La Confédération européenne des producteurs de maïs (CEPM) s’est réunie en congrès le 15 mai à Paris. L’occasion pour ses adhérents de renouveler leurs instances, de faire un point sur le marché mondial de cette céréale et enfin de débattre autour des prochaines élections européennes.
Le programme était chargé pour les producteurs européens de maïs qui se sont réunis pour leur troisième congrès, le 15 mai. Après le renouvellement de leur bureau (lire encadré), les représentants des principales délégations (France, Espagne, Portugal, Pologne, Bulgarie, Roumanie et Italie) ont pris connaissance de l’état des marchés mondiaux de cette céréale. En quarante ans, depuis les années 1980, aussi bien la production que la consommation mondiale a triplé passant de 400 millions de tonnes (Mt) à 1,2 milliard de tonnes (Mdt). Les États-Unis sont le premier pays producteur (390 Mt) devant la Chine (289 Mt) et le Brésil (124 Mt). L’Europe suit en quatrième position avec seulement 61 Mt. Elle est d’ailleurs importatrice nette d’environ 25 à 26 Mt par an, se fournissant en Ukraine et au Brésil. Ce dernier pays concurrence d’ailleurs les États-Unis, exportant chacun environ 53 Mt de maïs par an. En fait, les États-Unis consacrent une grande partie de leur production (172 Mt) à la transformation en biocarburants (éthanol). La croissance mondiale s’explique aussi par la stabilité des rendements grâce aux OGM. Avant 1996, date à laquelle les Américains ont utilisé du maïs génétiquement modifié, les rendements effectuaient le yoyo en fonction des aléas climatiques, pour un rendement entre 5 et 7 t/ha, parfois 8 t/ha. Depuis cette date, les rendements ont augmenté (10 à 11 t/ha en moyenne) et sont stabilisés, raffermissant ainsi les prix du marché. De son côté, la Chine a peiné à trouver son modèle économique. Importatrice nette avant 2004, elle a massivement subventionné cette céréale permettant à la production de doubler passant de 125 Mt en 2004 à 250 Mt en 2015. Mais devant des stocks suffisants en 2015, Pékin a mis fin aux aides, rendant le pays de nouveau dépendant aux importations car la consommation était identique, voire augmentait. Pour résoudre son déficit (29 Mt de maïs importés en 2020), elle s’est convertie aux OGM, augmentant ses rendements à 7 t/ha et retrouvant ses niveaux de 2015. « L’Europe est dépendante au maïs et le restera », a tranché Arthur Potier, consultant senior à Agritel, regrettant que Bruxelles interdise ce que ses concurrents permettent. Peut-être les NGT permettront-ils de réduire cette dépendance en donnant des rendements plus réguliers. « Ce qui donnerait de la visibilité aux investisseurs, a-t-il estimé. Car des marchés sont à prendre, en particulier ceux de l’Afrique dont la croissance démographique va exploser d’ici 2050 : + 81,7 en Afrique subsaharienne ; + 40,3 % en Afrique du Nord et de l’Ouest. Or ce ne sont pas les plus favorables à ce type de cultures ».
Dialogue stratégique
« Les NGT comme d’autres dossiers spécifiques à l’agriculture (biodiversité, aides Pac…) sont débattus dans la campagne pour les élections européennes. La physionomie du Parlement qui sortira des urnes le 9 juin au soir ne sera pas fortement chamboulée », a estimé Jean-Christophe Gallien, spécialiste de campagnes électorales et politiques. Ce qui laisse entendre que, sauf grosse surprise, Ursula Von der Leyen devrait être reconduite à la présidence de la Commission. Elle pourra alors poursuivre l’inflexion agricole entreprise le 13 septembre dernier lors de son discours sur l’Union. Le président de l’Association générale des producteurs de maïs (AGPM), Franck Laborde, et son homologue du Copa, Christiane Lambert, attendent beaucoup du dialogue stratégique sur l’agriculture qu’elle a initiée, notamment sur la compétitivité des exploitations qui passe « par la capacité à produire, le revenu, la dignité et la transmission. On espère changer de logiciel », a expliqué Franck Laborde. Ce dernier attend aussi de la nouvelle mandature qu’elle mette en place des clauses miroirs sur la qualité du maïs importé. L’Europe importe aujourd’hui la moitié de son maïs du Brésil. « Aujourd’hui 78 % des produits phytosanitaires sur maïs brésiliens sont interdits en France. 55 % le sont en Europe », a-t-t-il précisé. « N’oublions pas que nous sommes nous-mêmes exportateurs et quand dans le cadre des accords de libre-échange, nous sommes aussi soumis à certaines exigences », a nuancé Catherine Geslain-Lanéelle, directrice de la prospective à la direction générale de l’agriculture (Commission européenne). Pour Christiane Lambert, il faut remettre l’alimentation au cœur même de la politique agricole, quand bien même il existe aujourd’hui « un flou géopolitique comme jamais ». Car pour elle, « l’alimentation est stratégique. C’est elle qui favorise la stabilité démocratique ».