PHYTOSANITAIRES
Glyphosate : Bruxelles propose un renouvellement pour 10 ans

Dix ans assortis de nombreuses mesures d’atténuation des risques. C’est ce que propose la Commission européenne pour renouveler l’autorisation de mise sur le marché de l’UE du glyphosate dont la licence expire le 15 décembre.

Glyphosate : Bruxelles propose un renouvellement pour 10 ans
La Commission européenne a proposé le 20 septembre le renouvellement du glyphosate dans l’Union européenne (UE) pour une durée de 10 ans. ©Fotolia

La Commission européenne a proposé le 20 septembre le renouvellement du glyphosate dans l’Union européenne (UE) pour une durée de 10 ans. Le projet de règlement sera officiellement présenté aux États membres. Une décision doit être prise avant le 15 décembre, date d’expiration de la licence actuelle du glyphosate. Lors des discussions qui vont avoir lieu dans les prochaines semaines le texte pourrait être appelé à évoluer, plusieurs États membres, la France et l’Allemagne notamment, l’ayant critiqué.

Atténuation des risques

Dans son évaluation des risques, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa) a estimé que l’herbicide ne présentait pas de risques suffisants pour en interdire l’utilisation dans l’UE, mais elle a pointé certains sujets de vigilance. Pour y répondre, la Commission européenne a prévu, en annexe de son projet de texte, une douzaine de conditions d’utilisation spécifiques dont l’interdiction de la dessiccation (maturation accélérée des plantes). Les conditions d’utilisation, indique le règlement, doivent inclure des mesures d’atténuation pour éviter la dispersion du glyphosate due aux pulvérisations effectuées par les utilisateurs professionnels dans les domaines agricoles. « Par défaut, une bande tampon non pulvérisée sur le terrain d’au moins 5 m à 10 m et des buses réduisant la dérive de pulvérisation d’au moins 75 % doivent être requises, sauf si le résultat de l’évaluation des risques indique qu’une telle atténuation n’est pas nécessaire. » Dans son évaluation, l’Efsa avait identifié un risque à long terme chez les petits mammifères herbivores pour la moitié des usages proposés du glyphosate et reconnu que le manque de données empêchait toute analyse définitive. Pour en tenir compte, la Commission enjoint les États de fixer, si besoin, des conditions d’utilisation selon les spécificités locales telles que la limitation de la durée d’utilisation, du nombre d’applications ou de la dose maximale. Les États membres seront aussi tenus d’examiner les « co-formulants » et d’évaluer l’exposition des consommateurs aux résidus pouvant être présents dans les cultures successives cultivées en rotation. Ils devront également veiller à la protection des eaux souterraines susceptibles d’être exposées via l’infiltration comme aux eaux de surface, notamment celles utilisées pour le captage d’eau potable.

Manque d’harmonisation

Mais Bruxelles laisse globalement beaucoup de marges de manœuvre aux États membres pour mettre en place concrètement ces mesures d’atténuation du risque. C’est la principale critique formulée par la France qui regrette que l’application de méthodes alternatives ne soit pas rendue plus contraignantes. Bruxelles suggère dans son projet de règlement que « lorsque les États membres identifient des effets indirects potentiels sur la biodiversité ils examinent, en tenant compte de leurs conditions agro-environnementales locales, s’il existe d’autres méthodes pratiques de contrôle ou de prévention ayant moins d’impact sur la biodiversité, et peuvent fixer des conditions ou des restrictions d’utilisation spécifiques pour les produits phytopharmaceutiques contenant du glyphosate ». Mais pour Paris, lorsque ces méthodes alternatives sont (ou seront) disponibles leur déploiement devrait être « harmonisé au niveau européen » et non pas laissé au bon vouloir de chacun. La France demande également d’accélérer la mise au point de méthodes d’évaluation des risques pour la biodiversité. En Allemagne, le ministre (Vert) de l’Agriculture Cem Ozdemir a lui aussi critiqué la proposition de la Commission européenne qui devrait selon lui, préparer une sortie progressive du glyphosate. D’autres pays comme le Luxembourg, l’Autriche et les Pays devraient eux aussi faire partie des opposants au projet mis sur la table par Bruxelles. Mais d’autres y sont favorables. Fin juillet, la Commission européenne a reçu les commentaires de 17 États membres qui pour la plupart ont soutenu le renouvellement. Certains auraient même voulu voir l’autorisation portée à 15 ans.

A.G