APICULTURE
Un début de saison catastrophique

La sècheresse de début de printemps, suivie des coups de froid de mai, puis de la canicule fin juin font de 2019 une année extrêmement compliquée. Les apiculteurs espèrent que la transhumance en montagne sauvera la situation.
Un début de saison catastrophique

« A la fin de l'hiver, nous nous disions avec beaucoup de satisfactions que toutes les conditions étaient réunies pour que la saison soit exceptionnelle : les ruches présentaient une belle homogénéité, aucune n'avait souffert et le cheptel était d'une densité normale » se rappelle avec beaucoup de regrets Michel Coillard, du rucher des nymphes à Domsure, représentant des apiculteurs professionnels au sein de la FDSEA. Puis fin février-début mars, la sécheresse est arrivée, les plantes ont commencé à montrer des signes de souffrance.
« Quand elles sont affectées » explique-t-il, « les plantes se mettent en mode survie et ne produisent pas de nectar, ni de pollen. Les abeilles n'ont pas pu nourrir les larves ce qui compromet les générations futures. Cette année, nous mesurons avec d'autant plus de regret l'impact de la disparition du buis dans le Revermont » confesse Michel Coillard. « C'était la première rentrée en pollen de l'année. Un apport extrêmement nourrissant ».

Le sud plus touché que le nord

Ce coup de sec, a été amplifié par le vent du nord qui a soufflé des journées entières avant de laisser la place à un long épisode de froid, de pluie et même de petites gelées à la mi-mai. «De fait, les abeilles ont mangé toute les réserves pour résister à cette météo difficile. On a même dû les nourrir à certaine période. Ensuite, la floraison des acacias a été de mauvaise qualité obligeant les abeilles à élargir leur aire de butinage. Ce qui fait que le miel d'acacia qui représente 50% de notre chiffre d'affaires, sera déclassé en miel fleurs. Vendu moins cher, cela aura pour conséquence un manque à gagner important ».
Depuis le début de la saison, il n'y a pas eu de moments favorables, chaque miellée a été perturbée en raison de l'accumulation, l'intensité et la durée des différents épisodes. « Plus on descend dans le sud, plus le phénomène est important » déclare Michel Coillard.
« C'est vrai pour le département de l'Ain, le nord a été plus arrosé que le sud, la Dombes a été très affectée par la sécheresse et le vent du nord. On le constate également à l'échelle de la région Auvergne Rhône-Alpes, le département de la vallée du Rhône ont connu un épisode de vent du nord encore bien plus long que le nôtre, ce qui a beaucoup impacté le fleurissement de la lavande dans le Vaucluse et la Drôme ».

On est passé à côté de tout

 

« Je me bats depuis de nombreuses années afin que l’on organise le marché du miel en particulier, pour que dans l’avenir l’on ait toujours des apiculteurs et qu’ils puissent vivre de leur activité » affirme Thierry Chavand. Arrivé au 2/3 de la saison, le constat des apiculteurs de l’Ain est identique à celui de Michel Coillard qui se désole en voyant ses cadres vides.

 

« On a pu faire les essaims très tôt fin mars début avril, le temps s'y prêtait bien » rappelle Michel Coillard. « Malheureusement, le mauvais temps est arrivé et il a été quasiment impossible de faire féconder une reine. D'ailleurs, les colonies ont bien souvent éliminés la majorité des mâles qui ne servaient plus à rien, afin de faire des économies de nourriture. De fait, on a perdu un grand nombre d'essaims, sûrement 50% du cheptel de renouvellement, ce qui va impacter la production de l'année à venir. Une demande d'un plan de calamité agricole a d'ores et déjà été déposée à la DDT de l'Ain. « Nous espérons obtenir un soutien à l'activité des trente apiculteurs professionnels que compte l'Ain, parmi lesquels on dénombre beaucoup de jeunes installés qui souffrent car ils n'ont pas encore constitué beaucoup de stock».
A l'heure actuelle, les apiculteurs espèrent que les miellées de montagne seront réussies afin de limiter les dégâts. « Cela fait plusieurs années qu'elles marchent mieux que celles de la plaine. Ce qui fait que les apiculteurs de montagne ont souvent plus de réserves que ceux d'en bas» fait-il remarquer. « Dans l'Ain nous avons la chance d'avoir une agriculture variée avec de nombreuses zones AOC qui nous garantissent une large biodiversité, déterminante pour la vitalité des abeilles et des insectes pollinisateurs ».

Magdeleine Barralon

Défendre les apiculteurs professionnels pour sauver les abeilles

Outre les conditions météorologiques chaotiques, ces sont les questions d’organisation du marché qui tracassent les apiculteurs professionnels comme Thierry Chavand du rucher d’Amédée à Jasseron, président de la section apiculture au Groupement départemental de défense sanitaire (GDS 01). « Par organisation du marché nous entendons par là, l’identification et la traçabilité des produits de la ruche, du miel en particulier. Nous nous battons également pour que soit déterminé avec précision le statut de l’apiculteur professionnel qui doit être le seul habilité à définir ce que sont les produits de la ruche. Il en va de l’avenir de notre profession et de la survie des abeilles » déclare avec fermeté
Michel Coillard et Thierry Chavand s’accordent à dire qu’il est aujourd’hui indispensable que les miels soit identifiés par un étiquetage européen clair et transparent qui permette une traçabilité sans faille .
La création, à la demande du gouvernement, d’une interprofession, laisse espérer aux apiculteurs professionnels l’organisation d’une filière qui permette de mieux réglementer la profession.