de comté, soit la valorisation de la moitié de la production laitière de ses adhérents. « L'un des enjeux du projet sera de valoriser la moitié restante de notre production dans un autre fromage, sur lequel nous travaillons en partenariat avec des affineurs », complète le président du syndicat.
Le projet devrait nécessiter, au global, entre 4 et 4,5 M€ d'investissements. L'objectif pour les producteurs est d'obtenir un prix minimum de 450 € / 1000 l pour permettre aux exploitations engagées d'atteindre une marge nette d'autofinancement positive. Pour l'heure, 160 000 € ont été nécessaires pour réaliser les différentes études, de faisabilité technique et économique au sein de chacune des exploitations et de faisabilité économique pour la création de la fruitière en elle-même. Cette première étape a été financée à 80 % par des fonds européens (Leader), portés par la communauté de communes Bugey Sud. Restent 20 % en auto-financement, avec le soutien de différents partenaires aux côtés des éleveurs eux-mêmes : Région, Département, centre fédéral de la coopération agricole, confédération générale de l'agriculture, chambre d'agriculture de l'Ain, organisations d'élevage de Céyzériat (OEC), coopérative Terre d'Alliances, Crédit Agricole Centre-est et Groupama Rhône-Alpes Auvergne.
Le projet entre dans une deuxième phase, avec des études approfondies : formation collective au séchage en grange, mise en œuvre des projets individuels, d'une part ; modèle économique, organisation, gouvernance et management de la coopérative, partenariats et relations contractuelles avec les opérateurs de l'aval, affineurs..., d'autre part. Plusieurs opérateurs, dont le cabinet Triesse, les OEC et la chambre d'agriculture, sont ici sollicités. Une autre étude pour la création d'un point de vente collectif est également prévue. Les représentants des éleveurs restent toutefois vigilants : « l'investissement sera raisonné car il impactera le prix du lait », préviennent-ils.

Sébastien Duperay

 

En bref

Un territoire à comté

Historiquement, de nombreuses fruitières à comté, emmental et gruyère étaient implantées dans le Valromey. Plusieurs étaient recensées par commune. Dans les années 60, l’agrandissement des structures n’a pas permis aux agriculteurs locaux de passer le cap de leur fruitière communale à des coopératives de taille plus importante. La majorité a alors choisi la filière de lait standard.

Le comté en chiffres

La filière comté réunit 2600 exploitations, 150 fruitières et quinze sociétés d’affinage. Elle représente 14 000 emplois directs, producteurs, fromagers et personnes en lien avec les affineurs. 65 000 t de comté ont été produites en 2017, la prévision est de 67 000 t pour 2018.