Marc Fesneau, le ministre de l’Agriculture, était présent samedi 20 avril à la Foire de Beaucroissant en Isère, consacrant un large temps d’échange avec la profession agricole.
Rares sont les ministres qui foulent le sol de la foire de Beaucroissant et encore plus rares ceux qui se déplacent pour l’édition de printemps. Samedi dernier, 20 avril, c’est bien Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture, qui est venu en Isère pour rencontrer les agriculteurs et les acteurs du monde rural. « Crise de foi, crise de sens » du monde agricole, le ministre a pris du temps à la fois pour écouter, mais aussi pour expliquer comment, depuis le mois de février, l’action s’est mise en œuvre pour répondre aux demandes portées par les syndicats agricoles. « Une crise permet de changer les choses », a déclaré Marc Fesneau, en assurant que l’action publique saura apporter des réponses. Avant cela « nous n’aurions jamais fait changer la Pac en deux mois », a-t-il rappelé, tant sur les questions des prairies, que des jachères ou des contrôles. « Cela va se voir dans les exploitations agricoles », a-t-il assuré. Aux demandes de simplification, il promet que dans le respect de l’État de droit, les procédures aboutiront, décret après décret. Marc Fesneau a également précisé sa vision de la future loi d’orientation agricole (LOA), reconnaissant que le texte, imparfait, « mérite d’être enrichi ». Il a mis cependant en garde contre la tentation d’un texte fourre-tout « qui ne ressemble à rien ». « Nous devons avoir un objet partagé autour de la transmission, de l’installation, de la simplification et de la souveraineté », a enjoint le ministre.
Le loup
Reprenant le propos de la députée Aurélie Jacquier-Laforge au sujet du statut du loup et du pastoralisme, il a confirmé être « un allié de la cause » œuvrant au rééquilibrage du plan, notamment sur les pertes indirectes, sur la conduite des troupeaux et sur la génétique. Il préconise, « pour limiter la casse, des prélèvements en début de saison ». Enfin, l’évolution du statut du loup qui pourrait se profiler au niveau européen, permettrait de « retrouver de la marge ». Soit une « gestion plus simple et la possibilité de réguler là où la pression est forte : sur les fronts de colonisation et dans les départements touchés depuis longtemps ». Il a invité aussi les détracteurs de l’activité d’élevage « à aller à la rencontre d’un éleveur prédaté ». Il a ajouté : « La présence historique d’un grand prédateur change la vie d’un éleveur » et a conclu qu'« on ne fait pas de la biodiversité sans les gens et encore moins contre les gens ».
Des impatiences
Marc Fesneau n’était pas venu à la Beaucroissant pour faire des annonces, mais remplir sa besace des remontées de terrain. Il a ainsi échangé avec les éleveurs de Charolais Sud-Est qui l’ont interpellé sur les retards de paiement des aides Pac et sur les difficultés d’installation. La crise ayant montré le désarroi des agriculteurs « qui ne savent plus ce qu’on attend d’eux », Marc Fesneau est venu leur dire que leur rôle est « d’assurer l’alimentation, chez nous et à l’extérieur des frontières », les dérèglements géopolitiques influant sur certains marchés comme celui des céréales dont ont besoin les pays du Maghreb. Il a redit combien les agriculteurs « ont besoin d’être accompagnés dans les transitions » et qu’il « voit les impatiences ».Les agriculteurs, par la voix du président de la FDSEA de l’Isère, Jérôme Crozat, lui ont en effet donné « 100 jours, d’ici aux Jeux olympiques, pour aller deux fois plus vite ». Il a aussi pris rendez-vous avec le ministre pour dans un an, lors du congrès de la FNSEA qui se déroulera du 25 au 27 mars 2025 à Grenoble. D’ici là, le syndicat attend des actions.
Isabelle Doucet
Les politiques en campagne
À Beaucroissant, théâtre de la campagne pour les élections européennes, les corps intermédiaires ont fait part au ministre Marc Fesneau de l’urgence de voir leurs demandes pour le monde agricole se concrétiser.
Un ministre de l’Agriculture, un député président de groupe à l’origine de la loi sur la revalorisation des retraites agricoles, un député européen : à quelques mois des élections européennes, la foire de Beaucroissant de printemps a attiré des personnalités politiques plus qu’à l’accoutumée. André Chassaigne, président du groupe de la Gauche démocrate et républicaine à l’Assemblée nationale, père de la loi sur les retraites agricoles, est candidat aux élections européennes, investi par le PCF. L’Europe est son affaire car il siège à la commission des affaires européennes. « Mon domaine, c’est la Pac », a-t-il résumé. Et son mantra « faire en sorte que la Pac devienne une politique agricole et alimentaire ». Il porte deux sujets : la question des revenus agricoles et celle des accords de libre-échange. Le député s’est associé une partie de la journée à la visite ministérielle de Marc Fesneau venu pour l’inauguration, partager un repas avec les éleveurs charolais et un temps d’échanges avec les représentants des organisations professionnelles agricoles. Le lendemain, c’est le président du Rassemblement national et député européen, Jordan Bardella, qui a arpenté les allées de Beaucroissant.
Un sujet trop important
Lors des allocutions inaugurales, samedi 20 avril, Antoine Reboul, le maire de Beaucroissant, a souligné la rareté d’une présence ministérielle à la foire « qui n’est pas le Salon de l’agriculture mais compte parmi les plus importantes et les plus anciennes ». Il a aussi fait valoir la double fonction de cet événement qui entretien le lien étroit de la grande famille agricole et sert de vitrine « d’un monde vivant » à tous les citoyens. Jérôme Crozat, est intervenu en tant que vice-président de la chambre d’agriculture de l’Isère. Il a d’abord salué la qualité du dialogue entre le ministre et les corps intermédiaires. Puis il a partagé le propos du maire souhaitant faire évoluer la foire tant sur le volet agricole que sur la communication. Il a aussi alerté le ministre sur les difficultés des exploitations en raison de l’augmentation du coût de l’énergie, de la main-d’œuvre, de la surtransposition des normes environnementales, de la baisse de la compétitivité. 187 mesures proposées par la FNSEA, 67 retenues, un tiers acté, « d’autres seront transformées dans le cadre de la LOA ou de négociation avec l’Union européenne ». Jérôme Crozat a donné rendez-vous au ministre dans 100 jours pour répondre à toutes les demandes. « Nous avons besoin que toutes les annonces se concrétisent : la souveraineté alimentaire en dépend », a lancé à son tour Jean-Claude Darlet, en qualité de conseiller régional. La sénatrice Frédérique Puissat a fait appel aux corps intermédiaires pour enrichir le projet de LOA et annoncé qu’elle déposerait un amendement pour que le financement des MAEC puisse retrouver un niveau départemental. Prenant la parole en dernier, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, a dit apprécier « ces moments de rencontre entre agriculteurs et citoyens », qui répondent à « un besoin de la société qui connaît moins le monde agricole ».