SORTIE DU GLYPHOSATE
Les ministres mettent l’accent sur l’accompagnement

Auditionnés par la mission d’information commune de l’Assemblée nationale sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate, le 8 novembre, les ministres de l’Agriculture et de la Transition écologique et solidaire ont réaffirmé la volonté du gouvernement d’interdire le produit d’ici trois ans.
Les ministres mettent l’accent sur l’accompagnement

Après l'annonce d'un plan de sortie du glyphosate, le 22 juin, et les débats houleux dans le cadre de la loi Egalim dans laquelle l'interdiction du glyphosate n'a finalement pas été inscrite, une mission d'information commune sur la stratégie de sortie du glyphosate a été mise en place à l'Assemblée nationale le 27 septembre. Présidée par le député Julien Dive (LR), avec pour co-rapporteurs Jean-Baptiste Moreau (LREM) et Jean-Luc Fugit (LREM), la mission a mené sa première audition le 8 novembre, avec les ministres de l'Agriculture et de la Transition écologique, Didier Guillaume et François de Rugy. Si ces derniers ont rappelé la trajectoire, à savoir une interdiction du glyphosate dans les trois ans pour la majorité des usages, et totalement avant 2022, ils ont réaffirmé l'importance d'accompagner les différents utilisateurs (agriculteurs, mais aussi la SNCF, qui n'a pour l'instant pas d'alternative équivalente en matière d'efficacité et de coût pour désherber les voies) dans la recherche et la mise en place de solutions. « L'agriculture française doit être en capacité de continuer à nourrir la France et à exporter, mais avec des produits sûrs, tracés », a insisté Didier Guillaume, pour qui « la sortie du glyphosate est irréversible, mais elle ne peut pas se faire sans un accompagnement des agriculteurs au changement ».

Rôle des filières

Sur 800 000 tonnes de glyphosate utilisées dans le monde, la France en consomme 8 800 t (sur 27 000 tonnes d'herbicides au total), et si l'usage a augmenté entre 2009 et 2014, on a assisté à une baisse de 7 % entre 2014 et 2017, a rappelé le ministre de la Transition écologique et solidaire. La viticulture, l'arboriculture et les cultures céréalières sont les plus consommatrices de glyphosate, même si la transition est en cours. Car les agriculteurs sont à pied d'œuvre : « des démarches de progrès ont déjà été engagées par la filière agricole », a souligné Didier Guillaume qui a salué « le travail mené par la FNSEA avec un contrat de solutions ». « Il faut regarder, tester et évaluer ce qu'il (ndlr : le syndicat agricole) propose », avant de passer par voie réglementaire, estime le ministre de l'Agriculture. En outre, ces efforts doivent être économiquement valorisés, notamment par l'aval : « le plan de sortie ne passera pas sans l'engagement de la grande distribution », a insisté Didier Guillaume.

Le plan de sortie en cours de déploiement

Les ministres ont également indiqué l'avancement d'un certain nombre d'actions contenues dans le plan de sortie du glyphosate. Ainsi, un centre de ressources recensant les solutions existantes alternatives au glyphosate sera accessible avant la fin de l'année. Parallèlement, une cartographie des données d'achat et de vente de glyphosate sera rendue publique avant 2019. L'Anses a été saisie concernant la révision des autorisations de mise en marché des produits à base de glyphosate – 198 produits en contiennent, a précisé le ministre de l'Agriculture, et 58 demandent leur renouvellement. Un renouvellement qui ne sera accordé que si aucune alternative n'est identifiée, et ces nouvelles autorisations ne dépasseront pas le 31 décembre 2020. Par ailleurs, les mesures d'accompagnement comprises dans le plan Ecophyto 2+ seront renforcées, et une nouvelle version va être soumise à la consultation publique dans les prochains jours, ont indiqué les ministres. Le projet de loi de finance pour 2019 comprend en outre une mesure augmentant la taxation des produits phytosanitaires. Pour coordonner l'ensemble de ces actions, un coordinateur interministériel sera nommé, le préfet Pierre-Etienne Bisch (qui a présidé le Comité de rénovation des normes en agriculture, le Corena). La mission d'information a prévu d'auditionner de nouveau les deux ministres dans quelques mois.

 

 

ECOPHYTO

Le gouvernement revoit la courbe, pas l’objectif

La consommation de produits phytos a continué de croître en France en 2016, pour atteindre 94,2 millions de doses-unités, obligeant l’exécutif à revoir sa courbe d’atteinte de l’objectif Ecophyto d’ici 2020 qui reste à 66,5 millions de doses-unités.
Une hausse légère, mais une hausse quand même. La consommation de produits phytosanitaires par l’agriculture française a augmenté de 0,3 % entre 2015 et 2016. C’est ce que confirme le gouvernement dans une annexe au volet « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » du projet de loi de finances 2019. Selon ce document, l’indicateur Nodu (nombre de doses unités), utilisé pour mesurer l’utilisation des phytos, est passé de 93,9 à 94,2 millions entre 2015 et 2016 sur le territoire français. Or, la prévision initiale pour le Nodu 2017 (correspondant aux pesticides consommés en 2016) s’établissait à 84 millions.  Ces chiffres restent toutefois au-dessous de ceux du Nodu 2015.
À l’époque, l’indicateur s’établissait à 96 millions de doses unités. Par ailleurs, cette hausse masque, « de sensibles évolutions parmi les substances les plus dangereuses », les substances CMR1, qui ont un potentiel cancérogène « avéré », étant en baisse de 6 %.

Objectif de - 25 % « réaffirmé » par le gouvernement

Malgré ces résultats en demi-teinte, le gouvernement annonce qu’il « réaffirme » l’objectif de diminuer de 25 % l’utilisation des produits phytosanitaires en France pour 2020, comme prévu dans le plan Ecophyto 2. L’exécutif prévoit toujours une forte diminution de la consommation pour le Nodu 2019, à 73,4 millions, pour atteindre la cible de 66,5 millions en 2020.
Pour atteindre ces objectifs, la courbe est de plus en plus forte, et l’État a déjà revu à la hausse sa prévision pour le Nodu 2018 (correspondant aux pesticides consommés en 2017). « L’objectif de réduction étant linéaire à partir du résultat obtenu en 2017 », la prévision pour le Nodu 2018 passe ainsi de 77,4 à 83,4 millions de doses. Pour atteindre ces objectifs « ambitieux », le gouvernement compte sur le « plan d’actions sur les produits phytopharmaceutiques et une agriculture moins dépendante aux pesticides », présenté par le gouvernement le 25 avril dernier, et qui doit aboutir prochainement à « la formulation de plusieurs propositions qui visent à contribuer à l’atteinte des objectifs du plan Ecophyto 2 + ». Malgré le plan Ecophyto, lancé en 2009, la consommation de produits phytosanitaires par l’agriculture française a augmenté de 12 % entre la période 2014-2016 et la période de référence 2009-2011.