ESPÈCES ENVAHISSANTES
Amphibi’Ain révolutionne l’arrachage de la jussie dans les étangs
C’est une première en France et elle pourrait préserver des centaines d’étangs du recouvrement par la jussie. Vendredi 23 juin, à Saint-Germain-sur-Renon, la FDCuma et la Fredon Aura ont inauguré publiquement une nouvelle machine amphibie capable d’arracher cette espèce hautement envahissante.
Après plusieurs essais, sa première mise à l’eau publique a finalement eu lieu vendredi 23 juin, sur l’étang de Joël Raccurt à Saint-Germain-sur-Renon. Cet amoureux de la Dombes, aujourd’hui à la retraite, poursuit son activité de pisciculteur à ses heures perdues. Voir disparaître des étangs sous des tapis de jussie est un crève-cœur. Si les siens en sont indemnes, ce n’est pas le cas d’une trentaine d’étangs de la Dombes. Depuis vingt ans, une soixantaine de sites touchés par la jussie ont été répertoriés et font l’objet d’une surveillance continue par la Fredon AuRa. C’est donc tout naturellement que Joël Raccurt a accepté d’accueillir la démonstration de ce prototype sorti tout droit de la tête de Franck Loriot. Spécialiste machinisme à la FDCuma et à la tête de FL Agri/VL Méca-Conseil il a imaginé et créé Amphibi’Ain avec d’anciens camarades de lycée. Enseignant au lycée des Sardières, il a également pu compter sur l’aide de ses élèves de STMA, ravis de pouvoir s’exercer sur un véritable projet.
Un complément à l’arrachage manuel
Jusqu’ici plusieurs machines avaient déjà été mises en vente sur le marché, sans grand succès. Certaines ont même favorisé le développement de la jussie. Conclusion, seul l’arrachage manuel restait favorisé dans le département. Une tâche harassante et souvent insuffisante, confiée il y a une dizaine d’années aux équipes de la Fredon AuRa dans le cadre du plan de lutte départemental contre la jussie. « Certes, la machine ne sera pas aussi efficace que l’arrachage manuel, concède Franck Loriot, mais elle permettra de dégrossir le travail. » Dans l’eau, les racines de la jussie ne sont ni très profondes ni très dures, ce qui rend plus facile leur extraction.
À l’aide d’un bras articulé, dirigé depuis un siège de pilotage, l’Amphibi’Ain peut alors aisément saisir les pieds de jussie. Chenillard amphibie, il a été spécialement conçu pour rentrer dans les étangs, sans en abîmer le fond avec une pression maximale de 65 g/cm2. À titre de comparaison, « c’est six fois moins que la pression exercée par un pied humain, précise Franck Loriot donc cela ne perturbe pas trop la turbidité de l’eau. » Des flotteurs ainsi que des roues utilisées comme béquilles, permettent également de stabiliser l’engin.
Une remorque, d’une capacité de 1,2 tonne, tractée à l’arrière de l’Amphibi’Ain, permettra de ramener la jussie récoltée à terre. À noter que la machine fera l’objet d’une désinfection minutieuse, à l’aide d’un nettoyeur haute pression thermique, après chaque chantier pour limiter tout risque de contamination.
Une machine financée par le Département et la Région
Quelque 150 000 € ont été nécessaires pour la fabrication de cette machine, financée en partie par le Département de l’Ain et le Conseil régional, à hauteur de 56 000 € chacun. « Il est important d’avoir un suivi avec les syndicats de rivières qu’il ne faut pas oublier », a rappelé Jean-Yves Flochon. Le vice-président délégué à l’agriculture au conseil départemental a également annoncé la sortie prochaine du quatrième Livre Blanc dédié à la pisciculture. Chaque année, le Conseil départemental attribue 800 000 € au fonctionnement des structures d’accompagnement de la pisciculture et aux investissements sur étangs. De son côté, Xaxier Breton, représentant du Conseil régional, souligne « le côté expérimental et collectif » du projet.
À termes, l’Amphibi’Ain pourrait être équipé de nouveaux outils utiles à la réfection des étangs : godet faucardeur pour la coupe d’herbes non envahissantes, épandeur pour le chaulage, chaîne de fenaison pour les zones humides ou encore paniers et autres pinces assemblés au bras articulé.