VITICULTURE
Mildiou : des cas présents, mais maîtrisés

Ludivine Degenève
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Les récentes averses mêlées aux chaleurs ont favorisé le développement du Mildiou, ce champignon particulièrement présent sur les exploitations viticoles. Dans l’Ain, beaucoup de cas ont été recensés, notamment dans le Bugey, mais ils ont été maîtrisés. Reportage. 

Mildiou : des cas présents, mais maîtrisés
Le Mildiou, de nom scientifique « Plasmopara viticola », est un champignon parasite qui se développe à l'intérieur de la feuille. Photo/ Syndicat des vins du Bugey

Le Mildiou est un champignon qui s’attaque à de nombreuses espèces de plantes. Il peut être un problème lorsqu’il touche certaines cultures de grande envergure, comme la vigne, la production de tomates, de pommes de terre, de laitues, ou encore de courges. Son développement est principalement lié à la pluie, à l’humidité, et à la chaleur.  « Cette année, on a eu des pluies très contaminatrices. On a eu sans arrêt des averses avec de très grosses gouttes qui projettent le champignon dans la végétation », explique Éric Angelot, viticulteur à Marignieu, et vice-président du syndicat des vins du Bugey.
Le Mildiou a été repéré dans de nombreuses zones en France. « Pour notre part, nous avons été vigilants. Nous avons aujourd’hui toute l’observation nécessaire des suivis par les syndicats et les coopératives », continue Éric Angelot. En effet, grâce à une expertise poussée des techniciens, il est désormais possible pour l’exploitant de déterminer la fenêtre météorologique parfaite pour que le traitement soit optimal, mais aussi de savoir quand les œufs atteignent leur maturité.
 
Pas de crainte pour la récolte
 
Cette année, ce champignon a été très observé dans l’Ain, plus particulièrement dans le Bugey. Chez Romain Bonnard, viticulteur à Seillonnaz, ce sont les cépages de Chardonnay, d’Altesse, de Gamay, de Pinot-noir, et de Mondeuse qui sont touchés. « Les feuilles ont été infectées il y a un mois, mais on a seulement observé les symptômes il y a une dizaine de jours (au 24 mai, NDLR), explique Romain Bonnard. On a un technicien conseil qui nous suit sur le domaine. En fonction de l’endroit où se trouve les taches, il sait que ça vient d’anciennes contaminations. » Chez lui, le Mildiou s’est manifesté sous la forme de taches jaunâtres sur les feuilles, et parfois blanches en dessous, signe que le champignon est en train de fructifier. Pour contrer cela, les traitements ne se sont pas fait attendre : « On utilise de l’hydroxyde de cuivre, qui est plus puissant et qui va même jusqu’à attaquer le champignon, souligne l’exploitant, qui insiste sur le fait de continuer à protéger la vigne, pour minimiser les dégâts sur les nouvelles pousses. C’est une pulvérisation sur le feuillage. Nous, on est à peu près à 300 g/ha. On fait un traitement tous les dix jours environ. » Mais une chose est sûre, ni le volume, ni la qualité du millésime ne sera impactée. « Ça n’a aucune incidence. Il n’y a aucune crainte à avoir, c’est tout à fait raisonnable, il n’y a rien d’inquiétant », termine le viticulteur, avant de préciser : « Il faut quand même continuer à faire attention. »
 
Un premier traitement tardif 
 
Les constats sont similaires du côté de Julien Quinard, viticulteur en agriculture biologique dans le Bugey Sud, secteur Belley. « On peut avoir quelques taches sur les feuilles et les grappes, notamment sur le Pinot-noir. Mais ça ne représente rien du tout, explique l’exploitant, qui a observé le Mildiou sur une surface de 30 ares. On a remarqué les taches fin mai. Je pense que ce sont des contaminations qui ont eu lieu fin avril. D’après moi, le premier traitement a été positionné avec quelques jours de retard sur les parcelles à risque. Avec le froid, on s’est dit qu’il y en aurait peu. Finalement on s’est fait contaminer. » Côté traitements, les mesures sont similaires à celles de Romain Bonnard : « On utilise du cuivre. On pulvérise à peu près tous les sept – dix jours pour protéger la vigne avec des produits qui ne sont que de contact, en fonction du temps. La vigne pousse vite, donc il faut la protéger, et on devrait faire une récolte qui pour le moment s’annonce magnifique », ajoute Julien Quinard, qui précisera, tout comme Romain Bonnard, que le volume et la qualité du vin ne seront pas impactés.
 
Ne pas relâcher l’attention 
 
Même son de cloche du côté d’Éric Angelot : « On a vu les premiers symptômes sur le cépage Roussette et Chardonnay il y a à peu près deux semaines, mais on est très vigilant depuis un mois. » Sur ce domaine, les traitements ont débuté le 2 mai. « On a traité à dix jours par pulvérisation en utilisant des produits de contact et systémiques en y associant des produits en biocontrôle, qui n’ont pas de conséquence sur nos Indices de fréquence de traitement (IFT) », continue le viticulteur.
Éric Angelot est donc optimiste quant au millésime de cette année, mais insiste pour ne pas relâcher l’attention : « Pour moi, il n’y a pas de péril, cependant la vigne reste très sensible à cette maladie jusqu’à la fleur. Nous avons des fenêtres de météo pour traiter en temps et en heure. Dans l’état, il n’y a pas d’atteinte au volume et à la qualité de la récolte. Cependant, c’est un risque à prendre très au sérieux sur ce millésime. »
 
Des vignes passées entre les mailles du filet 
 
Si pour certains viticulteurs, le Mildiou est à surveiller, pour d’autres, ce n’est qu’une lointaine menace. « La vigne est belle et saine. Avec la chaleur, elle a bien démarré, explique Marcel Périnet, exploitant en agriculture biologique à Gravelles (au-dessus de Saint-Martin-du-Mont), secteur plutôt protégé des intempéries. Je n’ai pas eu de pluie, simplement de la rosée. Je n’ai aucune trace du Mildiou. Il y a eu un très beau départ végétal, la vigne est magnifique avec une très belle sortie de raisin. » L’absence du Mildiou est due à la clémence de la météo. « On a eu de la pluie en avril, mais pas plus de 100 mm d’eau. Depuis le 10 mai, on n’a plus une goutte d’eau », souligne le viticulteur. Malgré ce départ sans faute, le viticulteur reste vigilant : « J’ai fait un traitement il y a 10 jours avec du souffre et du cuivre.»
Malgré les différents cas de Mildiou observés sur le territoire, la menace reste minime. Mais minime ne veut pas dire inexistante, voilà pourquoi vigilance et observation des parcelles sont de rigueur.

Aspect technique

Le Mildiou, de son nom scientifique « Plasmopara viticola », est un champignon parasite qui se développe à l’intérieur de la feuille. Il passe l’hiver sous forme d’œufs d’hiver ou oospores sur les feuilles attaquées en automne. Il se réveille à la hausse des températures au printemps (>11degrés), provoquant la maturation des œufs qui libèrent des zoospores biflagellées. Ces derniers ont besoin d’eau libre (pluie >2mm) pour entrer par les stomates de la feuille et entrainer les contaminations primaires. Lorsque les températures atteignent 22-25 degrés, les premiers symptômes apparaissent environ 7 à 14 jours après, selon les conditions de température et d’humidité, sur les feuilles sous forme de tache d’huile en face supérieure et un feutrage blanc est visible en face inférieure. Les jeunes grappes peuvent aussi être touchées par le « rot-gris », qui engendre un feutrage blanc sur les inflorescences. Une déformation de la rafle dite « en crosse » peut également être observée. 
En bref, tous les organes verts et jeunes de la vigne sont sensibles au Mildiou : feuilles, vrilles, rameaux, inflorescences et grappes. 
La lutte contre ce champignon se fait pendant toute la croissance de la vigne. Il faut faire un certain nombre de traitements pour protéger les grappes au maximum, en fonction de la vitesse de croissance, la fréquence des pluies, de la température etc. Des mesures préventives peuvent être réalisées afin de diminuer la pression parasitaire : le relevage et l’ébourgeonnage. 
Le vignoble aindinois est aujourd’hui impacté par le Mildiou, mais la lutte est pratiquée au quotidien.
 
Syndicat des vins du Bugey