RENCONTRE
Solidarité Paysans épaule les agriculteurs en difficulté

Le deuxième colloque régional sur les difficultés en agriculture organisé par l'association Solidarité Paysans a fait le plein mardi 9 avril à l'Isara. Des témoignages de tout horizon ont permis de libérer la parole sur un enjeu de société qui reste encore tabou.
 Solidarité Paysans épaule les agriculteurs en difficulté

Surmenage, situation économique fragile, difficulté à prendre des congés... L'épuisement professionnel n'épargne personne. Jeunes installés ou agriculteurs en fin de carrière sont logés à la même enseigne. Pour la deuxième année consécutive,
Solidarité Paysans a organisé son colloque régional en présence de chercheurs, de psychologues et de conseillers experts sur le sujet. En 2018, l'association a accompagné 525 familles d'agriculteurs dans la région. « Les difficultés touchent toutes les filières et toutes les productions. Nous sommes là pour les aider à sortir la tête de l'eau lorsqu'ils n'arrivent plus à trouver des solutions seuls », explique Georges Volta, co-président de Solidarité Paysans Auvergne-Rhône-Alpes.

Un accompagnement en binôme

Les raisons qui plongent les agriculteurs dans des situations très délicates sont multiples. « Il arrive que le mode de commercialisation ne soit pas adapté à la production, que l'on n'ait pas remis en question les méthodes des parents dont on a repris la ferme, que la conjoncture économique génère des crises à répétition dont on n'arrive plus à sortir », énumère Jean-François Bouchevreau, vice-président de Solidarité Paysans en charge de l'agroécologie. L'engrenage peut rapidement se mettre en marche. « Au départ, j'étais réticente à étaler mes problèmes. Mais j'ai vite compris que le soutien de l'association était décisif dans nos démarches auprès des créanciers », témoigne Marie, éleveuse dans le Puy-de-Dôme. « Dès que le contact est instauré, nous faisons le bilan de la situation en binôme. Parfois la comptabilité des structures n'a pas été faite depuis 3 ou 4 ans. Les personnes ont perdu pied. Nous récupérons alors les pièces, mettons tous les chiffres sur la table et planifions des rencontres, notamment avec les banques », reprend Georges Volta. « Nos bénévoles sont en permanence formés à l'écoute et nous faisons appel à des psychologues en relecture de pratiques », ajoute Pascale Blanc, référente Solidarité Paysans dans le département de l'Ain.

La remise en question des pratiques agricoles

En France, plus de 70 % des personnes accompagnées par Solidarité Paysans ont pu maintenir leur emploi. « Ce n'est pas facile d'accepter de devoir demander de l'aide. Pourtant, on constate que la plupart de ceux qui ont accepté de remettre en question leurs pratiques ont pu aller de l'avant et sauver leur entreprise. Cela passe avant tout par la transformation des personnes avant même la transformation des fermes », souligne Xavier Coquil, ergonome et agronome à l'Inra. « Le plus dur, c'est d'arriver à prendre de la distance vis-à-vis d'une façon de faire qui ne marche pas et de ne pas se laisser atteindre par le jugement de l'entourage », ajoute Véronique Louazel, chargée d'études en santé publique à Solidarité Paysans.
« Une prise de risque peut faire peur mais elle est nécessaire pour sortir d'une crise. Elle engendre souvent de l'enthousiasme chez les agriculteurs en difficulté », reprend-elle. Ceux qui ont fait évoluer leur métier vers des pratiques agroécologiques confient « avoir redécouvert l'agronomie et redonné un sens à leur métier.
Et aussi paradoxal que cela puisse paraître, pour certains « le redressement judiciaire a permis de se réapproprier la ferme et de repartir à zéro, sur de nouvelles bases ».

Alison Pelotier
Contact Rhône-Alpes : [email protected] – 04 78 59 61 87Contact Auvergne : [email protected] – 04 73 14 36 10