PLANTES INVASIVES
Un guide pour lutter efficacement contre l’ambroisie

La fédération des Cuma de l’Ain lance la diffusion d’une plaquette détaillant les préconisations pour une gestion mécanisée efficace de l’ambroisie. Explications.
Un guide pour lutter  efficacement contre l’ambroisie

« Nous avons élaboré ce guide dans le cadre des aides agricoles 2020 attribuées par le conseil départemental de l'Ain pour la lutte contre les espèces invasives ; un guide associé et complémentaire aux actions de la chambre d'agriculture et de la Fredon Auvergne Rhône-Alpes sur le sujet. Il sera diffusé au sein de notre réseau Cuma de l'Ain, de la Fredon, la chambre d'agriculture, et de l'antenne de l'Ain de l'ARS. L'objectif était de mettre en avant les techniques et moyens d'intervention pour une lutte efficace. La fédération a également recensé les Cuma à même d'intervenir avec du matériel adapté », explique Nicolas Boinon, le directeur de la FDCuma, qui précise que « tout le mérite dans l'élaboration de cette plaquette revient à Franck Loriot, je n'ai donné que le ton, il a tout le fondement technique ». Un guide qui décrypte les modes de gestion mécanique les plus adaptés, que ce soit derrière les céréales d'hiver, ou cultures de printemps.

Gérer l'ambroisie derrière les céréales d'hiver...

« Après les récoltes estivales, l'ambroisie, qui pouvait être latente dans les cultures si elle n'a pas pu être gérée au printemps, va profiter d'une grande surface de chaumes, sans concurrence, et de l'humidité post-récolte, pour assoir sa colonisation qui peut être galopante. Si d'autres vivaces sont également en place, la solution chimique aura un effet rapide mais ne sera qu'un palliatif », rappelle en préambule Nicolas Boinon. Des outils adaptés permettront de contenir l'envahissement, ou encore le broyage et le déchaumage. Et de citer deux exemples précis : « Si l'exploitant a de l'ambroisie, mais n'implante pas de couvert, on lui conseille de la broyer avant la montée du pollen, fin juillet, et de passer le déchaumeur tardivement vers la fin du mois d'août. S'il prévoit d'implanter un couvert, il est conseillé de déchaumer tout de suite après la moisson, d'implanter le couvert instantanément, ou de réaliser un faux-semis et déchaumer de nouveau trois semaines après ».

L'importance des réglages pour un déchaumage efficace

Pour un déchaumage réussi, chaque détail compte. « Si l'outil travaille trop superficiellement, l'ambroisie ne sera que partiellement touchée. A l'inverse, avec trop de terre, elle se repiquera et drageonnera. La profondeur idéale est de deux centimètres », précise Nicolas Boinon qui conseille de procéder comme suit : faire des passages de roue au décompacteur ou chisel pour niveler la surface, opérer un premier passage au déchaumeur à 30° des lignes de semis, et un deuxième passage parallèle aux lignes de semis. Et d'ajouter : « Il faut avant tout adapter sa vitesse. Trop lent et l'ambroisie ne sera pas arrachée, trop vite on créera de la terre. Seul votre visuel sera le bon indicateur, en fonction de l'infestation, de l'état de la sécheresse ou de l'humidité du sol ».

Cultures de printemps, les matériels adaptés

La FDCuma préconise : « la destruction précoce du couvert précédant la culture pourra favoriser sa mise en place. Autre acte préventif : réaliser un faux-semis, trois semaines avant l'implantation souhaitée de la culture. Après semis, la houe rotative, par sa capacité à « crocheter » les adventices, et à faible profondeur, montrera toute son efficacité en pré-levée. Le binage permettra aussi un rattrapage en cas de développement précoce de l'ambroisie. Il conviendra d'intervenir uniquement pour cet adventice car lors d'un binage on travaille trop profond, et si l'on veut détruire l'ambroisie en réglant à deux centimètres on n'aura pas l'effet d'un binage ».

 

 

Concurrentielle de certaines cultures, l’ambroisie induit des pertes de rendement et des charges de désherbage supplémentaires.

Patricia Flochon

Contacts et liens utiles


Pour tous renseignements, contacter la FDCuma de l’Ain au 04 74 45 47 61.
Tous les détails sur l’ambroisie à retrouver sur : www.ars.auvergne-rhone-alpes.sante.fr
www.ambroisie.fredon-aura.fr
https://extranet-ain.chambres-agriculture.fr/fileadmin/user_upload/National/FAL_commun/publications/Auvergne-Rhone-Alpes/LutterContreLambroisieEnMilieuAgricole_avr2020.pdf

 

Didier Farfouillon, éleveur à Francheleins (lait et céréales)

L’an dernier en août, le Gaec des Perses s’est vu contraint de détruire une parcelle de tournesol, conformément à la réglementation. Si la parcelle en question représentait 76 ares sur les 285 ha de SAU de l’exploitation, cette obligation de destruction n’a pas été sans conséquences sur le moral des associés ; du temps et de l’énergie gaspillés. « Nous avons reçu un courrier du maire. J’ai appelé la chambre d’agriculture et la Fredon s’est mise en contact avec la mairie. Nous avons broyé, détruit en partie la parcelle de tournesol touchée. Trois semaines, un mois après… il a fallu broyer à nouveau. Nous avons finalement récolté le peu qui restait et semé de l’orge », explique l’éleveur. Si les aides Pac ont été heureusement maintenues, il déplore « qu’il n’y ait aucune aide à la destruction ». Et d’ajouter : « Cette année nous n’avons pas constaté de présence d’ambroisie. Mais le risque est toujours présent. L’an passé, c’est le curage effectué par la DDT qui a dû contaminer la parcelle, car tout le long de la route c’était envahi d’ambroisie ! ».

Mathieu Fournier, céréalier à Ambronay : « Il ne faut pas relâcher la pression ! »

Mathieu Fournier et ses trois associés ont converti une partie de leur exploitation en bio il y a deux ans, d’où la création de deux structures : l’Earl de Lormet (500 ha) et la SCEA (145 ha en bio). Il fait partie du réseau Dephy Plaine de l’Ain (qui regroupe quinze exploitants agricoles céréaliers volontaires pour identifier les pratiques agricoles économes en intrants et performantes économiquement).
« On constate une grosse pression de l’ambroisie sur tout le secteur depuis ces dix dernières années. Je l’aperçois de plus en plus dans les blés au mois de mars, jusque fin août – début septembre, surtout en bordure de parcelles », souligne Mathieu Fournier qui a dû adapter la conduite de culture pour maîtriser la plante. Et d’expliquer : « Pour les maïs et soja on maîtrise l’ambroisie grâce aux phytos. En conventionnel, pour les tournesols, on a effectué un passage de herse étrille et deux de bineuse. En bio, les outils mécanisés donnent de très bons résultats. Mais cela implique une adaptation de l’itinéraire technique avec des rangs espacés pour permettre aux outils de passer. On arrive à maîtriser l’ambroisie, mais ça demande du temps et il ne faut pas relâcher la pression car elle s’enracine très vite. Même avec certains outils c’est dur de la déraciner. Et du fait des dégâts de sangliers, cela crée des espaces clairsemés où l’ambroisie peut très vite prendre le dessus ».
Hervé Broyer, responsable du service routes au conseil départemental de l’Ain
« Les accotements font partie du domaine public routier départemental. Nous avons une politique d’entretien rigoureuse, avec deux ou trois passages au printemps et à l’automne avec les épareuses. En hiver sont effectués le nettoyage des fossés, cours d’eau, et élagage des arbres. Nous apportons une attention toute particulière à l’ambroisie. On la surveille de près, car il faut la faucher ni trop tôt, ni trop tard. On opère un suivi par secteurs et nous recevons les signalements de particuliers ou des collectivités. Lorsque l’on fait des travaux, on réensemence derrière le plus vite possible de manière à éviter la prolifération de la plante. Nous travaillons en lien avec l’ARS et la Fredon. Nous devons également faire face à d’autres plantes invasives comme la Renouée du Japon, l’Ailante glanduleux et la Berce du Caucase ».

P.F.