ASSEMBLÉE NATIONALE
Jean-Marc Zulesi : « L'eau sera au cœur de l'action de la commission »

Le député des Bouches-du-Rhône Jean-Marc Zulesi (Renaissance) a été élu à la tête de l'influente commission du Développement durable. Si l'agriculture relève en principe de la commission des Affaires économiques, le nouveau président souhaite travailler sur les dossiers agricoles, qui sont au cœur de l'adaptation au changement climatique. Le sujet de l'eau sera prioritaire.

Jean-Marc Zulesi : « L'eau sera au cœur de l'action de la commission »
Jean-Marc Zulesi (Renaissance), président de la commission du Développement durable.

Quels sont les dossiers agricoles sur lesquels votre commission pourrait être amenée à se pencher durant ce quinquennat ?

Jean-Marc Zulesi : « Dans la précédente mandature, nous avons montré que la commission du Développement durable avait la capacité de porter des sujets agricoles. Je pense notamment à l'eau, à notre capacité à irriguer nos cultures pour gagner en souveraineté, tout en transformant notre modèle agricole pour mieux protéger la biodiversité, comme le propose l'agriculture biologique. Je pense également à l'impact des produits phytosanitaires sur les milieux naturels et la biodiversité, à la qualité de l'air, mais également aux enjeux de l'aménagement du territoire sous l'angle du foncier agricole. Dans les prochains mois, je souhaite en tout cas que l'accès à l'eau soit un sujet prioritaire de notre commission. C'est un enjeu majeur pour notre agriculture et notre souveraineté alimentaire. Si nos agriculteurs n'ont pas accès à l'eau, nous ne pourrons pas conserver notre souveraineté alimentaire. Mais alors qu'on évoque beaucoup la sobriété ailleurs, serait-il possible de l'appliquer à la consommation en eau, en faisant évoluer les techniques d'irrigation, voire nos modes de culture ? On parle, par exemple, de plus en plus du sorgho pour remplacer le maïs. Il faut en tout cas une méthodologie précise pour envisager cette sobriété et l'accompagner, chez les agriculteurs comme chez les consommateurs. Alors que le Varenne de l'eau n'a pas répondu à toutes les questions, une mission commune avec la commission des Affaires économiques pourrait donc, selon moi, permettre de travailler sur une trajectoire plus précise. L'agriculture a besoin d'une feuille de route opérationnelle pour répondre aux enjeux de gestion de l'eau et à l'adaptation au changement climatique. »

Le nouvel équilibre de l'Assemblée, qui nécessitera de trouver des compromis, pourrait-il renforcer le rôle de votre commission par rapport à celle des Affaires économiques ?

J-M Zulesi : « L'actualité montre à quel point les sujets en lien avec le développement durable et l'aménagement du territoire sont prioritaires. Incendies, sécheresse, lutte contre le réchauffement climatique : les sujets de cette commission doivent irriguer l'ensemble des travaux parlementaires. Et les questions liées au développement durable et les questions économiques ne doivent pas être mises en opposition. Je suis convaincu qu'une agriculture durable doit permettre de répondre aux besoins de la transition écologique, tout en offrant aux agriculteurs une meilleure rémunération de leur travail. Avec la nouvelle composition de l'hémicycle et ses différentes sensibilités, nous devrons bien sûr travailler les sujets en amont. Mais je sens une volonté, au-delà des déclarations dans les médias, d'avancer sur ces enjeux. Si les textes le justifient, nous pourrons alors envisager des commissions spéciales, rassemblant des députés de différentes commissions, ou même être saisis au fond pour certains articles précis des textes. »

Alors que vous aviez voté en faveur d'une date de sortie du glyphosate, votre commission pourrait-elle également s'intéresser aux pesticides ?

J-M Zulesi : « Je l'envisage, mais cela ne pourra se faire que main dans la main avec la commission des Affaires économiques. L'Ukraine nous montre en tout cas que le sujet est plus d'actualité que jamais. La guerre dans ce grenier à blé nous encourage à produire plus, mais cela ne veut pas dire produire moins bien. C'est là où la commission du Développement durable pourra jouer tout son rôle en s'assurant que la production soit augmentée, tout en conservant voire en améliorant la qualité. Concernant l'agriculture biologique, nous ne travaillerons pas sur l'aspect prix, qui relève de la commission des Affaires économiques. Nous avons en revanche un sujet sur la productivité de l'agriculture biologique, qui ne doit pas être un gros mot. On reproche souvent à l'agriculture biologique ses rendements trop bas. Il y a donc sans doute des techniques agricoles à encourager au regard de ces enjeux, pour voir comment augmenter le volume de production, grâce à plus d'efforts de recherche et développement. »

Devant les sénateurs, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu s'est montré ouvert à retravailler les décrets sur l'artificialisation des sols. Y êtes-vous également favorable ?

J-M Zulesi : « Je fais confiance au ministre pour ne pas détricoter les avancées de la loi Climat, mais pour appliquer la volonté du zéro artificialisation en étant plus pragmatique. Dans ma circonscription, où nous avons un problème d'accès au foncier, de nombreux projets d'installation de jeunes sont refusés au nom du zéro artificialisation. Alors que l'on demande à l'agriculture de produire plus et d'améliorer la qualité, il faudrait voir comment accorder plus de souplesse au dispositif pour faciliter l'arrivée de ces nouveaux agriculteurs. »

Propos recueillis par Ivan Logvenoff