FILIÈRE
Lait de consommation : une hausse des prix exigée

Renégociations avec les distributeurs difficiles, retour à la normale de la consommation et baisse de la collecte, les fabricants de lait de consommation liquide font le point sur les perspectives pour 2022.

Lait de consommation :  une hausse des prix exigée
Les coûts de production des laiteries flambent et devraient augmenter de 15 à 20 % en 2022, estime Syndilait.

Alors que les industriels renégocient leurs tarifs avec la grande distribution dans le cadre des renégociations commerciales, Éric Forin, président de Syndilait, appelle à « crever le plafond de verre d’un euro le litre » sur le prix de vente des bouteilles et des briques de lait en magasin. Matière première agricole, énergie, emballages… les coûts de production des laiteries flambent et devraient augmenter de 15 à 20 % en 2022, estime l’organisation spécialisée qui regroupe la majorité des fabricants de lait de consommation liquide. Une inflation que les industriels du lait ne parviennent pas à répercuter sur leur prix en sortie d’usine. « Nous sommes face à des clients très agressifs sur les prix », a déploré Emmanuel Vasseneix, PDG de la laiterie LSDH, le 10 mai lors d’une conférence de presse. Selon lui, les hausses demandées par l’industrie ne sont pas « à négocier », mais « nécessaires » pour ne pas mettre en péril toute la filière. « Il va y avoir des réveils extrêmement difficiles », prévient-il.

Retour à la normale sur la consommation

En 2021, les coûts de production des industriels avaient déjà bondi « de 8 à 10 % ». Le prix de vente des laits liquides en grande surface a, lui, augmenté de 2,1 % en moyenne par rapport à 2020, pour s’établir à 0,99 €/l selon le panéliste IRI. C’est encore moins pour le lait UHT demi-écrémé – le plus vendu – qui a plafonné à 0,83 €/l en moyenne (+ 1,5 %). Syndilait demande donc à ses clients de dépasser la barre symbolique d’« un euro le litre » de lait liquide. « Il restera un produit ultra-abordable », plaide Éric Forin, également directeur général de Candia (Sodiaal). La consommation de ce produit du quotidien a « retrouvé son rythme d’avant Covid » avec 2,84 milliards (Md) de litres vendus en 2021, contre 2,91 Md en 2019 (- 2,5 %) et 3 Md en 2020 (- 5,6 %). Cela a représenté un marché de 2,27 Md€ en grande distribution (+ 1,2 % par rapport à 2019, - 4,2 % par rapport à 2020). Syndilait acte un « retour à la normale » après une année 2020 marquée par une « croissance exceptionnelle ». Autre source d’inquiétude : les industriels redoutent une pénurie de lait sur les mois de juillet et août en raison de la sécheresse qui s’annonce. « Déjà, l’herbe est moins verte. Heureusement qu’il y a eu suffisamment de pluie à l’automne dernier pour faire du fourrage, mais ça ne sera pas le cas cette année », anticipe Éric Forin. S’ajoute la guerre en Ukraine qui réduit les disponibilités en céréales avec, pour conséquence, le « renchérissement de l’alimentation animale » et une « accélération de la décollecte de lait ». « Les producteurs vont faire des arbitrages, ils vont réduire les rations », complète Emmanuel Vasseneix. D’autres encore pourraient tout simplement « arrêter de produire », s’inquiète-t-il. En 2021, la collecte de lait conventionnel a baissé de 2,3 %, d’après les données de l’Institut de l’élevage (Idele). Et, selon les dernières données de FranceAgriMer, tous laits confondus, elle était en recul de 0,8 % au mois de février par rapport à février 2021. De l’avis des deux dirigeants, la sécheresse qui se dessine et ses conséquences rendent les hausses de tarifs d’autant plus importantes. « Si on ne prend pas garde à ces problématiques d’inflation, c’est un encouragement à se désengager de cette production. En période d’inflation forte, si le travail des producteurs de lait n’est pas rémunéré, c’est plus facile de faire des céréales ou des petits pois et de tout simplement arrêter le lait », prévient Éric Forin. Cependant, il doute que « les distributeurs saisissent la gravité de la situation ».

J.G.