SYNDICALISME
La FDSEA vent debout pour préserver la souveraineté alimentaire

Patricia Flochon
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« Nous avons la force de nous adapter en permanence aux aléas géopolitiques, économiques, climatiques, et à une réglementation toujours plus stricte ». Par ces mots, Adrien Bourlez, président de la FDSEA, résume l’état d’esprit et la force du réseau syndical, réuni en congrès le 24 mars dernier à Viriat. Retour sur les moments forts et sujets majeurs d’actualité.

La FDSEA vent debout pour préserver la souveraineté alimentaire
78ème congrès de la FDSEA, le 24 mars à Viriat. PHOTO/ PF

Rendez-vous majeur dans le paysage du syndicalisme agricole, le congrès de la FDSEA de l’Ain (le 78ème) s’est déroulé le 24 mars à Viriat. Après avoir été impactées par la Covid, aujourd’hui par les conséquences de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, l’enchaînement d’épisodes caniculaires et violentes intempéries dus au changement climatique, toutes les productions et filières, aussi bien végétales qu’animales, doivent faire face à une hausse des charges sans précédent : explosion du coût des énergies, des engrais, du matériel ou encore de l’alimentation. Fort de ce constat, Adrien Bourlez, président de la FDSEA, souligne : « Ces années inhabituelles et exceptionnelles se succèdent et pourtant nous, agriculteurs, nous sommes toujours là. Nous avons la force de nous adapter en permanence aux aléas géopolitiques, économiques, climatiques, et à la réglementation toujours plus stricte ». La FDSEA poursuit son action avec une force de conviction toujours aussi prégnante. Un combat sans relâche sur des sujets majeurs tels que : la pleine application de la loi EGalim 2 afin de garantir un retour de la valeur dans les exploitations agricoles, une gestion optimale de la ressource en eau afin de maintenir le potentiel de production, le dossier des calamités agricoles afin que les agriculteurs puissent être indemnisés à la hauteur de leurs pertes fourragères, l’assurance récolte, etc. Durant l’année 2022, les actions et rencontres ont été démultipliées afin de défendre les droits des exploitants agricoles aindinois. Pour n’en citer que quelques-unes parmi le vaste programme engagé, fin janvier, la FDSEA accueillait le vice-président de la Fédération nationale bovine. Février sera marqué par l’action syndicale régionale à Saint-Vulbas et le blocus de la centrale d’achat de Carrefour avec pour mot d’ordre : « la loi EGalim 2 doit s’appliquer ! » Mi-mai, pour la 3ème année, FDSEA et JA organisaient l’évènement de communication à destination du grand public « Made in Viande » au Gaec du Pisseloup à Outriaz. Un mois plus tard la FDSEA organise et orchestre le Congrès annuel de la Fédération nationale porcine à Bourg-en-Bresse, les 9 et 10 juin. Durant l’été, une action syndicale est menée pour vérifier les prix au magasin Carrefour de Bourg-en-Bresse, toujours en corrélation avec la loi EGalim 2, et le 21 août la commune de Bâgé-Dommartin accueille la finale départementale de labour organisée par les JA. À l’automne, une rencontre avec les parlementaires permet aux JA et à la FDSEA de sensibiliser les élus aux problématiques agricoles, etc. Des exemples parmi tant d’autres qui reflètent l’étendue de l’action menée par la FDSEA, son conseil d’administration et ses équipes aux compétences multiples, services diversifiés et innovants à la clé. Partenaire historique de la FDSEA, les représentants du réseau des Jeunes Agriculteurs étaient présents au congrès. Son président, Justin Chatard, s’est fait fort de rappeler toute « l’importance de former les jeunes agriculteurs », martelant : « être agriculteur aujourd’hui, c’est être chef d’entreprise. Mes remerciements à la Région pour sa gestion suite au transfert de compétences au niveau du dispositif DJA (Dotation Jeunes Agriculteurs). Il est également important d’accompagner et de conseiller les cédants pour installer des jeunes sur des exploitations viables, vivables et transmissibles ».  
 
Indépendance alimentaire et agriculture compétitive
 
Franck Sander, agriculteur en Alsace (grandes cultures, betterave sucrière, houblon, maïs, blé etc.), membre du bureau de la FNSEA, président de la FDSEA du Bas-Rhin et président de la CGB (Confédération générale des planteurs de betteraves), invité d’honneur de ce congrès, s’est exprimé sur le thème : « Face aux interdictions sur l’utilisation des produits phytosanitaires et la flambée de l’énergie, quelles alternatives pour maintenir l’indépendance alimentaire et une agriculture française compétitive sur le marché ? » ; vaste sujet dans un contexte d’année élective à la FNSEA et des nouvelles orientations qui seront décisives pour les mois et années à venir. En préambule Franck Sander rappellera « qu’en tant qu’agriculteurs, il faut que l’on soit fier des défis que l’on a pu relever ces dernières années et que la question de la souveraineté alimentaire est encore plus vraie aujourd’hui qu’il y a cinq ou dix ans ». Selon lui, « les politiques encouragent le local, la vente directe, de même qu’on a encouragé l’agriculture biologique mais cela reste des niches et il va falloir aussi continuer à fournir des produits alimentaires qui soient accessibles à l’ensemble des consommateurs ». Et d’insister sur l’importance de la loi EGalim 2 pour mieux répartir la valeur au sein des filières, ainsi que la nécessité de réguler les marchés : « Un marché totalement libre est très dangereux tant pour le monde agricole que pour l’économie en général car à chaque crise il y a des pertes. À la FNSEA, nous voulons apporter de la visibilité à nos jeunes, de la contractualisation, et à partir de là on peut investir sur la durée ». À propos de la gestion des risques et l’assurance récolte, il estime qu’il s’agit d’un mécanisme positif au niveau de la grande culture « parce que l’on a su abaisser la franchise de 25 à 20 %, avec une enveloppe qui est passée de 150 à 650 M€ », ajoutant dans le même temps : « reste le sujet de l’élevage et de l’herbe qui est loin d’être parfait. Il va falloir avoir suffisamment de parcelles témoins qui garantissent de la perte réelle tant que la méthode Airbus n’est pas au point ».
 
Moyens de production : pour une approche « plus pragmatique »
 
Sur la question des moyens de production, Franck Sander ajoute : « N’importons pas l’agriculture dont nous ne voulons pas et ne nous mettons pas en position de distorsion de concurrence vis-à-vis de nos concurrents européens. Le modèle qui est poussé par l’Union européenne, par certains décideurs et beaucoup d’environnementalistes et écologistes, c’est un modèle de décroissance. En matière de protection des cultures, il faut que l’Inra se remette au travail. L’enjeu : des variétés résistantes aux maladies ; les NBT (New breeding technologies), technique qui permet d’accélérer les croisements au sein d’une même variété ou d’une même espèce. C’est comme ça que demain on sera en capacité de réduire très fortement notre impact au niveau produits phytosanitaires. Et aussi demain des plantes qui seront en capacité de mieux résister à la chaleur, à la sécheresse, aux nuisibles. Tout l’enjeu est de pouvoir avancer avec des techniques alternatives ». Et Franck Sander de prôner « une approche beaucoup plus pragmatique », soulignant le fait qu’Elisabeth Borne s’est exprimée sur le sujet de l’analyse des 250 produits qui vont être remis en consultation pour homologation et son engagement « qu’avant d’interdire sera mis en place un plan de recherche et d’innovation pour trouver des solutions alternatives ».