ENTREPRENEURIAT
Une carte restaurant pour financer des projets agricoles

Jeudi 20 avril, Sophia Akhmatova et Roch du Verdier ont présenté leur projet de carte restaurant appelé « Coup de pousse », au siège de Groupama Rhône-Alpes-Auvergne. Bien plus qu’un titre restaurant traditionnel, cette carte a pour objectif d’apporter une aide financière aux projets agricoles.

Une carte restaurant pour financer des projets agricoles
La carte restaurant « Coup de pousse » va être testée par un échantillon de salariés du groupe Groupama Loire-Bretagne. ©LR-Apasec

Soutenir des projets agricoles à l’aide d’une simple carte restaurant. Tel est le pari que se sont lancé Sophia Akhmatova et Roch du Verdier, âgés de 25 et 22 ans. Leur binôme s’est formé lors d’un stage de fin d’études au sein de la cellule « nouvelle chance » de Groupama. Les deux étudiants devaient alors plancher sur la gestion des aléas financiers et climatiques en agriculteurs. Maraîchers, céréaliers, viticulteurs, éleveurs… Pendant trois mois, les deux étudiants ont rencontré des chefs d’exploitation dans le Loir-et-Cher, le sud de la France, mais également en Auvergne-Rhône-Alpes. « Ce n’était pas en restant au bureau que nous aurions pu apprendre… », admet Sophia Akhmatova.

Prendre en compte les aléas climatiques

L’objectif de cette immersion n’était pas de trouver des solutions aux aléas climatiques, mais bien de se rendre compte des problèmes qu’ils engendrent. Ces quelques mois passés sur diverses exploitations les ont notamment menés sur la route d’Elsa et Oscar Pivard, une fratrie d’agriculteurs située à Dortan, dans le Haut-Bugey (Ain). Cinquième génération d’éleveurs, le duo a repris, il y a un peu plus d’un an l’exploitation familiale composée de 60 vaches, 20 ha de maïs, 10 ha de triticales et d’une société de compostage. Dernièrement, les deux agriculteurs ont décidé de se diversifier en transformant une partie du lait de leur exploitation en glaces aux divers parfums. Autant de projets, qui ont tapé dans l’œil des deux diplômés. « Nous avons rencontré des agriculteurs comme Elsa et Oscar qui veulent rendre leur exploitation plus résiliente en incorporant des projets locaux, de l’agroforesterie ou des méthodes de compostage, assure Roch du Verdier. Mais bien souvent, ce qui manque à ces exploitations, c’est un accès à des fonds pour mener à bien leur projet… Elsa et Oscar ont pu bénéficier de la dotation jeunes agriculteurs, mais ce n’est pas le cas de tous. »

S’adresser directement à l’employeur

Une fois le constat dressé, Sophia Akhmatova et Roch du Verdier, dorénavant embauchés par Groupama, en sont venus à une idée très pragmatique : aboutir à une agriculture plus résiliente doit passer par l’action du consommateur. « Mais en période d’inflation, ce dernier n’est pas prêt à payer plus cher son produit, tient à rappeler le jeune salarié. Nous avons donc décidé de nous adresser directement à l’employeur, puisque les entreprises ont plus de force de frappe. » L’idée de la carte restaurant « Coup de pousse » était née. Son principe ? Ne pas toucher au solde que le salarié possède sur sa carte, mais se servir d’une partie des frais de gestion de la carte et des commissions prises chez les commerces. « Cette somme ira ensuite dans un fonds de dotation d’intérêt général défiscalisé, avec un mécanisme incitatif pour faire des dons directs et ainsi financer des projets agricoles », relatent d’une même voix les deux entrepreneurs.

Soutenir aussi bien le bio, que le conventionnel

Parmi les exemples de projets agricoles avancés, figurent notamment l’achat d’une toiture pour protéger les foins des aléas climatiques, ou encore l’installation de ventilateurs sur les parcelles pour limiter le gel au printemps sur des cultures d'amandes. Quant aux critères d’éligibilité des projets ? Ces derniers restent encore à définir avec des experts agricoles du Groupama. Mais Roch de Verdier se veut clair : « Nous ne sommes pas là pour dire qu’une agriculture est mieux qu’une autre, nous ne fermerons la porte ni au conventionnel, ni au bio, puisque nous souhaitons aider à financer une diversité de projets ». Jusqu’à imaginer accompagner des projets d’énergies renouvelables, lorsque les volumes seront suffisants.

À l’heure actuelle, la carte et l’application « Coup de pousse » existent et la jeune start-up est même accréditée comme société émettrice de titres restaurant. « Mais nous voulons commencer avec un test bêta, avant de déployer la carte plus massivement en septembre », déclare Sophia Akhmatova, l’ambition dans la voix. Les fondateurs sont en négociation avec plusieurs grands groupes et ont signé un partenariat avec Groupama Loire-Bretagne, afin de mettre la carte et son back-office à disposition d’un échantillon de salariés et du service des ressources humaines.

Léa Rochon