SYNDICAL
Arnold Puech d’Alissac invité au Congrès de la FDSEA

Margaux Legras-Maillet
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Le congrès de la FDSEA de l’Ain aura lieu ce vendredi à la salle des fêtes de Condeissiat. Arnold Puech d’Alissac, administrateur de la FNSEA et vice-président de l’Organisation mondiale des agriculteurs (OMA) sera l’invité d’honneur. 

Arnold Puech d’Alissac invité au Congrès de la FDSEA
Arnold Puech d'Alissac est administrateur de la FNSEA et vice-président de l'Organisation mondiale de l'agriculture. Photo/FNSEA

Vous êtes invité au Congrès de la FDSEA de l’Ain ce vendredi. Quels messages souhaitez-vous faire passer aux agriculteurs du département ? La guerre russo-ukrainienne sera-t-elle le seul sujet évoqué ?
Arnold Puech d’Alissac : « La guerre russo-ukrainienne ne sera pas le seul sujet, mais il va orienter la réflexion et sous son influence, j’invite tout le monde à la prudence et à la nécessité dans toutes les filières de renégocier les prix qu’on a pu avoir, dans les contrats laitiers et viande, dans la volaille et dans l’œuf. Il faut faire passer les hausses, parce que les coûts de production ont augmenté, 50 centimes d’euros (ct€) pour le bovin et 5 ct€ pour l’œuf bio. C’est toujours difficile de renégocier un contrat, mais il y a des hausses à faire passer. Deuxième élément, regardez vos coûts de production et regardez si vous voulez vous couvrir pour le carburant et les engrais. On devrait avoir du carburant mais il vaut mieux en avoir d’avance si la trésorerie le permet. Il faut faire des stocks de manière raisonnable et raisonnée : si j’achète de l’engrais, je contractualise ma récolte en même temps, je ne vais pas acheter de l’engrais à 1 000 €/t et attendre que le blé monte à 400 €/t. Il ne faut pas spéculer. Si on achète là, il faut en même temps vendre. Le problème n’est pas pour 2022 mais pas pour 2023. L’autre partie, c’est EGAlim. Comment on la met en œuvre et comment on valorise le travail des interprofessions qui nous ont donné des coûts de production pour gagner deux fois le salaire minimum. »
 
En tant que vice-président de l’OMA, quel regard portez-vous sur la conjoncture européenne actuelle ? 
A.P.d’A.: « La pression qu’on va avoir sur les protéines, animales comme végétales, c’est un vrai défi ; ça peut être un projet pour les agriculteurs en termes de production : comment je fais pour que mon élevage soit moins dépendant des protéines, avec de la luzerne ? Comment je modifie mon système ? L’interdiction de la déforestation va limiter les surfaces dans les pays comme l’Argentine et le Brésil qui nous fournissent du soja et va augmenter la pression sur les protéines. Récolter du trèfle ou de la luzerne n’est pas facile donc comment on le fait ? Il y a un projet de production fort. On a besoin de protéines animales mais il faut qu’elles soient le plus durables possible, que ce soit en conventionnel ou en bio, et durables ça veut dire être productif par rapport au carbone (consommer le moins de carbone au kg produit). L’ambition de neutralité carbone à l’horizon 2050 avec comme étape de réduire de 50 % ces émissions à 2030, c’est un problème, il faut qu’on arrive à baisser nos émissions. La protéine va valoir de plus en plus cher. C’est le défi d’aujourd’hui. » 
 
Le gouvernement vient d’annoncer un plan de résilience à ce sujet. Comment accueillez-vous les mesures de résistance proposées ?
A.P.d’A.: « C’est une partie de la réponse. Les 150 millions d’euros (M€) pour la MSA, c’est bien c’est un effort plus important que les 20 ou 30 M€ qu’on a habituellement pour une crise, mais là c’est tout le pays qui est touché donc par département ça ne fera qu’1,5 M€. Ça va aider, mais ce n’est qu’une partie des choses. Pour les 400 M€ d’aides à l’achat, le premier groupe de travail a lieu aujourd’hui, j’ai cru comprendre que c’était surtout pour les éleveurs qui achètent de l’aliment, et pareil ça fait 4 M€ environ par département, ça fera du bien à ceux qui en ont. Un élément nouveau c’est le PGE (prêts garantis par l’État), nouveau entre guillemets parce que les agriculteurs l’ont peu utilisé. Les entreprises pourront emprunter jusqu’à 35 % de leur chiffre d’affaires, c’est des sommes importantes. C’est vraiment de l’argent bon marché avec des taux d’intérêt très faibles et si vous avez du mal à acheter des carburants ou de l’engrais, tout en contractualisant sinon c’est jouer à la roulette russe, c’est bien. Il faut vraiment regarder sa ferme. Nous les syndicalistes on essaye d’avoir la démarche collective, mais la démarche individuelle pour améliorer sur une ferme son revenu, c’est l’agriculteur qui peut le faire. » 


Quels autres sujets souhaitez-vous aborder ?                                                                               A.P.d’A.: « Il y a la question de la transmission pour les jeunes agriculteurs. Chez nous, vous êtes obligé de racheter l’exploitation à vos frères et sœurs, il n’y a pas cette problématique dans les pays où existe le droit d’aînesse. Il y a aussi des pays très courageux comme l’Irlande où les agriculteurs arrêtent leur production en bovins viande ou allaitants pour s’installer en laitier, chez nous c’est l’inverse. C’est un état d’esprit à avoir, ça doit pouvoir se faire chez nous. »