Coopérative Bressor : produire du lait toute l’année de façon régulière

Propos recueillis par Patricia Flochon
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La coopérative laitière Bressor a tenu son assemblée générale le 13 avril à Vonnas. Évolution du prix du lait et débouchés, application de la loi EGalim, conjoncture et enjeux pour l’avenir… éléments de réponses avec Norbert Jaravel, le président de la coopérative, et son directeur Jérémie Vandenbroucke.

Coopérative Bressor : produire du lait toute l’année de façon régulière
Norbert Jaravel, président de la coopérative laitière Bressor, et son directeur Jérémie Vandenbroucke. PHOTO/ PF

Qu’en est-il de l’évolution des volumes collectés ?
 
Norbert Jaravel : « On peut noter que c’est une production stable d’une année sur l’autre, avec 118,391 millions de litres (Ml) en 2021 et 118,422 M en 2022 ; ce malgré une diminution de cinq producteurs, sur un total de 190 exploitations laitières en janvier 2022. Pour 2023, on table sur 115 Ml ».
 
Quels débouchés pour les volumes de lait collecté ?
 
Jérémie Vandenbroucke : « Environ 55 % du lait collecté est dédié au marché français, vers la grande distribution française ; 20 % au marché d’export ; et 25 % qui sont du surplus saisonnier (35 % sur la période printanière et 10 % sur la période automnale) qui eux sont sur le marché spot ».
 
À combien le lait a-t-il été valorisé en 2022 et à quoi s’attendre pour 2023 ?
 
Jérémie Vandenbroucke : « Le prix du lait moyen 2022 était de 478 € les 1 000 litres pour du lait TPQC*, avec une prime de 15 €/1000 litres sur la production non OGM et sur le lait bio (le lait bio représente un million de litres sur les 118 M). Concernant les excédents, on est sur une année exceptionnelle, où les excédents ont mieux valorisé le lait que la contractualisation avec Savencia ; ils ont apporté l’équivalent de 7,70 €/1 000 litres. D’habitude on est sur un ordre de grandeur plutôt de – 5 €/1 000 litres. Pour l’année 2023 on s’attend à une baisse de 4,7 % du prix du lait, avec un prix prévisionnel autour de 450 €/1 000 litres TPQC ». 
 
Qu’en est-il du respect de la loi EGalim et quel impact sur le prix du lait ?
 
Jérémie Vandenbroucke : « Le principe de la loi EGalim est que vous avez un coût de production défini en fermes qui est soumis à des variations en pourcentages, à la hausse depuis deux ou trois ans ; à partir de là, l’acheteur (le transformateur) doit accepter cette augmentation sans la rediscuter. On observe sur les dix-huit derniers mois une augmentation de 20 % des coûts de production. Le transformateur doit les accepter et répercuter cette augmentation chez le distributeur. Savencia va accepter ces 20 %, par contre on la définit du mois d’août 2021 au mois de juillet 2022 et du mois d’août 2022 à juillet 2023, et donc ces 20 % sont à observer sur 18 mois à cheval sur deux années. Donc aujourd’hui sur ces 20 %, Savencia a déjà accepté 14 % et va encore accepter 9 %, mais sur deux exercices différents. On attend donc les 9 % supplémentaires. Le cadre de la loi EGalim est très clair. Notre partenariat historique avec Savencia nous a prouvé qu’ils ont toujours respecté leur parole ».   
 
Que répondez-vous à la grogne des éleveurs relative à la saisonnalité des prix, qui se traduit par un écart de prix de 110 €/1 000 litres entre le prix d’hiver/printemps et le prix d’été ?
 
Norbert Jaravel : « On applique une différence de prix qui est justifiée par notre partenariat. Il y a un objectif général coopératif commun à toutes les exploitations de Bressor qui est d’amener le lait sur les fromageries au moment où elles en ont besoin pour le transformer en fromage. Ce qui explique cette différence des 110 €. Il y a un besoin de volume de lait à l’automne, donc on le paie plus cher à l’automne. On produit historiquement plus de lait au printemps dans les exploitations du fait de la mise à l’herbe. Les producteurs produisant plus et les fromageries en ayant moins besoin, cela explique le prix moindre sur le printemps. Mais chaque éleveur doit gérer son exploitation pour en tirer le meilleur revenu. Donc chacun doit faire en sorte que sa production saisonnière soit en cohérence avec son système d’exploitation. Ça fait tiquer parce que l’on affiche des prix différents et que l’on est à contre-courant de ce qui se pratique dans notre environnement. Du mois de janvier au mois de mai, nos voisins paient le lait plus cher que Bressor, par contre à partir du mois de juin on commence à payer plus, jusqu’en novembre, on est payé plus cher que nos voisins. On a l’exemple de certaines exploitations qui s’adaptent à ce système et qui produisent du lait toute l’année, de façon très régulière. Donc c’est à chaque exploitation de s’adapter ou de s’affirmer dans son mode de production et d’en tirer les meilleurs résultats. La position des producteurs, c’est quelque chose que l’on entend et on relaie aussi cette demande auprès de Savencia, en leur demandant des solutions pour transformer le lait de printemps. Savencia investit dans la recherche et le développement pour développer des produits faits à partir du lait de printemps. Comme par exemple le fromage longue conservation ». 
 
Quels défis seront à relever dans les années à venir ? 

Jérémie Vandenbroucke : « La filière va évoluer au niveau de l’approvisionnement laitier, des transformations et des modes de consommation. Un travail sur le rejet carbone de la filière (la grande distribution, le transformateur et les producteurs) est attendu. Ce sera l’un des challenges à relever dans les deux ou trois ans à venir. Nous sommes en train de travailler sur les solutions à apporter, notamment en collaboration avec ACSEL Conseil Élevage. Le but étant de trouver une cohérence entre ce qu’attend le consommateur et ce qui est possible sur les exploitations ; l’optimum serait de trouver une meilleure valorisation pour les exploitants ». 
 

* Toutes primes et qualités comprises.