Le gouvernement a présenté le 3 mars un plan de soutien à l’industrie agroalimentaire. Doté de 500 millions d’euros, ce plan vise à aider les entreprises à supporter la flambée de leurs coûts de production. Le gouvernement souhaiterait aussi que ces entreprises se regroupent pour réaliser quelques économies d’échelle.
Les industriels avaient tiré le signal d’alarme à plusieurs reprises. Depuis le début de la guerre en Ukraine, le prix de l’énergie, qui entre pour une grande partie de leurs coûts de production, a littéralement explosé. En septembre dernier, Jean-Philippe André, président de l’Association nationale des industries alimentaires (Ania) citait le cas d’une entreprise de la charcuterie pour qui le coût de l'énergie était passé de 2,5 millions d’euros (M€) en 2021 à 6 M€ en 2022 et qui prévoyait une facture de 14 M€ en 2023. Le gouvernement a semble-t-il pris en compte ces appels de détresse. Craignant « une année noire pour le secteur », le ministre délégué à l’Industrie, Roland Lescure, a présenté, au ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, un plan d’urgence de 500 millions d’euros (M€). Cette somme permettra d’alimenter les entreprises en fonds propres et « devra aussi les engager à investir et se moderniser », ont indiqué les deux ministres. L’objectif est ici de trouver des modes de productions moins gourmands en énergie. Autrement dit aller vers la transition énergétique et parfois numérique comme les agriculteurs ont déjà entamé leur troisième révolution, « robotique, numérique et génétique », selon l’expression de l’ancien ministre de l’Agriculture Julien Denormandie. Roland Lescure et Marc Fesneau souhaitent d’ailleurs que les industries agroalimentaires (IAA) aillent vers cette modernité. « Notre industrie est assez innovante dans les produits ou les emballages. Mais elle le reste peu en matière de process. On a l’industrie agroalimentaire la moins robotisée d’Europe », a affirmé le ministre délégué à l’Industrie.
« Créer des champions »
Une partie des 500 millions pourrait aussi être utilisée au rachat de la concurrence. « Il nous faut créer des champions à la fois sur le marché domestique et à l’international », a souligné Roland Lescure. Il est aujourd’hui très difficile pour une PME française de l’agroalimentaire de devenir une entreprise de taille intermédiaire (ETI1). D'autres mesures de soutien à l'export seront présentées « prochainement » par le ministre du Commerce extérieur, Olivier Becht, pour accompagner les industriels à mieux valoriser leurs produits à l'étranger. En France, « l'industrie agroalimentaire est passée du deuxième au sixième rang des exportateurs agroalimentaires mondiaux en quelques années » et « lorsque l'on retire les vins et spiritueux, nous sommes déficitaires », a déclaré Roland Lescure. Ces 500 millions suffiront-ils à redynamiser une filière agroalimentaire plombée, comme les entreprises agricoles de l’amont, par la hausse des charges ? Selon Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, « les charges des agriculteurs ont augmenté de 35 % sur deux ans », a-t-elle déclaré le 12 mars sur Europe 1. Un rapport de l'Inspection générale des finances de novembre 2022 indiquait, quant à lui, que la rentabilité du maillon industriel, calculée via son excédent brut d'exploitation (EBE), s'était écroulée de 16 % entre 2019 et le premier semestre 2022. Cela « grève les investissements pour la modernisation, la décarbonation et la transition écologique des filières », a relevé le gouvernement. La veille de l’ouverture du Salon de l’agriculture, la FNSEA, la Coopération agricole (LCA) et l’Ania avaient lancé un appel au secours pour limiter le coût de l’énergie et éviter ainsi la disparition d’entreprises et la rupture de la production. Si ce plan fait « écho au rapport sur l’industrie que nous avions remis début février au ministre », a déclaré Dominique Chargé, président de LCA, il ne pourrait bien être qu’une première étape.