VALORISATION DU BOIS DES EXPLOITATIONS
Haie’Vènement : une journée pour mieux valoriser le bois des exploitations

Jeudi 27 juin, la chambre d’agriculture de l’Ain, la FD Cuma, la toute nouvelle association « Bois agri-local aindinois » et leurs partenaires vous invitent à une journée technique à St-André-sur-Vieux-Jonc autour de la valorisation durable de la biomasse et plus particulièrement du bois issu des haies. Quelques heures qui peuvent rapporter gros.
Haie’Vènement : une journée pour mieux valoriser le bois des exploitations

Hervé Puthet

 

« C'est dommage de ne pas utiliser cette ressource »

Hervé Puthet, vous êtes président de l’association « Bois agri-local aindinois », créée en mars dernier. Qu’est-ce qui vous a conduit à lancer cette structure ?
C’est l’aboutissement d’une réflexion que nous menons conjointement avec la chambre d’agriculture et la FD Cuma autour du bois. Nous sommes partis d’un constat simple : toutes nos exploitations disposent de bois ou de haies, que petit à petit, nous avons un peu perdu l’habitude de valoriser. Cela s’explique par le fait que nous avons moins de temps à y consacrer, que les agriculteurs sont moins enclins à sortir la tronçonneuse... Au fil du temps, nous avons perdu cette culture de la haie. Résultat, faute d’entretien, beaucoup se sont épaissies et même quand on les taille, le bois est assez mal valorisé. Nous nous sommes dit que c’était dommage de ne pas utiliser cette ressource.

Quels seront les objectifs concrets de l’association ?
De coordonner tous les acteurs du sujet, afin, à terme, de créer une vraie filière locale, qui nous permettra de valoriser durablement la ressource de nos exploitations. Nous sommes en contact avec une Cuma de Saône-et-Loire qui dispose d’un sécateur grappin. Cela permet de tailler correctement et rapidement les branches et de les mettre en tas. Nous travaillons avec la Cuma Ain Compost sur l’aspect broyage. Le but sur le long terme est de travailler avec les collectivités pour commercialiser notre bois localement.
 Il nous paraît important que les agriculteurs gardent la maîtrise de ce dossier.

Vous évoquez la nécessité d’une gestion durable de la biomasse. Qu’entendez-vous par là ?
Qu’il n’est pas question de faire n’importe quoi. La logique serait la suivante d’abord permettre à l’agriculteur d’estimer son potentiel. Pour l’avoir fait chez moi, je peux vous dire que je ne pensais pas disposer d’autant de biomasse exploitable ! Et ensuite disposer des outils nécessaires pour mécaniser le travail. On regarde déjà ce qui existe autour de nous avant d’investir dans du gros matériel. D’autant que ces chantiers ont l’avantage de pouvoir être réalisés dans des périodes d’activité un peu creuses. Nous avons déjà rédigé un guide des bonnes pratiques. Chacun des partenaires et des intervenants devra répondre à une charte bien précise.

Est-ce que cela peut constituer un revenu important ?
C’est très variable d’une exploitation à l’autre. Cela dépend aussi si on le valorise en paillage, en buches, en bois plaquette. Mais je pense que chacun pourrait, à minima, dégager 1000 euros par an. D’autant qu’avec le développement des chaufferies bois collectives, la demande va augmenter. Ce n’est pas ce qui va faire tourner l’exploitation, mais c’est toujours ça de pris. En plus, dans plusieurs secteurs, la présence de haies est obligatoire, comme sur la zone AOP Bresse par exemple. Autant transformer cette contrainte en ressource. C’est aussi une façon, pour nous, agriculteurs, de prendre notre part dans la transition énergétique, en développant des énergies renouvelables de proximité, tout en préservant les paysages bocagers de façon
rationnelle et intelligente.

Etienne Grosjean

 

 

 

Nicolas André

 

« Même le petit bois est rentabilisé »

Depuis 2011, Nicolas André utilise le bois plaquette comme chauffage, 30 à 40 MAP/an. « C’est économique et procure une bonne chaleur ». Il a investi dans une chaudière automatisée. Les plaquettes sont stockées dans un silo et sont introduites dans la chaudière de façon automatique au niveau de la chambre de combustion lorsqu’il en manque. Le rendement thermique est excellent : plus de 90 % de l’énergie potentielle du bois est convertie. Cela permet de générer très peu de cendres et de fumées.
« C’est pratique pour nous qui sommes plus souvent à l’extérieur qu’à l’intérieur dans notre métier. Pas besoin de surveiller, le feu ne s’éteint pas » résume Nicolas. Sur ses parcelles le diagnostic bois accusait beaucoup de retard. « Avant nous faisions l’entretien des haies en famille sans vraiment se poser de question. A présent, le plan de gestion bocager est connu pour les années à venir. Il a été établi avec un conseiller de la chambre d’agriculture de l’Ain. ».

En litière aussi

Comme il n’utilise pas tout son bois en chauffage, Nicolas en commercialise et, depuis quelques temps, s’en sert aussi pour la litière. Installé à Foissiat, cet agriculteur spécialisé en vaches allaitantes possède 70 mères dont les veaux sont vendus sous la marque Bressou. « C’est une litière qui est plus saine et cela permet de valoriser du bois qui n’a pas de valeur, j’en passe 200 MAP. On rentabilise tout le bois des haies même le petit bois, rien ne reste au sol ». Ce travail qui autrefois nécessitait beaucoup de main-d’œuvre, grâce au grappin coupeur et à la déchiqueteuse, se fait maintenant sur place en peu de temps et en toute sécurité. « En plus les agriculteurs, nous sommes outillés pour le transporter » ajoute Nicolas.

Se faire connaître

Nouvellement créée, l’association «  Bois agri-local aindinois » entend mieux se faire connaître lors de la journée Haie’vènement. « Le but sur le long terme est de travailler avec les communes. Arriver à faire commercialiser notre bois localement ».

Yolande Carron

Régis favier

 

« Le travail d’une journée et fait en une heure ! »

Installé en Dombes en polyculture élevage, Régis Favier est depuis bien longtemps sensible aux solutions de l’énergie renouvelable. « Cela fait 15 ans que je me chauffe au bois déchiqueté ». Des haies, il en a 15 km à entretenir et lorsqu’il a visionné la vidéo de la Cuma de Saône-et-Loire présentant le grappin coupeur il a tout de suite été séduit. « Cela apportait tout ce dont j’avais besoin et dans un temps record ».

Terminé la tronçonneuse

Les parcelles de Régis Favier ont beaucoup de haies en lisière de bois. L’entretien n’avait pas été fait pendant 50 ans ou juste à la tronçonneuse. Pour qu’elles repoussent correctement il faut les entretenir régulièrement. « Au départ, l’idée était de mécaniser l’abattage du bois afin de sécuriser cette tâche » explique Régis. En effet, les accidents de tronçonneuse sont nombreux. Bien souvent les haies sont en bordure de route ou difficilement accessibles. Le grappin coupeur sur chenille permet d’accéder à des zones peu praticables et le bras arrive à couper des arbres impossibles à atteindre. « Cette mécanisation apporte la sécurité, elle permet de mettre le bois au sol dans de bonnes conditions ». Point de vue rendement, c’est du temps de gagné « On abat, on aligne et on broie pour les plaquettes ou on coupe pour les bûches. Le tout dans la foulée. En une heure, le grappin est capable de faire ce que nous ferions en une journée et en prenant des risques. C’est incroyable » s’exclame Régis.

Bien préparer le travail

L’agriculteur, avec l’appui d’un conseiller de la chambre d’agriculture, décide des haies qu’il va faire tailler et détermine la hauteur. Le grappin permet de sculpter sa haie pour qu’elle devienne productive en bois et ombrage.
« Nous établissons un code de marquage sur chaque arbre en couleur, on peut choisir de faire l’entretien dans la partie haute ou bien la partie basse ». Lorsque le chauffeur arrive avec l’engin il n’a plus qu’à tailler. Après, le bois est broyé sur place ou découpé en bûches. Ainsi, le bois des exploitations et mieux valorisé. Il est utilisé en litière et en énergie. Deux passages annuels sont nécessaires, à l’automne et en hiver.

Aller plus loin

Régis Favier a la volonté d’aller encore plus loin. Il est partant pour un plan de gestion bocager sur 15 ans. C’est un outil qui permet l’amélioration, l’entretien et la valorisation des haies sur le long terme en tenant compte des objectifs de l’agriculteur en fonction de ses besoins et de ses ressources. Un partenariat a été signé avec la chambre d’agriculture, le Département, des communautés de communes et des agriculteurs volontaires pour répondre aux questions de ce type de filière.

Y.C.