MATÉRIELS AGRICOLES
« Les forces du collectif sont de décider ensemble et de partager le risque »
Les Cuma de Saint-Alban « Bôches » et de Challes-la-Montagne ont accueilli l’assemblée générale de leur Fédération départementale sur les hauteurs qui dominent le Pays du Cerdon jeudi 27 juin.
Rendez-vous toujours aussi dynamique, l’assemblée générale de la FDCuma a réuni une centaine de personnes jeudi dernier, pour quelque 70 Cuma représentées. Un moment qui manquera à n’en pas douter à Didier Perdrix, qui passait le flambeau après plus de vingt ans de loyaux services en tant qu’administrateur.
Comme pour le reste de la profession agricole, la FDCuma n’échappe certes pas au vieillissement de sa population avec peu d’agriculteurs en-dessous de 35 ans*. « La transformation du paysage agricole est en route depuis longtemps, elle semble s’accélérer actuellement. Toutes les Cuma sont concernées : départ en retraite, changement de production, arrêt de l’élevage, des groupes d’entraide qui s’étiolent, des matériels qui ne sont plus utilisés… On cherche d’autres solutions », regrettait le président Christophe Basset. La hausse des charges (+ 64 700 €), largement imputée à l’envolée des prix de l’énergie et charges locatives, n’a pas non plus épargné la fédération départementale. Pour la première fois depuis 2009, la FDCuma a dû se résoudre à augmenter ses cotisations.
16 millions d’euros de travaux
En dépit des difficultés désormais bien connues par le monde agricole, la FDCuma peut aussi se targuer d’une vitalité sans faille avec de nouveaux entrants au conseil d’administration mais aussi le recrutement de nouveaux salariés. Sur les 170 Cuma que compte le département, au moins 130 sont en lien avec la FDCuma et une trentaine sont employeuses de main- d’œuvre et regroupent 91 salariés permanents (soit 80,8 ETP). En 2022, près de 16 millions d’euros (M€) de travaux ont été réalisés, soit un million d’euros en plus par rapport à l’exercice précédent, et 8,5 M€ ont été investis dans 220 matériels, équipements ou bâtiments.
L’année dernière, son agenda n’a pas désempli : plusieurs matinées techniques dédiées au désherbage mécanique et à la destruction de couverts végétaux ; arrachages de jussie, une espèce végétale qui envahit les étangs de la Dombes, grâce au chenillard Amphibi’Ain inauguré l’an dernier ; recherches pour optimiser l’épandage sans tonne, notamment par des solutions de télégonflage ; achat de nouveaux matériels ; signature d’une charte sur la circulation des engins agricoles avec la Chambre d’agriculture, l’association des maires de l’Ain et les syndicats FDSEA et JA ; formations diverses ; partenariat avec les collectivités du territoire.
Un maillon essentiel dans la chaîne d’adaptation
Entre le changement climatique et l’évolution intense mais surtout extrêmement rapide des prix des matériels et du carburant, la FDCuma s’impose plus que jamais comme le maillon essentiel d’une course infinie contre la montre pour s’adapter. Franck Loriot, qui anime le pôle biomasse énergie de l’Ain, propose ainsi régulièrement des études détaillées en matière d’itinéraires techniques, de suivi et de rationalisation des chantiers, de choix d’ouverture à l’innovation.
Depuis l’année dernière, la FDCuma ne met plus seulement des hommes et du matériels en réseau, mais aussi un service informatique. La fédération a en effet adopté un système de messageries informatique commun et surtout homogène. « De plus en plus de téléprocédures nécessitent aujourd’hui d’avoir une adresse mail. Par ailleurs, cet outil permet de centraliser et tracer les données en cas de changement de responsable », a précisé Florence Bouviez. Quant à la question de la dématérialisation de la facturation qui deviendra obligatoire en 2027, il est encore bien tôt pour la FDCuma. La fédération se penche toutefois vivement sur le sujet pour choisir le logiciel de gestion comptable qu’elle utilisera à l’avenir.
La fédération départementale gagne son indépendance
C’est par un chapitre éminemment politique que s’est ensuite poursuivie l’assemblée. La veille, chaque Cuma avait reçu une lettre de la FNCuma portant sur « l’exclusion » de la FDCuma de l’Ain, « faute de reconduction de cotisation ». Loin d’avoir été congédiée, la fédération départementale y voit plutôt une liberté retrouvée. « Cela fait des années que nous essayons d’en sortir », a expliqué Christophe Basset évoquant « des années de distorsion et de difficultés à communiquer ». Devant un auditoire interpellé le président s’est toutefois voulu rassurant : « il ne faut pas avoir peur, c’est une décision réfléchie. Pour nous, c’est une victoire ! » Mieux vaut être seul que mal accompagné ? Loin de vouloir contrarier un adage aussi inattaquable, la FDCuma n’est en réalité pas si seule. En réalité, d’autres départements, à l’instar des Vosges et de l’Allier, se sont aussi détournés de la fédération nationale et puisqu’une Cuma a les mêmes droits que n’importe quelle autre Cuma, qu’elle soit du réseau ou non, la fédération départementale ne craint pas les politiques à deux vitesses. Impartial en la matière, le président de la Chambre d’agriculture, Michel Joux n’a toutefois pas manqué de relever le poids des Cuma de l’Ain dans la région. Et de ponctuer : « Vous pesez beaucoup dans le département, pratiquement la moitié du volume régional et il faut que vous pesiez dans les débats d’orientation. »
*Premiers chiffres d’une étude en cours conduite par la FDCuma, présentés par Florence Bouviez.
Margaux Balfin
RÉSILIENCE DES SYSTÈMES/ Se prendre au jeu avec ResilGame
L’adaptation au changement climatique pousse parfois comme une épine dans le pied pour certains agriculteurs. Difficile de savoir quels choix prendre quand l’équilibre tout entier de l’exploitation peut être mis en péril. Alors pour se former et faire des expérimentations, en conditions réelles mais sans prendre de risque, les serious game ou jeux sérieux se développent. Parmi eux il existe ResilGame*. Conseillé à la Chambre d’agriculture, Jean-Baptiste Lafforgue fait figure de pionnier en l’utilisant dans ses formations que la FDCuma souhaite proposer à ses administrateurs. Gaël Teissier et Gaëtan Richard, tous deux éleveurs, se sont pris au jeu en avant-première et se sont dits agréablement surpris, dixit le premier : « Je n’ai pas tenté trop d’innovations, j’ai essayé de m’adapter par mes propres moyens. Cela m’a conforté dans l’idée que l’agriculture ne va pas toujours dans le sens que l’on veut mais cela permet de s’ouvrir à d’autres solutions. » Un brin plus joueur, Gaëtan Richard s’est laissé tenter par tous les excès : « J’ai choisi un avatar proche de ce que j’avais sur mon exploitation pour avoir des référentiels en termes d’assolement, de main-d’œuvre et pour voir si les résultats coïncidaient avec notre stratégie. C’est un jeu qui arrive de l’Ouest de la France donc qui nécessiterait quelques adaptations au niveau des cartes mais j’ai été surpris de la pertinence. Il y a tellement d’opportunités. Plus collectivement, il permet de découvrir et d’anticiper ses investissements ». Pour l’éleveur, le jeu pourrait même remplacer des cours magistraux dans les lycées agricoles.
*Développé par le Care Design Lab, une école de design, en partenariat avec la Chambre d’agriculture des Pays de la Loire.
RISQUES INCENDIES/ La profession signe une convention avec le SDIS pour coordonner agriculteurs et pompiers
Avant que la saison des incendies ne commence, la profession agricole et le SDIS de l’Ain ont signé une convention pour coordonner l’action des agriculteurs et des pompiers en cas d’incendies. En 2022, plusieurs agriculteurs de l’Ain avaient rallié le Jura pour prêter main forte aux soldats du feu. Un acte spontané qui pourrait être amené à se reproduire mais qui nécessite de l’organisation. Et Ludovic Maréchal, agriculteur, pompier et président de la Cuma de Treffort, de préciser : « On s’est aperçu en 2022 qu’il y avait beaucoup de monde, mais pas de coordination entre les pompiers et les agriculteurs, avec des risques d’accidents. Les agriculteurs ne savaient pas où étaient les pompiers et inversement. » Le département a été découpé en huit secteurs afin de faciliter la liste des agriculteurs volontaires pour intervenir et l’inventaire de leurs matériels disponibles.