VITICULTURE
Une récolte historiquement basse, c’est « du jamais vu »

Margaux Legras-Maillet
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Le Syndicat des vins du Bugey a tenu son assemblée générale lundi 14 mars à la salle des fêtes de Revonnas. Récolte désastreuse, flavescence dorée, manque de main-d’œuvre, des exportations en berne … la conjoncture n’est pas au beau fixe, mais l’AOC tient bon. 

Une récolte historiquement basse, c’est « du jamais vu »

Le syndicat ne pouvait commencer cette assemblée sans revenir sur la récolte désastreuse de l’année dernière, 9 269 hl, soit une baisse de 62 % par rapport à 2020. « C’est du jamais vu au niveau du Bugey et c’est la même baisse pour tous les vins (jusqu’à -76 % pour Bugey blanc méthode traditionnelle, ndlr) », regrette Julien Hubail, conseiller technicien viticole. A tel point que seulement 72 producteurs ont pu réaliser une déclaration de vendange en AOC contre 76 en 2020, deux producteurs ont terminé l’année avec une production proche de zéro. Autre fait surprenant, « ce doit être la première fois qu’il y a moins de vins pétillants (48 %) que de vins tranquilles », s’étonne Jean-Luc Guillon, président. Et alors que le gouvernement a été « très réactif » : reconnaissance calamités agricoles, annonce d’une année blanche des cotisations sociales (plus de 170 millions d’euros (M€)) et fond d’urgence en soutien à la filière, les versements peinent à abonder, mais la MSA y travaille a expliqué Olivier de Seyssel, président de la MSA. Étant donnée l’année calamiteuse, le syndicat ne s’est pas résolu à augmenter le montant de ses cotisations, mais a dû faire des choix drastiques et a décidé plusieurs coupes budgétaires notamment dans le budget communication « afin de conserver un semblant d’équilibre », a expliqué Jean-Luc Guillon. 

L'AOC affiche une baisse moyenne de 62 % sur sa récolte 2021. Photo/MLM

Flavescence dorée et autres fléaux
 
Mais le gel n’a pas été la seule calamité de l’année. 2020 a marqué un tournant dans la lutte contre la flavescence dorée pour le vignoble bugiste avec la découverte d’un foyer sur la commune de Poncieux. Depuis, le syndicat s’est organisé en créant deux groupes de travail, l’un délégué à la lutte obligatoire sur le secteur de Cerdon, le second à la prospection interne. Et Jean-Luc Guillon de souligner : « La flavescence dorée est l’affaire de tous. Une personne qui ne traite pas pendant le dispositif ou qui ne prospecte pas ses vignes réduit à néant les efforts de tous. » Et alors que la Région développe des plans filières au détriment des plans spécifiques comme le plan Bugey, mieux vaut anticiper. Démonstrations de travail de sol, journée technique sur les cépages résistants, la commission « expérimentations » promet d’être active en 2022 afin d’anticiper aux mieux les aléas climatiques. Le syndicat prévoit même de l’étendre à tout le territoire. 
Les problèmes de recrutement et transmission étaient également à l’ordre du jour. « On a énormément de mal à recruter du personnel alors qu’on a 4 M de chômeurs. Des gens sont venus de Bulgarie, du Chili, du Pérou pour les vendanges, on marche sur la tête », s’est indigné Roland Bonnard, viticulteur à Seillonnaz. Malgré plusieurs installations sur le département (huit en 2021-2022) et « un foncier relativement accessible, il n’y a personne pour reprendre à la suite des exploitants qui vont partir à la retraite », regrette également Jean-Luc Guillon. Les conséquences de la guerre russo-ukrainienne ne facilitent pas non plus le grand export. Situation d’autant plus critique que la balance commerciale agricole française est aujourd’hui déficitaire. Aussi, la Chambre du commerce et de l’industrie (CCI) invite les viticulteurs à se rapprocher de ses services afin de les accompagner dans l’étude de leur projet d’exportation. 
 
L’année 2022 devrait être plus sereine 


Malgré une récolte historiquement basse et un résultat négatif prévu d’environ 65 000 € pour 2022*, « les chiffres sont bons avec un résultat positif de plus de 18 000 € en 2021, note Yannick Chaudet, trésorier. Nous avons retrouvé notre niveau d’il y a quasiment deux ans, ce qui témoigne de la bonne santé de notre structure. Cela devrait nous permettre de vivre plus sereinement le déficit prévisionnel. » Le syndicat s’accorde même quelques excentricités pour l’année 2022 avec un nouveau projet « Cav’âge en Bugey ». Huit cuvées pré-sélectionnées et habillées impartialement aux couleurs des vins du Bugey seront descendues au fond de la grotte du Cerdon le 29 juin prochain et ne seront remontées qu’en novembre 2023 ou 2024. Un projet qui s’inscrit par ailleurs dans le développement de l’œnotourisme.   


* Ce déficit s’explique par une baisse des cotisations, la fin d’une convention avec la Chambre d’agriculture qui apportait annuellement 10 000 €, une baisse des prestations capsules congés (CRD) due à une baisse des ventes de vins et à la prospection flavescence dorée.