SOIREE-DEBAT
Bien-être animal : un film qui délie les langues

Organisée par la CGA de l’Ain la soirée-débat consacrée au bien-être animal, précédée par le visionnage du film « Même pas mal ! », a attiré près de 150 participants.
Bien-être animal : un film qui délie les langues

Selon ses auteurs, « Même pasmal ! » se veut « le film qui fait du bien aux éleveurs et à leurs animaux ». Eux, ce sont Thierry Hétreau, auteur, vétérinaire et formateur au centre d'élevage de Poisy et Patrick Morel, ancien rédacteur en chef-photos au sein du groupe France Agricole et créateur de la WebTV lafranceagricole.fr, aujourd'hui réalisateur et producteur de documentaires. Le film est avant tout destiné à un public d'éleveurs et professionnels de l'élevage (techniciens, vétérinaires...), mais aussi aux jeunes en formation agricole et à toute personne intéress ée par le bien-être animal...
Le pitch du film commence ainsi : « Et si on décidait de se faire du bien en écoutant nos vaches ? C'est un peu la philosophie de ce film. Ancrer le plaisir d'être éleveur dans cette relation magnifique à l'animal. Le voir, l'écouter pour mieux le comprendre. Et pour commencer, on s'attache à supprimer tout ce qui peut causer de la douleur. Vêlage, écornage, vie en bâtiment, avec Thierry Hétreau, vétérinaire et formateur, nous traquons toutes les sources de douleur en élevage ». Selon Thierry Hétreau et Patrick Morel, « la douleur est un prétexte en quelque sorte. On glisse de celle que personne ne conteste, à celle plus discrète qui passe inaperçue : les douleurs à bas bruits, les maladies chroniques, les contusions dans l'espace de vie, celles qui au bout du compte pénalisent le résultat de l'exploitation. Pour anticiper l'élevage de demain, il faut concrètement parler de la conduite alimentaire, de l'aménagement du bâtiment, de la gestion du troupeau, autant d'éléments qui interfèrent avec le bien-être de l'éleveur et celui du troupeau. Le film nous parle, ensuite on parle du film, enfin on modifie le scénario du quotidien ».

Un débat de société

Adrien Bourlez, entouré de Thierry Hétreau (à gauche) et Patrick Morel.

 

 

La projection du film a eu lieu jeudi dernier au cinéma La Grenette de Bourg-en-Bresse, attirant une foule nombreuse composée en majorité d'éleveurs et de représentants des organisations professionnels agricoles. Une soirée à l'initiative de la CGA (Confédération générale agricole) qui place désormais la communication au cœur de ses priorités. « Le grand public se pose de nombreuses questions. Des amalgames sont faits. Et puis il y a la réalité... C'est pour cela qu'il est important de présenter nos pratiques et d'avoir un vrai débat sociétal. Il nous faut communiquer sur notre passion, notre savoir-faire, la réalité de notre métier ! », a rappelé en préambule son président Adrien Bourlez.
Depuis la cour de la ferme, en passant par les centres de recherches agronomiques jusqu'au laboratoire de neurobiologie, ce film – documentaire explore toutes les pistes offertes par la science et la technique pour répondre au défi de réduire, voire supprimer, les causes de ces douleurs. Les séquences tournées chez des éleveurs alternent avec des interviews de scientifiques ou de techniciens travaillant sur cette problématique de la douleur animale. Vêlage, atelier d'écornage des veaux, parage, présentation des différents médicaments ou solutions antidouleurs et rôle de l'ocytocine (appelée aussi hormone du plaisir et du lien social) dans le bien-être animal, importance de l'environnement de l'animal (bâtiments, logettes, conduite d'élevage...)..., le film offre aussi l'occasion de s'interroger sur la relation de l'homme à l'animal (domestique, d'élevage ou sauvage) avec le témoignage du philosophe Jean-Luc Guichet, spécialiste de la question.

Réactions mitigées...

Après visionnage du film, à la question, posée par Patrick Morel : « qui est pour, qui est contre, de diffuser ce film à la télé à une heure de grande écoute ? », les« contre » étaient majoritaires. Un éleveur dans la salle s'est dit « choqué » par la séance d'écornage qu'il juge un peu « dépassée ». Jonathan Janichon, président de la section bovine de la FDSEA s'est dit contre lui aussi, regrettant l'absence de critères économiques. D'autres l'ont trouvé trop technique pour le grand public. Et Jérôme Bobillet, président de la section laitière de souligner : « la grande majorité des éleveurs font bien leur travail. Le problème reste que des gens en haut lieu, déconnectés de la réalité du terrain décident de ce que l'on doit faire, comment on doit le faire, et nous pondent toujours de nouvelles normes. Ce film met bien en avant nos pratiques, mais comment on valorise tout ça ? ». Un consommateur a dit regretter que les problématiques liées au transport et à l'abattage ne soient pas traitées dans le documentaire, avouant s'être déplacé avant tout pour cela. Un film en tout cas qui aura eu le mérite d'engager le débat et de servir de support de discussions et de réflexion.

Patricia Flochon