Les héros de la libération
Libération de la France : Armand Veille, héros de la Résistance
Le week-end du 7 et 8 septembre 2024, la commune de Crottet a accueilli une cérémonie émouvante en hommage aux 137 victimes de la Seconde Guerre mondiale du secteur de la Veyle. Parmi elles, Armand Veille, ancien maire de Crottet et résistant, a été particulièrement honoré pour son engagement héroïque. Cet événement a permis de célébrer la mémoire des combattants et civils tombés pour la liberté, à l’occasion des 80 ans de la Libération de la France.
Le weekend dernier, la commune de Crottet s’est transformée en un lieu de mémoire et de recueillement. Cette commémoration a marqué les 80 ans de la Libération de la France, un hommage solennel aux 137 victimes de la Seconde Guerre mondiale issues des 18 communes du territoire de la Communauté de Communes de la Veyle. Soldats, résistants, déportés et victimes civiles, tous ont été honorés lors de cette cérémonie qui s'est voulue à la fois mémorielle et fédératrice. Organisée sous l’égide de Christophe Greffet, président de la Communauté de communes, et de Jean-Philippe Lhôtelais, maire de Crottet, cet événement a également permis de rendre hommage à des figures illustres de la Résistance locale. La cérémonie a permis de retracer les grandes étapes de cette période sombre, l’engagement des résistants locaux, de rappeler les souffrances et les sacrifices endurés par les habitants pendant la Seconde Guerre mondiale.
Parmi ces victimes, on compte des résistants héroïques comme Armand Veille, maire de Crottet et chef de la résistance locale, mais aussi des figures comme Aimable Chaynes, Alexandre Nicolot, et Rémi Tortet. Chacune de ces personnes a marqué l’histoire de la région par son courage, son engagement et sa détermination à combattre l’oppression nazie.
Le parcours héroïque d’Armand Veille
Armand Veille, dont le portrait a été au cœur de la cérémonie, incarne l’engagement total pour la liberté. Né en 1908 à Crottet, il devient, à seulement 27 ans, le plus jeune maire de France en 1935. De conviction socialiste, il se montre rapidement soucieux du bien-être de ses administrés. Sous son impulsion, plusieurs réformes locales voient le jour, notamment l'électrification rurale, la mise en place de l'adduction d'eau et la remise en état de la voirie. Il défend également l’idée d’une scolarisation dès l’âge de trois ans, conscient de l'importance de l'éducation pour le futur des jeunes générations.
Cependant, la carrière d'Armand Veille prend un tournant décisif en 1940, lors de l’effondrement de la Troisième République. Hostile au régime de Vichy et farouche opposant à l’armistice signé par Pétain, il refuse de se soumettre aux nouvelles autorités collaborationnistes. En septembre 1941, il est révoqué de ses fonctions par le gouvernement de Vichy, une sanction qui ne fait que renforcer sa détermination à résister.
Surnommé "William" dans les réseaux de la Résistance, Armand Veille se lance dans la lutte armée contre l'occupant nazi. En tant que chef du sous-secteur de Pont-de-Veyle, il organise des missions clandestines, assure le transport et la protection des armes destinées au maquis, et participe à des opérations de sabotage contre les infrastructures allemandes. Sous sa direction, les résistants de la région mènent des actions d'une audace remarquable, mettant à mal l'occupant à plusieurs reprises.
Le 19 août 1944, dans un contexte de repli général des troupes allemandes, Armand Veille participe à une mission cruciale : récupérer du carburant à Mâcon, essentiel pour alimenter le maquis. Malheureusement, cette opération tourne au drame. Alors que le camion dans lequel il se trouve est arrêté place Saint-Clément à Mâcon, Veille et ses compagnons sont interceptés par des feldgendarmes allemands. Après un échange de tirs, Armand Veille est mortellement touché à l'artère fémorale. Il meurt sur place, à seulement 36 ans, laissant derrière lui une épouse et trois jeunes enfants.
Un maire révoqué, mais un combattant intrépide
Armand Veille incarne parfaitement la figure du résistant qui, malgré les risques et les menaces, n'a jamais fléchi dans son engagement. Sa révocation en 1941 par le régime de Vichy ne fait que renforcer sa volonté de lutter contre l'oppression et de défendre les valeurs de liberté et de démocratie. Durant toute son action dans la Résistance, il fait preuve d’un sens aigu de l’organisation et d’un courage hors du commun, ce qui lui permet de mobiliser de nombreux habitants de la Veyle dans la lutte clandestine.
Son engagement ne s’arrête pas à son rôle de chef de la résistance. En tant qu’ancien maire, Armand Veille reste profondément attaché à la communauté locale, veillant constamment à la sécurité et au bien-être de ses concitoyens, même dans les moments les plus difficiles de la guerre. Sa mort, survenue à quelques jours seulement de la libération de la région, symbolise la tragédie des résistants morts au seuil de la victoire.
D’autres figures marquantes de la Résistance locale
En plus d'Armand Veille, plusieurs autres figures de la Résistance du secteur ont été honorées lors de cette commémoration. Parmi elles, Aimable Chaynes, ancien poilu de la Grande Guerre et résistant de Vonnas. Il rejoint le mouvement Libération dès 1942 et devient un soutien indéfectible des réfractaires au Service du Travail Obligatoire (STO). Chaynes aide les jeunes à se cacher et participe à la réception de parachutages d'armes destinées à la Résistance. Arrêté par la Gestapo en 1943, il est déporté à Dachau puis à Flossenburg, où il meurt en captivité.
Autre figure emblématique, Alexandre Nicolot, maire de Saint-Laurent-sur-Saône et conseiller général du canton de Bâgé-le-Châtel, a été reconnu "Juste parmi les nations" pour avoir caché deux enfants juifs, Claude et Colette Bloch, dans sa maison de Grièges. Son courage et sa générosité ont sauvé des vies et lui ont valu cet honneur posthume, gravé à Yad Vashem à Jérusalem.
Enfin, Rémi Tortet, gendarme à Pont-de-Veyle, a lui aussi payé de sa vie son engagement dans la Résistance. Officiellement sous les ordres du régime de Vichy, il œuvre clandestinement pour préparer l'insurrection et participer à la libération de la région. Abattu par les Allemands lors d’une mission de surveillance, il tombe quelques jours avant la Libération.
Se souvenir pour ne jamais oublier
Ce week-end de commémoration, permet de rappeler l’importance du devoir de mémoire et de sensibiliser les jeunes générations aux sacrifices des résistants et de leurs familles, pour que les leçons du passé ne soient jamais oubliées. À travers ces hommages, c'est la liberté, chèrement acquise, qui est célébrée. Une liberté pour laquelle Armand Veille et tant d'autres ont donné leur vie.
Sandra Goyon