Lors d’une conférence de presse, les dirigeants de la Fédération nationale des producteurs de lait (FNPL) ont donné leurs priorités pour 2024. Dans une lettre ouverte, ils demandent au ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, une réelle et stricte application des lois Égalim.
Le lait est l’un des derniers bastions où la France est encore souveraine et où les exportations restent supérieures aux importations. La FNPL entend bien tout mettre en œuvre pour préserver cette exception agricole, malgré le décrochage du prix du lait payé aux producteurs par certains opérateurs comme Lactalis et Savencia. Ces derniers n’ont payé que 405 € à 410 € les 1 000 litres de lait quand les coûts de production sont restés élevés : au minimum 442 €/1000 l, selon l’indicateur prix de revient de l’interprofession laitière qui est en hausse de 6 %. La faute à une mauvaise voire une non-application stricte des lois Égalim, a dénoncé Thierry Roquefeuil, président de la FNPL. « On a mis une chape de plomb sur ces lois et on n’a plus aucune transparence », a renchéri Daniel Perrin, secrétaire général. Comme pour les éleveurs de bovins, les producteurs laitiers veulent que les opérateurs ne remettent pas en cause la matière première agricole qui, aux termes de la loi, « est non négociable ». La FNPL en veut particulièrement à l’ancien ministre de l’Agriculture, Bruno Le Maire, aujourd’hui ministre de l’Économie. Elle lui reproche d’inciter les grands distributeurs à contourner la loi pour, en bout de chaîne, réduire l’inflation auprès des consommateurs. « Les industriels et les distributeurs ont entendu l’appel du ministre de baisser les prix, donc de baisser les prix payés aux éleveurs. Le pouvoir d’achat des Français ne dépend pas que de l’alimentation, surtout quand l’électricité augmente de près de 10 % pour les ménages », a précisé Daniel Perrin qui souligne que d’autres opérateurs jouent le jeu en s’appuyant sur la matière première agricole.
2027, année de la rupture ?
Pour la FNPL, industriels et distributeurs doivent s’engager sur les prix pour 2024, afin de donner de la visibilité, tant aux cédants qu’aux repreneurs. En effet, beaucoup d’éleveurs laitiers dissuadent aujourd’hui des jeunes de reprendre leur exploitation en raison d’un trop-plein de contraintes réglementaires, économiques et environnementales et surtout d’une activité devenue de moins en moins rémunératrice. Cette situation inquiète d’autant plus les dirigeants de la FNPL que le lait français amorce un repli inquiétant : la production nationale a reculé d’un milliard de litres en deux ans, passant de 24 à 23 milliards de litres. « C’est impensable et inadmissible », a estimé le président de la FNPL. Parce que l’avenir de la filière laitière française est en jeu, les éleveurs laitiers ont fait parvenir à Bruno Le Maire une lettre ouverte lui demandant en particulier de « contribuer à la sanctuarisation des lois Égalim, et par elles, la rémunération de la matière première agricole » et d’ancrer la transparence dans les relations commerciales d’un bout à l’autre de la chaîne. « Car les éleveurs laitiers ne sauraient être la variable d’ajustement sur le marché intérieur français », ont rappelé les dirigeants de la FNPL. Ils lui demandent aussi de publier les résultats des contrôles réalisés par ses services (DGCCRF) quant au respect des lois Égalim. Si la situation devait rester en l’état, les éleveurs laitiers craignent alors, qu’à ce rythme, 2027 soit l’année du basculement et de la rupture : celle où la France, pour répondre à la consommation intérieure soit contrainte d’importer plus qu’elle n’exportera. Les politiques sont prévenus.